C’était une des promesses de campagne de François Hollande. Dix ans après sa réintroduction dans le code pénal, le délit de racolage passif est en passe d’être abrogé. Une proposition de loi allant dans ce sens et portée par la sénatrice (EELV) du Val-de-Marne, Esther Benbassa, a été en effet adoptée – largement – au Sénat, le 28 mars en première lecture. Elle doit désormais poursuivre son parcours parlementaire devant les députés.
En premier lieu, le texte prévoit d’abroger l’article 225-10-1 du code pénal (1). Inséré par la loi du 18 mars 2003 pour la sécurité intérieure, ce dernier punit de deux mois d’emprisonnement et de 3 750 € d’amende « le fait, par tout moyen, y compris par une attitude même passive, de procéder publiquement au racolage d’autrui en vue de l’inciter à des relations sexuelles en échange d’une rémunération ou d’une promesse de rémunération ». Selon Esther Benbassa, trois raisons motivent sa suppression :
→ l’inefficacité de la mesure dans la lutte contre les réseaux de proxénétisme, sa principale conséquence demeurant l’augmentation notable des mises en cause directes des personnes prostituées ;
→ la stigmatisation et la précarisation des travailleuses et travailleurs du sexe – notamment dans l’accès aux soins et la vulnérabilité face aux violences –, l’article 225-10-1 du code pénal « ayant été utilisé en grande partie pour arrêter des ressortissant(e)s étranger(e)s en situation irrégulière en vue de les reconduire à la frontière » ;
→ l’existence de dispositifs légaux de droit commun pour lutter contre la traite des êtres humains et les réseaux de proxénétisme, qui permet de continuer à garantir que l’abrogation de l’infraction de racolage ne signifie pas pour autant l’impunité pour les proxénètes, qu’ils agissent seuls ou en réseau.
La proposition de loi prévoit par ailleurs de codifier, au sein du code de procédure pénale, la possibilité pour les associations dont l’objet est la lutte contre le proxénétisme et la traite des êtres humains et l’action sociale en faveur des personnes prostituées de se porter partie civile dans les affaires de traite et de proxénétisme.
(1) Rappelons que des parlementaires travaillent à l’élaboration d’un texte plus global sur la prostitution, en concertation avec le gouvernement.