Au contraire, notre rapport 2013 met en évidence la multiplication des difficultés que rencontrent les habitants des squats et bidonvilles en France. Beaucoup de mairies refusent encore de domicilier les familles rom, ce qui les empêche, par exemple, d’obtenir l’aide médicale de l’Etat. Des familles ont aussi dû faire face à des refus de scolarisation, comme à Ris-Orangis (Essonne) ou à Saint-Fons (Rhône) (3), où seule l’intervention du défenseur des droits a permis de faire respecter la convention internationale des droits de l’Enfant !
Le rapport note aussi de nombreux dysfonctionnements dont les bénévoles et les associations de terrain ont été les témoins : des tracasseries policières allant de procès-verbaux pour des pneus lisses sur des vélos à des évacuations de bidonvilles non réglementaires.
Pourtant des mesures simples à mettre en œuvre – comme la levée des mesures transitoires qui empêchent les Roms de travailler – permettraient un changement des mentalités ! Il faut que les médias cessent de parler systématiquement de délinquance, de prostitution ou de racket quand ils évoquent les Roms. Et que dire des discours politiques qui stigmatisent davantage encore ces citoyens européens en affirmant qu’ils refusent majoritairement de s’intégrer ! Sans nier qu’il existe, à la marge, des Roms qui ont une migration pendulaire, cela ne représente pas la majorité des personnes que nous rencontrons. Les familles rom aspirent juste à un meilleur avenir pour leurs enfants en France et à rentrer dans le droit commun. Un diagnostic social réalisé sur le campement de Moulin-Galant (Essonne) a démontré que la majorité des familles vivait dans le département depuis plus de cinq ans, l’autre moitié depuis plus de dix ans. C’est donc une chimère de penser que ces gens ont un avenir ailleurs que dans notre pays. Non seulement les expulsions se multiplient – une centaine depuis août 2012 –, mais en plus elles sont inutiles et absurdes puisque ces Roms, dans leur grande majorité, ne repartiront pas. Evacuer, c’est juste ajouter de la misère à la misère…
Oui, même si nous n’étions pas dupes qu’il s’agissait d’un texte de compromis. Cette circulaire propose un cadre de référence pour « évacuer les campements illicites » avec la prise en compte, avant l’évacuation, des besoins des personnes présentes dans le bidonville par l’instauration de diagnostics individuels. Mais elle manque de précisions et fait donc l’objet d’interprétations variées. Il y a une disparité qualitative selon la volonté des élus locaux et des préfectures : si les « bilans sociaux » sont généralement faits, ils ne sont pas toujours réalisés par des travailleurs sociaux. A Evreux, par exemple, c’est la police municipale qui a effectué un simple recensement ! Des bilans plus complets, avec des propositions de relogement, ne sont pas pris en compte par les autorités…
Nous soutenons la délégation inter ? ministérielle à l’hébergement et à l’accès au logement qui préconise l’amélioration de la qualité des diagnostics sociaux. La mise en œuvre de micro-projets est aussi une piste. Il existe des expériences réussies d’inclusion sociale de familles rom dans le droit commun – des mobiles-homes à Igny (Essonne) ou des logements modulaires de Montreuil (Seine-Saint-Denis). Il n’est pas question de donner des passe-droits pour l’accès au logement. Mais si la France a su résorber les immenses bidonvilles autour de Nanterre et de Saint-Denis dans les années 1970, je ne vois pas pourquoi nous n’arriverions pas à trouver une solution pour 16 000 à 20 000 citoyens européens.
(1) Disponible sur
(2) Le Collectif Romeurope est composé d’associations dont le Secours catholique et de comités et collectifs de soutien.
(3) Voir ASH n° 2797 du 15-02-13, p. 23.
(4) Voir ASH n° 2772 du 31-08-12, p. 20.