Les 10 à 12 millions de Roms présents en Europe subissent depuis bien longtemps des persécutions, des exclusions et des discriminations dans les domaines de l’emploi, de l’éducation et du logement. Selon l’Agence des droits fondamentaux de l’Union européenne, un Rom sur deux a été victime de discrimination raciale. Amnesty International travaille sur ces questions depuis plusieurs années. Nous distinguons ce qui se passe dans les Balkans, en Hongrie, en Roumanie, en Tchéquie, où les Roms sont des citoyens du pays, et en France ou en Italie où ils viennent chercher une vie meilleure. Dans les premiers, malgré des condamnations de la Cour européenne des droits de l’Homme, les discriminations perdurent et s’aggravent : par exemple, les enfants rom peuvent être mis dans des classes à part, voire pour déficients mentaux. Dans les seconds, on constate surtout une discrimination résidentielle et un rejet dans l’opinion publique qui croît avec la crise économique.
Depuis le changement de gouvernement, il y a eu un travail au niveau interministériel, la circulaire du 26 août 2012 (2), la nomination du préfet Alain Régnier comme chargé de mission sur l’accompagnement des Roms (3)… Malgré ces efforts, les évolutions tardent à venir et les expulsions de campements continuent au même rythme. En raison des mesures transitoires, les citoyens européens que sont les Roms de Roumanie et de Bulgarie n’ont toujours pas accès au marché du travail (4). Pour l’éducation, c’est plus compliqué : quand des familles vivent dans des conditions précaires, qu’elles ont tous les jours la crainte d’être expulsées, qu’elles sont loin des structures, elles hésitent à mettre leurs enfants à l’école. Parfois, les maires sont réticents à accepter ces jeunes dans leurs établissements scolaires, ou les refusent.
En 2000, les Etats membres de l’Union européenne ont adopté une directive pour lutter contre la discrimination raciale ou fondée sur l’origine ethnique. Un texte à caractère contraignant qu’ils sont tenus de transposer dans leur législation nationale. Quant à la charte des droits fondamentaux de l’Union, entrée en vigueur en 2009, elle interdit la discrimination et consacre de nombreux droits, comme celui à l’éducation, à une assistance sociale, à une aide au logement et au travail. Mais rares sont les pays membres qui respectent ces engagements. La Commission européenne pourrait utiliser la procédure d’infraction, comme elle le fait régulièrement pour l’environnement, la fiscalité ou les transports. Elle ne joue pas suffisamment son rôle. Elle a bien envisagé l’ouverture d’une procédure d’infraction contre la France en 2010 du fait de la politique menée par le gouvernement Fillon à l’égard des Roms. Elle a néanmoins abandonné ce projet à la suite de l’engagement de l’Etat français d’apporter des garanties (5).
Outre l’organisation de manifestations et d’un débat au Parlement européen, Amnesty a lancé une pétition auprès de la Commission européenne pour qu’elle fasse mieux appliquer les engagements des pays membres (6). Nous demandons notamment qu’elle veille à ce que les Roms ne soient plus expulsés de force, qu’ils ne subissent pas de discrimination pour l’accès à l’eau et l’électricité, qu’ils aient les mêmes droits que les autres citoyens en termes d’accès à l’emploi, à la protection sociale, à la santé et à l’éducation, ou encore que les autorités nationales préviennent les agressions envers les Roms.
(1) Europe. Ici et maintenant. Droits humains pour les Roms – Disponible sur
(4) Les restrictions devraient être levées au plus tard au 1er janvier 2014 – Voir ASH n° 2797 du 15-02-13, p. 46.
(5) La France avait transmis à Bruxelles des documents visant à introduire dans sa législation les garanties requises par la directive sur la libre circulation – Voir ASH n° 2679 du 22-10-10, p. 20.
(6) Pétition disponible sur