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« Nous souhaitons développer une expertise sur les droits des chômeurs »

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Face à la multiplication des actions en justice opposant les chômeurs à Pôle emploi, le Syndicat des avocats de France (SAF) vient de créer une commission « droits des chômeurs ». Objectif : « remettre du droit dans des “pratiques de guichet” », explique Emilie Videcoq, co-animatrice de la commission.
Pourquoi cette commission ?

De plus en plus de chômeurs font appel à nous pour attaquer Pôle emploi devant les juridictions administratives ou judiciaires (1). La multiplication de ces contentieux est liée à la hausse du chômage mais aussi à des affaires dans lesquelles l’établissement public a été condamné. En février 2012, la Cour de cassation l’a obligé à verser des dommages et intérêts à un chômeur en fin de droits pour ne pas lui avoir fourni une information complète (2). En septembre 2012, le tribunal administratif de Paris l’a condamné pour manquement à ses obligations d’accompagnement. Cette décision – qui a finalement été annulée par le Conseil d’Etat pour vice de forme – a eu une portée symbolique forte : le juge a estimé que le droit à l’emploi était une liberté fondamentale et en a tiré des conséquences concrètes en obligeant Pôle emploi à exécuter sa mission de service public (3). Ces actions ont porté leurs fruits : aujourd’hui, les chômeurs, épaulés par des associations, des syndicats et des avocats, osent aller en justice pour faire valoir leurs droits.

Quelle est la nature de ces litiges ?

Certains concernent l’indemnisation et les indus (4). Se pose notamment le problème du recalcul des droits du chômeur après une décision aux prud’hommes. Qui doit rembourser les indemnités de licenciement indûment versées à un salarié dont le licenciement pour motif économique a été annulé ? Dans une affaire en cours, le ministre du Travail, Michel Sapin, considère que c’est à l’ancien salarié de payer le trop-perçu (5) alors que le code du travail prévoit qu’en cas de licenciement économique nul, c’est à l’employeur de rembourser à Pôle emploi les indemnités dans la limite de six mois. Par ailleurs, les radiations abusives se sont multipliées et nous avons eu de nombreuses demandes à ce sujet. Des chômeurs, par exemple, ont été radiés pendant deux mois pour être arrivés avec vingt minutes de retard à leur convocation. Or le simple retard n’est pas un motif suffisant. Sur ce point, j’ai toutefois le sentiment que Pôle emploi commence à modifier ses pratiques et à respecter la loi (6).

Le défaut d’accompagnement des chômeurs reste aussi un motif de contentieux…

Certains de nos clients se voient refuser sans cesse leur formation. Je défends un agent technico-commercial qui, depuis un an, demande à suivre une formation en anglais et se heurte à une fin de non-recevoir de la part de Pôle emploi, qui a pourtant validé son besoin de formation. Nous avons porté l’action en référé devant le tribunal administratif, afin de résoudre cette situation d’urgence.

Que va permettre la commission ?

Nous – actuellement six avocats – allons travailler avec des organisations telles que la CGT Chômeurs et l’association Recours radiations pour réfléchir aux dysfonctionnements constatés dans les pratiques de Pôle emploi qui portent atteinte aux droits des chômeurs. Nous souhaitons remettre du droit dans des « pratiques de guichet » trop souvent déshumanisées, insuffisamment encadrées et que les chômeurs ne peuvent pas comprendre. La réglementation est très complexe, nous souhaitons la rendre plus accessible et développer une expertise sur les droits des chômeurs, ce qui n’a jamais été fait auparavant. Concrètement, nous réfléchissons à la création d’un kit de défense des chômeurs destiné aux avocats, syndicats, associations, qui détaillera de manière pédagogique les possibilités d’action en justice. La défense des travailleurs passe aussi par la défense de ceux qui sont privés d’emploi !

Notes

(1) Au tribunal administratif de Paris, plus de 110 dossiers ont été enregistrés durant les six premiers mois de 2013, presque autant que pour l’ensemble de l’année 2012 (moins de 130).

(2) Voir ASH n° 2749 du 2-03-12, p. 12.

(3) Voir ASH n° 2775 du 21-09-12, p. 45 et n° 2778 du 12-09-12, p. 42.

(4) Le médiateur de Pôle emploi a consacré un rapport aux indus – Voir ASH n° 2819 du 19-07-13, p. 7.

(5) Le SAF a écrit au ministre pour contester cette position – Voir www.lesaf.org.

(6) Dans un autre rapport, le médiateur de Pôle emploi recommande de mettre fin aux radiations automatiques pour absence à un rendez-vous à Pôle emploi – Voir ASH n° 2800 du 8-03-13, p. 10.

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