Anticiper les besoins de recrutement, améliorer la qualité de l’emploi, structurer l’offre… Alors que le gouvernement a récemment souhaité donner une nouvelle impulsion aux services à la personne (1), une note du Commissariat général à la stratégie et à la prospective (2) livre des pistes pour l’action publique en faveur de ce secteur (3).
L’instance rattachée au Premier ministre relève tout d’abord que les services à la personne (SAP) « ne constituent pas un secteur en tant qu’entité économique ou juridique unifiée, mais résultent plutôt d’une construction sociale et fiscale ». Leur périmètre est en effet déterminé par la liste des services ouvrant droit à des avantages sociaux et fiscaux, qui se partagent entre les activités de services nécessitant un agrément (pour celles à destination des publics « fragiles » et les autres services) et les autres (ménage, bricolage…). Ce « cadre fiscalo-social constitue le principal levier d’action des politiques publiques pour soutenir le secteur, mais l’efficacité de ces aides fiscales et sociales sur l’emploi reste peu évaluée », note le Commissariat général, qui réclame donc une évaluation de ce cadre avant toute modification. D’autant que, si les services à la personne se sont fortement développés entre 2000 et 2010, depuis, leur croissance semble marquer une pause. « Un ralentissement qui pose la question de la viabilité du modèle économique sous-tendant ces services, mais aussi celle de la solvabilisation de la demande de SAP dans un contexte de crise économique et de contrainte budgétaire », estime l’instance.
Sans surprise, même si la part de l’emploi direct par des particuliers employeurs « diminue tendanciellement depuis dix ans » au profit de l’emploi de salariés rémunérés par des organismes prestataires, elle est toujours largement majoritaire, avec deux tiers des heures rémunérées en 2011 (hors assistantes maternelles), relève le Commissariat général. Autre constat : les acteurs de l’économie sociale et solidaire (ESS) – associations, mutuelles, fondations… – « dominent le marché des organismes de services à la personne puisqu’ils représentent les deux tiers des heures rémunérées prestataires, mais leur part a tendance à se réduire au profit de la sphère privée ». Les associations voient ainsi « leur modèle économique traditionnel remis en question, du fait notamment de l’arrivée de concurrents privés sur le marché des services à la personne et des différentes réglementations existant entre ces acteurs, mais aussi de leur positionnement, les structures de l’ESS intervenant davantage au profit des publics fragiles et dans des territoires ruraux ». Le Commissariat général propose donc de structurer l’organisation du secteur par « des innovations organisationnelles et techniques », de manière à améliorer sa qualité et à viabiliser les modèles économiques la sous-tendant. Car, si elle constitue « une richesse », la multiplicité des statuts, des règles et des obligations entre les différents acteurs opérant sur le marché des SAP « peut biaiser la concurrence et prend imparfaitement en compte les spécificités de ces structures et de certains publics fragiles ». Cette structuration pourrait se traduire par le regroupement de particuliers employeurs ou de structures associatives et par le développement de politiques interbranches ou de filières, suggère l’instance. Autre voie possible : développer des bouquets de services ou des offres de services intégrés et soutenir la diffusion des technologies de l’information et de la communication.
« Toutes les analyses convergent : le secteur des SAP va croître dans les années à venir du fait, d’une part, des nombreux départs en fin de carrière prévus et, d’autre part, des créations d’emploi projetées », rappelle le Commissariat général. Pour anticiper les besoins de recrutement, il lui apparaît donc nécessaire de mettre en place une véritable gestion prévisionnelle des emplois et des compétences qui permettrait aux professionnels du secteur et aux pouvoirs publics d’avoir une vision plus fine des besoins en termes de métiers et de formations pour les dix prochaines années. « Cela permettrait d’anticiper les tensions sur certains métiers et d’orienter jeunes et demandeurs d’emploi sur des formations qualifiantes vers ces métiers », estime l’instance.
Le constat est connu : « la qualité de l’emploi dans le secteur des services à la personne est faible », avec beaucoup d’emplois à temps partiel, souvent subi et très court, des conditions de travail difficiles, des rémunérations peu élevées, un accès à la formation très limité… Pour améliorer la qualité de l’emploi et renforcer l’attractivité du secteur, le Commissariat général plaide notamment pour « l’homogénéisation des certifications entre les différentes sphères de l’aide à domicile et l’établissement de passerelles entre les métiers de l’aide à domicile, de la garde d’enfants et les métiers exercés dans les établissements afin d’ouvrir des perspectives de carrière dans ces secteurs ».
(1) Voir ASH n° 2824 du 13-09-13, p. 12.
(2) Le Commissariat général s’est substitué au Centre d’analyse stratégique en avril dernier.
(3) « Services à la personne : constats et enjeux » – L’essentiel – Septembre 2013 – Disp. sur