Attendue depuis le « Grenelle de l’insertion » de 2008, la réforme du financement de l’insertion par l’activité économique (IAE) vient d’être actée par le Premier ministre pour une mise en œuvre en 2014 (voir ce numéro, page 9). Le principe : la généralisation de l’aide au poste, aujourd’hui applicable aux entreprises d’insertion, aux structures qui recourent aux contrats uniques d’insertion et d’accompagnement dans l’emploi, dans un objectif de simplification et de sécurisation. Le montant « socle » devrait être indexé sur le SMIC, une avancée qualifiée d’« historique » par le Comité national des entreprises d’insertion (CNEI), qui espère que cette indexation sera effective dès 2014. Le montant modulé, lui, dépendra de critères liés aux publics accompagnés, aux efforts d’insertion par la structure et à ses résultats.
Malgré des zones d’ombres à lever sur certaines modalités concrètes de la réforme, le CNEI salue le volontarisme du gouvernement pour « un secteur aujourd’hui fragilisé ». Il entend néanmoins alerter les parlementaires sur le « montant socle » de l’aide au poste pour les EI (10 000 €), encore « en deçà du coût réel » de leur mission d’insertion, qu’il estime à environ 11 000 € (contre 9 681 € aujourd’hui).
Egalement satisfaite, la FNARS (Fédération nationale des associations d’accueil et de réinsertion sociale) souligne que « les montants actuellement perçus par les structures, en moyenne, par poste, ont été revalorisés » et que « des postes seront créés, pour une augmentation totale du budget de l’Etat de l’ordre de 15 millions d’euros » en 2014. Ce qui ne l’empêche pas de rester vigilante sur « les effets déstabilisateurs que le passage à l’aide au poste pourrait avoir dans certaines régions pour les associations intermédiaires (AI) et les ateliers et chantiers d’insertion (ACI) ». Les réseaux se réjouissent particulièrement de la revalorisation (de 18 700 à 20 160 € pour les ACI notamment) des montants approuvés par le Premier ministre par rapport à ceux proposés dans la note de la présidente du CNIAE (Conseil national de l’insertion par l’activité économique), sous-estimés en raison d’une « erreur de calcul dans la proposition de l’Etat qui avait servi de base aux négociations », explique la FNARS.
Cette révision à la hausse a permis de lever les inquiétudes de Chantier école qui, comme les réseaux Cocagne, Tissons la solidarité et les signataires de la convention collective des ACI (1), s’était opposé aux propositions du CNIAE. Autre préoccupation évoquée : la perte du bénéfice des financements liés à la professionnalisation dans le cadre de la démarche de certification des compétences engagée par la branche, du fait du passage aux contrats à durée déterminée d’insertion.
« Cette question est en cours d’examen à la délégation générale à l’emploi et à la formation professionnelle et il ne devrait pas y avoir d’obstacle pour trouver une solution », indique Alexandre Bonjour, secrétaire général du Coorace.
Le maintien des exonérations spécifiques dont bénéficient les structures reste également à trancher. L’Etat travaillerait à un mécanisme de compensation dans le cas où elles disparaîtraient. « Il faudra également veiller à ce que le taux de cotisation accidents du travail, fixé à 1,5 % pour les ACI, soit maintenu », prévient Alexandre Bonjour. En outre, « le passage à l’aide au poste pourra faire des perdants parmi certaines AI, souvent les plus petites et les plus isolées, notamment en milieu rural ». Les ajustements nécessaires et l’accompagnement des structures dans la période de transition vers les nouvelles mesures doivent être travaillés avec l’Etat dès la rentrée, en même temps que doivent aussi s’ouvrir deux autres chantiers pour la réforme du secteur : la gouvernance et l’accompagnement des publics.
(1) Le Synesi (Syndicat national des employeurs spécifiques d’insertion) pour les employeurs, la CFDT-PSTE et la CFTC-Protection sociale pour les salariés.