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Protection de l’enfance : la CNCDH plaide pour une diminution des placements

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« Le nombre de mineurs placés en France est, en proportion, supérieur à celui de nombreux autres pays européens », rappelle la Commission nationale consultative des droits de l’homme (CNCDH) dans un avis sur le droit au respect de la vie privée et familiale et les placements d’enfants en France, adopté le 27 juin (1). Environ 273 000 mineurs sont pris en charge par les services de protection de l’enfance des conseils généraux, parmi lesquels 134 000 sont placés hors de leur milieu familial à la suite de décisions administratives ou judiciaires. Des chiffres en augmentation depuis plusieurs années. Or, souligne la CNCDH, « 50 % des placements pourraient être évités » (2) et seuls 20 % sont prononcés pour cause de maltraitances ou de violences sexuelles. La très large majorité des placements est liée à des carences éducatives et, plus largement, aux conséquences de la grande pauvreté sur la vie familiale.

Si la commission « ne remet pas en cause le principe des placements d’enfants », elle souhaite que des efforts soient faits afin de n’y avoir recours que lorsque c’est légitime et nécessaire, en l’occurrence en cas de maltraitance. Elle réaffirme sa position selon laquelle « tout doit être fait pour permettre aux enfants d’être élevés par leurs parents » et juge que « le retrait de l’enfant de sa famille doit être considéré comme une mesure de dernier recours. Or on constate que le placement en foyer ou en famille d’accueil est souvent privilégié en première intention, sans même avoir préalablement envisagé des solutions avec l’environnement proche connu de l’enfant (grands-parents, tiers digne de confiance…), qui sont moins stigmatisantes et traumatisantes. »

La CNCDH estime que, six ans après l’adoption de la loi du 5 mars 2007 sur la protection de l’enfance, « les principaux objectifs visés par la réforme n’ont toujours pas été atteints ». Ainsi, alors que la prévention apparaissait dans le texte comme un enjeu majeur, moins de 20 % des financements de l’aide sociale à l’enfance ont été consacrés à des programmes de ce type depuis 2005. La diversification des réponses et des modes d’accompagnement est très limitée et inégale selon les territoires, le placement et l’action éducative en milieu ouvert restant « les modalités de prise en charge privilégiées ». Quant au projet pour l’enfant, que la loi a rendu obligatoire, « la plupart des acteurs s’accordent pour dire qu’il est rarement mis en place de manière systématique » et que les familles « ne sont que rarement associées » à son élaboration. La commission regrette également que, à la fin de l’année 2012, seuls 54 départements aient installé un observatoire départemental de la protection de l’enfance, avant de s’interroger : « comment alors mieux repérer les situations d’enfants en danger si le phénomène n’est pas évalué »

Comme le comité d’experts sur l’observation en protection de l’enfance (3), la CNCDH déplore que la notion d’« information préoccupante » ait été créée « sans avoir été définie précisément » et sans que la différence avec le « signalement » apparaisse clairement. A cause de ces imprécisions, « les travailleurs sociaux éprouvent des difficultés à effectuer leur travail d’aide et d’accompagnement auprès des enfants et des familles […]. Cette absence [de définition] conjuguée au manque de critères d’évaluation et d’indicateurs de séparation conduit trop souvent au non-respect de l’intérêt supérieur de l’enfant. » Ainsi, certaines situations de maltraitance peinent à être identifiées, conduisant à une intervention trop tardive, lorsque « l’enfant est gravement en danger », alors que, dans le même temps, des situations de négligence ou de carence de la part des parents mènent à des placements hors de la cellule familiale, sans que soient recherchées d’autres solutions sur le long terme. La CNCDH propose donc la tenue d’une conférence de consensus sur la protection de l’enfance, dont le but serait de comprendre ce qui a conduit à des dysfonctionnements et d’en éviter la reproduction. Elle recommande également la mise en place de formations communes à tous les professionnels de l’enfance et de la famille afin de « développer une culture du travail interdisciplinaire ». Même lorsqu’un placement a eu lieu, il faut renforcer la prévention « pour permettre aux parents de retrouver le plus rapidement possible les bonnes conditions d’un retour de leur(s) enfant(s) au sein de la famille », plaide-t-elle encore. A ce titre, elle suggère la mise en œuvre, auprès des familles en difficulté, de plans d’action intégrant de manière coordonnée l’ensemble des dispositifs de soutien : traitement du mal-logement, soutien à la parentalité, accompagnement en économie sociale et familiale, etc.

Enfin, la commission souhaite que les placements soient le plus court possible, associés à un travail important pour maintenir les liens familiaux et faciliter le retour de l’enfant au sein de sa famille. Pour cela, elle demande que « le juge fixe la nature et la fréquence des droits de visite et d’hébergement et ne laisse ce soin aux services qu’après s’être assuré de l’accord des parents ». Le juge devrait également être garant du droit pour les enfants à la non-séparation des frères et sœurs.

Notes

(1) Avis consultable sur www.cncdh.fr.

(2) Chiffre issu du rapport Naves-Cathala de 2000 et confirmé par Pierre Naves, inspecteur général des affaires sociales, en février 2012.

(3) Voir ASH n° 2817 du 5-07-13, p. 10.

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