La maladie, l’imminence de la mort plongent le corps et le psychisme dans le chaos. Mais la fin de la vie n’est pas qu’un moment de pure douleur : elle voit aussi émerger des forces et des blessures, qu’il faut soutenir et entendre. Telle est la conviction d’Agnès Bressolette, psychologue et psychothérapeute dans un service de soins palliatifs à Bruxelles. De sa fréquentation continue et prolongée de la mort, elle a tiré quelques Petites leçons de fin de vie qu’elle expose dans Nés vulnérables, un ouvrage qui conjugue grands mythes, philosophie et expérience de terrain. Dans ce témoignage très personnel, Agnès Bressolette défend sa conception de l’accompagnement de la fin de vie : entendre les souffrances, les dire sans ajouter à la douleur, prodiguer des attentions qui permettent « d’échapper à ce qui tue la vie, entraîne dans la spirale de la répétition mortifère, empêche de croire que l’ouverture à la vie, à l’autre, à l’amour, à la relation est possible ». Dans ces « aires floues » des derniers instants où « la raison s’essouffle », peut-être faut-il « puiser quelque chose du côté de la seule chose humaine qui reste », écrit-elle : dans une certaine forme de « croire ». « En soins palliatifs, le croire est omniprésent, dans toutes ses acceptions. Il s’agit de ne pas nier ce qui est inéluctable et, en même temps, d’être ouvert à ce qui est imprévisible. » Voilà, soutient-elle, le seul moyen de demeurer humain jusqu’au bout, un humain né vulnérable et qui, par l’attention qui lui est prodiguée, « retrouve cette expérience d’être porté, sans se sentir maltraité », et parvient à trouver la force de « prendre son envol, de manière unique ».
Nés vulnérables. Petites leçons de fin de vie
Agnès Bressolette – Ed. PUF, coll. « La Nature humaine » – 14 €