Vivre en sérénité… mourir en dignité

Michèle vit seule, elle va mourir. Quand son frère pose la caméra chez cette sexagénaire, ancienne professeure d’université, celle-ci se bat depuis dix ans contre un myélome incurable. Francis Grosjean a décidé de filmer ses derniers instants, non pour faire un documentaire sur la mort mais « un film sur la vie jus­qu’au bout ». Le choix de Michèle, c’est le choix de mourir dans la dignité. Un sujet souvent abordé de manière trop abstraite, intellectuelle, mais ici traité sans tabou, avec le cœur. Les images donnent à voir une femme à la belle énergie vitale, qui conserve ses facultés intellectuelles malgré la douleur.

Les premières années après le diagnostic, Michèle a voulu se soigner – « Les bien-portants se disent toujours que, s’ils tombaient malades, ils souhaiteraient “en finir au plus vite”. C’est pas vrai, on veut continuer à profiter », recadre-t-elle. Mais quand son néphrologue lui dit qu’elle n’a plus que quelques jours à vivre, la malade demande que les traitements cessent : « On m’a assuré que si je me soignais, je pouvais vivre deux-trois mois de souffrances supplémentaires à l’hôpital. » Elle préfère ne pas se soigner et mourir à son domicile, dans un environnement chaleureux et lucide, entourée de ses amis, de sa fille, de ses soignants. Face à la caméra, elle évoque les problèmes administratifs qui ont retardé la mise en place des soins palliatifs à domicile, puis du bien qu’ils lui ont fait. Elle parle des combats qui ont jalonné sa vie. Michèle Grosjean ne témoigne pas de manière cinématographique mais intime. Jusqu’au moment où on ne la voit plus que dormir et alterner moments de souffrances et hallucinations horribles. Puis, sans déchirement, elle s’éteint.

En complément du film, trois spécialistes des questions de fin de vie se prononcent sur le sujet : Marie de Hennezel, psychologue, clinicienne et écrivaine, Emmanuel Hirsch, directeur de l’espace éthique de l’AP-HP, et Bernard Delcour, président de l’Association française des malades du myélome multiple, à la création de laquelle Michèle Grosjean a participé en 2007. Tous insistent sur la nécessité pour les malades de pouvoir vivre sereinement jusqu’au bout afin de mourir dans la dignité.