Doutes et inquiétudes entourent décidément la diffusion de la circulaire relative au nouveau « dispositif national de mise à l’abri, d’évaluation et d’orientation des mineurs isolés étrangers », fruit d’un protocole d’accord signé entre l’Etat et l’Assemblée des départements de France (1). A son tour, le GISTI (Groupe d’information et de soutien des immigrés) regrette la mise en place d’un « dispositif dérogatoire » au droit commun, « rarement une bonne nouvelle » pour les étrangers, d’autant plus qu’il concerne la protection de l’enfance. Ce compromis tente surtout, à ses yeux, « de satisfaire les exigences des départements » réticents à assumer la prise en charge de mineurs n’ayant aucune attache sur leur territoire. Ou « comment se refiler la patate chaude », fustige l’association, pour qui la description des procédures est émaillée de termes (« fraude documentaire », « doute sur les déclarations de l’intéressé ») marqués par la suspicion. Le dispositif étend à la totalité du territoire « une recette similaire à celle expérimentée à partir d’octobre 2011 dans la Seine-Saint-Denis », qui est « pourtant loin d’avoir démontré [qu’elle] avait amélioré l’accueil des jeunes concernés ».
L’association s’interroge également sur l’absence de garanties offertes à ces jeunes en termes d’information, d’assistance et de recours juridiques. Sans compter que le dispositif, qui s’appuie « sur un texte d’orientation sans fondement juridique solide », peut « parfaitement susciter l’opposition de certains conseils généraux et rester ainsi partiellement ou totalement lettre morte ». Le Syndicat de la magistrature, qui déplore la marginalisation du rôle du juge des enfants dans le dispositif, émet les mêmes réserves. Alors que nombre de mineurs isolés sont aujourd’hui laissés à la rue, « triés, soumis à d’humiliantes vérifications ou rejetés de notre système de protection », il demande à l’Etat et aux départements d’« assumer une véritable politique d’accueil des mineurs isolés étrangers, avec l’application du droit commun et des moyens de protection adaptés ».
Plus optimiste sur les avancées obtenues – engagement de l’Etat et définition d’une procédure d’évaluation de la minorité notamment –, Forum réfugiés-Cosi rappelle néanmoins « la nécessité de veiller au respect de l’intérêt supérieur de l’enfant » dans le système de répartition des mineurs sur le territoire. L’association se montrera donc vigilante sur ce point lors de la mise en œuvre du dispositif. Et attend une réponse du ministère à sa demande de faire partie du comité de suivi.