Hugo est une énigme. Si vous le croisez dans la rue, vous penserez qu’il est simple d’esprit. Il a parfois des comportements étranges : il peut appuyer 200 fois de suite sur un bouton d’interrupteur ou se montrer d’une politesse excessive. Pourtant, il est d’une intelligence remarquable, c’est même un génie dans son domaine, le piano. Le cerveau d’Hugo raconte la vie mouvementée de ce garçon depuis sa naissance jusqu’à l’âge de 22 ans ; le documentaire-fiction raconte surtout l’histoire d’un autiste Asperger sous une forme originale. Hugo n’existe pas, son personnage est la somme de tous les autistes Asperger rencontrés par Sophie Révil, réalisatrice et auteure du film (avec l’aide de Nouchine Hadjikhani, chercheuse en neurosciences). Les limitations handicapantes, en particulier socialement, des personnes atteintes de ce syndrome sont souvent associées à des compétences exceptionnelles. Ainsi, dans ce film touchant dont chaque scène est entrecoupée de témoignages de très nombreux autistes et de leurs parents, on rencontre des jeunes devenus chercheurs ou qui maîtrisent plusieurs langues alors qu’ils étaient muets à l’âge de 6 ans ou considérés comme attardés mentaux. Leur parole, la plupart du temps très claire, est franche, fraîche et surtout enrichissante. Enfin, des « Asperger » racontent les traumatismes qu’ils ont vécus à l’école – « Je me suis fait souvent et régulièrement tabassé, quasi systématiquement en maternelle et en primaire. Au collège, les tabassages sont moins fréquents mais plus conséquents », relate Josef –, les mauvaises orientations, les passions, le manque de relations amicales et amoureuses, l’hypersensibilité ou la « cécité sociale ». La fiction sur Hugo ne vient que corroborer ces dires. Hugo rate une note de piano et devient fou furieux, Hugo tombe amoureux d’une fille qui ne le considère que comme un ami, Hugo se cloître dans sa chambre en écoutant Glenn Gould en boucle, Hugo n’arrive jamais à regarder les gens dans les yeux (« C’est comme tomber dans un puit sans fonds »). C’est un comédien valide, Thomas Coumans, qui interprète brillamment le rôle, l’actrice Sophie Marceau assurant le commentaire en voix off.
La réalisatrice, dont le jeune frère est lui aussi handicapé, a voulu aussi montrer la face noire de l’autisme, et notamment comment les parents ont longtemps pu être culpabilisés par les psychiatres. Elle a choisi de mêler la fiction et le documentaire pour aborder ce sujet de façon « moins sèche », tout en expliquant précisément les mécanimes de l’autisme.
Le cerveau d’Hugo
Sophie Révil – Avec la voix de Sophie Marceau – 1 h 37 + bonus – Ed. France Télévision Distribution (sortie le 20 juin) – 14,99 €