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Un projet de réforme des contentieux sociaux inquiète les magistrats

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Vers une justice adminstrative à deux vitesses ? Les syndicats de magistrats administratifs s’alarment d’un projet de décret réformant le code de justice administrative – issu d’une proposition du Conseil d’Etat –, qui devrait bientôt être soumis à la signature de la garde des Sceaux, pour entrer en vigueur au 1er janvier 2014. Entre autres dispositions, le texte modifie la liste des contentieux relevant, dans les tribunaux administratifs, de la compétence d’un magistrat statuant seul. Il y inclut les « litiges relatifs aux prestations, allocations ou droits attribués au titre de l’aide ou de l’action sociales, du logement ou en faveur des travailleurs privés d’emploi ». Autrement dit, s’insurgent les magistrats, le texte crée une procédure spéciale pour les « contentieux sociaux », qui ne seront plus jugés par une formation collégiale de jugement du tribunal administratif. De plus, ces litiges seraient traités sans les conclusions du rapporteur public et jugés « en premier et dernier ressort », sans possibilité de faire appel (seule demeurerait le pourvoi en cassation). Alors que les rédacteurs arguent, dans le rapport au Premier ministre ayant accompagné l’avant-projet, d’un gain d’efficacité de la procédure, les magistrats s’inquiètent d’un régime d’exception, dépourvu de garanties procédurales et « stigmatisant une partie, déjà fragilisée, de la population ». Les dossiers sociaux, qui sont régis par des textes complexes et dont l’issue comporte des enjeux majeurs pour les intéressés, méritent le même traitement que les autres contentieux, plaident-ils.

Conscients que les personnes démunies « ne connaissent pas les codes administratifs et encore moins les codes juridiques et sont, de fait, très peu assistées par des professionnels du droit », les auteurs se montrent néanmoins soucieux de leur apporter quelques contreparties. Et prévoient des dispositions spéciales dédiées aux contentieux sociaux. La juridiction administrative devrait ainsi inviter le requérant à régulariser sa requête lorsque celle-ci est insuffisamment motivée. L’administration aurait pour obligation de communiquer l’intégralité du dossier constitué pour l’instruction de la demande de la prestation ou de l’aide. Le texte introduit, par ailleurs, une part « d’oralité » dans la procédure, en permettant la poursuite de l’instruction à l’audience. Pour les syndicats, ces contreparties sont des « leurres » et n’aideront pas les justiciables dans leur recours. « En réalité, cette démarche est motivée par des préoccupations comptables, de gestion des contentieux de masse au sein de la juridiction administrative », avec le risque de dégrader les conditions d’accès à la justice, font-ils valoir.

Alors que le Syndicat de la juridiction administrative et l’Union syndicale des magistrats administratifs ont voté contre le texte lors de son examen, le 9 juillet, par le Conseil supérieur des tribunaux administratifs et des cours administratives d’appel, l’instance a donné un avis favorable. Les deux syndicats ont adressé un courrier à Christiane Taubira pour lui demander de ne pas signer le projet de décret et de « le soumettre à un nouvel examen de [ses] services ».

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