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Deux grandes tendances en Europe

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L’expérience des pays d’Europe du Nord montre que la désinstitutionnalisation peut prendre différents visages. Tour d’horizon.

Au regard de la difficile émergence d’un modèle à la française, certains de nos voisins d’Europe du Nord apparaissent plutôt décomplexés. Dans le contexte anglo-saxon et scandinave, la philosophie de l’« independant living » prédomine en promouvant la libre décision de la personne en tant qu’individu. « L’usager est volontiers assimilé à un “client” et le système repose, à des degrés plus ou moins aboutis, sur la solvabilisation du consommateur de services adaptés », explique le Conseil français des personnes handicapées pour les questions européennes (CFHE). Cette philosophie s’accompagne d’une décen­tralisation poussée des politiques du handicap vers les municipalités et d’une « approche libérale de l’accompagnement ». L’autre particularité tient à la prise de conscience assez précoce du problème que pouvaient poser les grandes institutions de plusieurs centaines de lits. Après quelques scandales de maltraitance, une discussion sur la taille recommandée s’est ouverte en Europe du Nord dès la fin des années 1970.

ÉCLATEMENT/FERMETURE

Deux grandes tendances ont émergé. Les pays qui ont fait de l’accessibilité universelle la pierre angulaire des politiques du handicap, comme la Suède ou la Norvège, ont engagé une politique radicale de fermeture des établissements spécialisés. Au Danemark, le mouvement est allé jusqu’à la suppression de toute mention du terme « institution » dans les textes de loi. D’autres Etats ont eu une action plus mesurée en encourageant les centres ouverts sur la communauté ou les dispositifs d’assistance à la vie autonome. En Angleterre, aux Pays-Bas et en Belgique, où les politiques du handicap s’inscrivent davantage dans une logique d’assistance, le passage de la vague de désinstitutionnalisation a donné un modèle hybride. Si les grands établissements monolithiques ont disparu, une partie de leur population est accueillie dans une constellation de petites unités inscrites dans un réseau sanitaire et social. Dans les deux cas, cette recomposition s’est faite au profit d’actions ambulatoires considérées comme plus participatives et intégratives, qui ont contribué à alimenter le phénomène de réduction du nombre de places en établissements spécialisés.

Will Buntinx, docteur en psychologie et professeur à l’université de Maastricht, aux Pays-Bas, observe que, là où les ­établissements subsistent, « les développements les plus récents visent à faire disparaître leurs frontières avec la société » (1). On voit ainsi des institutions qui ouvrent leur terrain à la construction de maisons et de petits ateliers. Les services de logement social sont fréquemment associés à un programme immobilier de droit commun, dans l’objectif de louer des logements à des institutions qui intégreront leurs services dans le milieu ordinaire.

Pour autant, ces politiques peuvent avoir des effets pervers, nuance Will Buntinx. En Scandinavie, on assiste à une perte d’expertise sur des handicaps aussi courants que la déficience intellectuelle. « Cette connaissance était concentrée dans les institutions. Faute d’avoir vu des regroupements de professionnels se constituer par la suite, il est devenu difficile de trouver de l’information spécialisée. » Conséquence ? Dans ces pays où les maisonnées de quelques personnes ont remplacé les institutions, une dynamique de regroupement de ces micro-structures apparaît. « Une réinvention des institutions est en cours, mais sous une tout autre forme qu’auparavant. »

Notes

(1) Lors du colloque « Handicap et institution : vers d’autres modèles », organisé le 30 mai dernier par le CNAM avec la Fondation des amis de l’atelier.

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