« Segmentée, marquée par des difficultés du “vivre ensemble”, traversée par des phénomènes communautaires croissants [et] en proie à une importante crise identitaire, la société française semble plus perméable aux phénomènes d’intolérance et de racisme. » Tel est le sombre constat dressé, pour l’année 2012, par la Commission nationale consultative des droits de l’Homme (CNCDH) dans son traditionnel rapport sur la lutte contre le racisme, l’antisémitisme et la xénophobie, rendu public le 21 mars (1). « Avec toute la prudence qu’impose l’interprétation de chiffres dont la “vérité” n’est pas toujours simple à saisir », l’instance s’inquiète à la fois des résultats des enquêtes quantitative et qualitative qu’elle a conduites et des chiffres de la violence raciste, antisémite et antimusulmane communiqués par le ministère de l’Intérieur.
Pour la troisième année consécutive, le sondage réalisé à la fin de l’année dernière par l’institut CSA indique en effet une montée de l’intolérance en France. « Alors que le début des années 2000 avait été marqué par un mouvement continu de la société française vers plus de tolérance, on constate depuis 2010 que les indicateurs de racisme sont en hausse », écrit la CNCDH, s’alarmant de voir ainsi le phénomène s’ancrer dans la durée.
Plusieurs éléments du sondage inquiètent particulièrement l’instance consultative :
→ augmentation toujours plus marquée de la méfiance à l’égard des musulmans ;
→ rejet croissant des étrangers, « perçus de plus en plus comme des parasites, voire comme une menace » ;
→ constat d’échec de l’intégration et remise en cause de la possibilité d’un « vivre ensemble » dans la société française.
Des résultats d’enquête d’autant plus alarmants qu’ils s’inscrivent « dans un contexte plus général de perception globalement négative de la société française : préoccupations économiques, sociales et sécuritaires fortes, vision très segmentée de la société ».
Les données communiquées par la Place Beauvau noircissent encore le tableau, dans la mesure où elles marquent, une fois agrégées, une augmentation de 23 % des actes et menaces à caractère raciste, antisémite et antimusulman pour l’année 2012 (1 539 actes recensés au total). Dans le détail, c’est l’antisémitisme qui connaît la plus forte croissance (+ 58 %). Les actes antimusulmans progressent pour leur part de 30 %, confirmant la tendance à la hausse enregistrée en 2011 (+ 34 %).
(1) La lutte contre le racisme, l’antisémitisme et la xénophobie – Année 2012 – Disp. sur