« Conformément aux articles 3 et 12 de la Convention internationale relative aux droits de l’enfant », DEI (Défense des enfants international)-France demande, dans une lettre ouverte du 30 mars, une audience au ministre de l’Intérieur pour qu’il puisse « entendre de vive voix ce qu’ont à [lui] dire les enfants rom » accompagnés par les associations. L’organisation, qui déplore les récents propos de Manuel Valls sur les expulsions de campements (1), témoigne de plusieurs cas d’évacuations sans solution adaptée de relogement et de nombreux obstacles à la scolarisation des enfants. Elle enjoint au ministère de « mettre en cohérence » les ambitions de la circulaire interministérielle du 26 août sur l’accompagnement des évacuations de campements illicites (2) et « certaines pratiques de préfectures et de représentants d’autorités publiques sur le terrain ». Entre la volontée affichée et les mesures qui vont à l’encontre des droits des enfants, il y a « une contradiction incompréhensible », souligne, dans son courrier, la présidente de DEI-France, Sophie Graillat.
En attendant un signal du ministère, l’association espère que les décisions rendues le 4 avril par le tribunal administratif de Lyon, saisi en référé, pourront ralentir la vague d’expulsions non préparées. La juridiction a condamné le préfet du Rhône à reloger, dans un délai de quatre jours, 10 des 12 familles expulsées le 28 mars d’un campement à Villeurbanne (Rhône), sous astreinte de 75 € par jour de retard. La saturation du dispositif d’urgence « ne saurait justifier qu’aucune solution ne puisse être offerte à une famille sans abri, composée d’enfants en bas âge, compte tenu des conséquences graves pour ces enfants », indique le juge des référés dans une ordonnance concernant un couple de ressortissants roumains et leurs six enfants. Leur accueil dans des locaux inadaptés « ne saurait constituer une solution d’hébergement répondant aux exigences des dispositions de l’article L. 345-2-3 du code de l’action sociale et des familles ». L’ordonnance conclut que « la carence de l’Etat dans son obligation d’assurer un hébergement d’urgence à des personnes sans abri est caractérisée et constitutive d’une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale des requérants ». DEI-France se félicite que le magistrat ait fait « primer l’intérêt supérieur des enfants, comme le veut la Convention internationale relative aux droits de l’enfant ». Pour le Syndicat de la magistrature, « cette décision rappelle opportunément que le droit commun s’applique à tous ».
Le défenseur des droits, Dominique Baudis, a quant à lui présenté, le 9 avril, des observations juridiques devant le tribunal administratif de Montreuil (Seine-Saint-Denis), qui devait statuer en référé sur l’évacuation d’un campement à la Courneuve. Il estime en conclusion de cet avis de sept pages que « plusieurs normes européennes liant la France, telles que la Convention européenne des droits de l’Homme, la Convention internationale des droits de l’enfant et la Charte sociale européenne, impliquent – sauf faits d’une extrême gravité – de surseoir à l’évacuation d’un terrain occupé illégalement » en vue d’accorder un délai minimum de trois mois aux occupants afin qu’ils puissent « quitter les lieux dans des conditions décentes et être accompagnés par les autorités dans le cadre du dispositif préconisé par la circulaire du 26 août 2012 ».