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Vers l’abrogation du délit de « racolage passif » ?

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Dix ans après la loi du 18 mars 2003 pour la sécurité intérieure qui l’a réintroduit dans le code pénal, les initiatives se sont multipliées pour obtenir la suppression du délit de « racolage passif » et soutenir la proposition de loi qui va dans ce sens. Celle-ci, déposée par la sénatrice (EELV) Esther Benbassa, doit être examinée en première lecture au Sénat le 28 mars. Dans son dernier rapport (1), la commission nationale « Citoyens-Justice-Police », composée de membres de la Ligue des droits de l’Homme, du Syndicat des avocats de France et du Syndicat de la magistrature (2), fustige de nouveau les effets de cette pénalisation sur les droits et l’accès à la prévention des personnes prostituées. Réalisée à partir du printemps dernier à la suite d’une saisine de la mission « Lotus Bus » de Médecins du monde, son enquête porte sur les femmes chinoises qui se prostituent à Paris.

« Le délit de racolage, par l’imprécision de sa définition, conduit à des arrestations arbitraires », dont le nombre « manifestement excessif confine au harcèlement », témoigne la commission. Certaines femmes disent même avoir été arrêtées alors qu’elles n’étaient pas à ce moment-là en activité. Le rapport relève un détournement « concerté de la loi », qui aboutit à la pénalisation de la seule prostitution, notamment dans l’objectif de lutter conte la prostitution étrangère et l’immigration clandestine. Il constate une « violation systématique des droits de la personne » à tous les stades de la procédure – fouilles ne respectant pas les garanties procédurales, recours aux menottes injustifié, notification des droits tardive… –, constitutive de violences et symptomatique d’« un traitement discriminatoire ». Pour la commission, la réponse judiciaire qui s’ensuit est coûteuse, inutile et stigmatisante (plus d’une fois sur deux, un rappel à la loi ou un placement en centre de rétention administrative qui débouche sur une remise en liberté), tandis que l’objectif de la loi de lutter contre le proxénétisme n’est pas poursuivi. Le système met ces femmes, que la loi était censée protéger, « dans une grande situation de fragilité et de vulnérabilité, puisqu’elles sont poussées à se prostituer dans des lieux de plus en plus excentrés et n’osent pas faire appel à la police lorsqu’elles sont victimes de violences », conclut le rapport.

L’abrogation du délit de racolage passif était l’un des engagements de campagne de François Hollande. Celui-ci « sera tenu », a affirmé Najat Vallaud-Belkacem, ministre des Droits des femmes, dans un entretien publié le 16 mars par Le Parisien. Au-delà de la proposition de loi prochainement débattue, « nous travaillons avec un certain nombre de parlementaires, de gauche comme de droite, afin que soit élaborée d’ici à l’automne une proposition de loi globale sur la prostitution et la traite des êtres humains », a précisé la porte-parole du gouvernement, indiquant que la pénalisation du client est « une piste de réflexion parmi d’autres ».

Notes

(1) « Un harcèlement institutionnalisé, les prostituées chinoises et le délit de racolage public » – Disponible sur www.syndicat-magistrature.org.

(2) La commission a vocation à mener des enquêtes, uniquement sur saisine des citoyens, sur les rapports entre les citoyens et les forces de l’ordre ainsi que sur le contrôle et le traitement judiciaire de ces rapports. Médecins du monde a par ailleurs réalisé en 2012 une enquête sur les « travailleuses du sexe chinoises à Paris face aux violences » – Voir ASH n° 2788 du 21-12-12, p. 13.

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