« Nous n’avons pas réussi à réduire les écarts de réussite entre les territoires de l’éducation prioritaire et les autres établissements scolaires », a déclaré le 23 juillet dernier le directeur général de l’enseignement scolaire, et conseiller spécial de Vincent Peillon, devant les députés de la mission d’information de la commission des affaires culturelles de l’Assemblé nationale. Jean-Paul Delahaye était auditionné pour présenter le rapport de « diagnostic » – récemment rendu public – sur la politique de l’éducation prioritaire établi par le ministère de l’Education nationale et le secrétariat général pour la modernisation de l’action publique (1).
Le ministère de l’Education nationale estime consacrer aujourd’hui plus de 1,1 milliard d’euros, soit 2 % de son budget, à l’éducation prioritaire. Le rapport rappelle toutefois que les enseignants sont en moyenne, en éducation prioritaire, plus jeunes qu’ailleurs. « Ils coûtent donc moins chers mais leur efficacité est moindre car [ils] sont moins expérimentés. » Le document a chiffré cette différence de salaires à 191 millions d’euros. Au total, ce serait donc 1,5 % du budget de l’Education nationale qui alimenterait l’éducation prioritaire, retient le rapport. Malgré cet effort budgétaire, l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) recommande de doubler ce budget spécifique, indique-t-il.
Le rapport relève également des « résultats globalement décevants et inégaux » selon les niveaux et les académies. Si les résultats sont stables dans le premier degré, ils ont en revanche baissé significativement dans le second degré des réseaux ECLAIR (écoles, collèges et lycées pour l’ambition, l’innovation et la réussite) (2).
Autre point faible mis en avant : l’instabilité des équipes. Bien qu’ils ne remettent pas en cause le bien-fondé des indemnités reconnaissant la pénibilité spécifique du travail en éducation prioritaire, les rapporteurs soulignent que les politiques indemnitaires incitatives n’ont pas porté leurs fruits et que le « turn-over » des équipes perdure.
Par ailleurs, le rapport critique les choix du précédent ministre sur l’individualisation des parcours, qui témoignent d’une « conception de l’éducation prioritaire […] distinguant la réussite de chacun de la réussite de tous ».
Selon le rapport, les principaux leviers de réussite reposent sur le travail en équipe et la pédagogie. Il préconise donc de favoriser les temps d’échange et les actions de formation. S’il estime que des postes ou missions spécifiques (RASED, remplaçants…) sont utiles à l’amélioration du travail collectif, il juge en revanche la réduction des effectifs dans les classes non pertinente.
Il définit enfin des principes généraux devant servir à donner de nouvelles perspectives à l’éducation prioritaire :
→ le principe d’« éducabilité » au sein d’une école bienveillante et sécurisante cherchant l’implication des parents et s’appuyant sur des règles explicites et partagées;
→ le développement de la scolarisation avant 3 ans ;
→ le maintien d’un niveau d’exigence élevé pour les élèves. En effet, « tout montre que les enseignants qui réussissent dans ces écoles et ces collèges ont pour leurs élèves de l’ambition », remarque le rapport ;
→ le développement du rapport à l’écrit ou encore la continuité pédagogique école-collège.
Les pistes retenues par le rapport restent cependant très générales et ne sauraient se décliner sans une budgétisation conséquente. Ainsi, dès le mois d’octobre, le ministère prévoit des demi-journées « banalisées » pour préparer les assises académiques prévues novembre. Les premières annonces pourraient intervenir en janvier prochain pour prendre effet dès septembre 2014.
(1) Rapport disponible sur
(2) Voir ASH n° 2715 du 24-06-11, p. 15.