On les appelle les travailleurs pauvres : retraités contraints de reprendre un emploi, intérimaires embauchés au jour le jour, salariés cumulant les petits boulots. Selon les définitions, ils seraient en France entre 2 et 7 millions. Pourtant, « nous les croisons, nous vivons à côté d’eux sans bien connaître leurs conditions d’existence », constate Olivier Jobard. Habitué des projets au long cours – son travail sur l’immigration, conduit depuis 2004, lui a valu plusieurs prix –, le photographe s’est plongé dans la vie de dix de ces galériens du quotidien, dans leur existence « sans avenir ». Primée dans le cadre du concours de Sophot, portail de la photographie sociale et environnementale, soutenue par le festival Photoreporter en baie de Saint-Brieuc, l’expoqsition La vie à durée déterminée est présentée jusqu’au 20 juillet à la galerie Fait & cause. Les clichés d’Olivier Jobard montrent les gestes attentionnés de David, professeur remplaçant, alors qu’il couche ses enfants pour la nuit sur des matelas posés à même le sol ; le regard vide et le corps rompu de Mariam, tombée d’épuisement sur son canapé à la fin d’une journée de ménages ; le dos courbé d’Heinia, retraitée tunisienne ployant sous le poids de son cabas, rempli des provisions glanées dans les poubelles. Des vies « au jour le jour », sans chauffage ni loisirs, à trimer aux aurores pour payer l’emplacement de la caravane ou conserver son titre de séjour, maintenir tant bien que mal un équilibre précaire, à la merci du moindre imprévu. En filigrane apparaissent aussi les souffrances des enfants, tirés du sommeil avant l’aube, privés de promenades avec leurs parents sans papiers, bousculés par une vie morcelée. « Un soir, le petit m’a dit : “Maman, j’aime quand tu es malade”, raconte ainsi Victoria, caissière à Carpentras. Surprise, je lui ai demandé pourquoi. Il m’a répondu : “Parce que comme ça, on est tous les deux.” »
La vie à durée déterminée
Olivier Jobard – Jusqu’au 20 juillet à la galerie Fait & cause – 58, rue Quincampoix, 75004 Paris – Du mardi au samedi, de 14 h à 19 h – Entrée libre – Tél. 01 42 74 26 36 – A voir aussi sur