En rendant un avis défavorable à l’assistance sexuelle pour les personnes en situation de handicap (1), le Comité consultatif national d’éthique (CCNE) a réactivé ce débat complexe. Alors que l’association CH (s) OSE, qui se bat pour « une vie affective et sexuelle » pour ces publics, dénonce une « vision réductrice et ghettoïsante » de l’assistance sexuelle, l’association Femmes pour le dire, Femmes pour agir (FDFA) exprime son soulagement.
La première déplore que le CCNE refuse d’envisager une exception à la loi réprimant le proxénétisme pour permettre la création de services d’assistance sexuelle afin de « répondre à un besoin d’apprentissage et de découverte de l’intimité » et de faciliter l’acte sexuel « entre deux personnes qui ne peuvent l’accomplir sans aide ». Elle regrette par ailleurs que son avis ne fasse pas référence à la santé sexuelle, « vecteur d’épanouissement personnel et de réduction des risques ». De plus, l’association dénonce une « forme d’hypocrisie » dans la seule solution proposée qui est de favoriser la rencontre. Cela laisse la porte ouverte à des initiatives individuelles, « qui ne garantissent nullement d’échapper aux abus ». L’association juge enfin l’avis du CCNE « stigmatisant », car il présente les personnes en situation de handicap comme « vulnérables » et « susceptibles d’un transfert affectif envers l’assistant sexuel ». L’association, qui a lancé une pétition sur l’assistance sexuelle (2), est d’ailleurs bien décidée à continuer de se battre pour la création de services dans ce domaine.
A l’inverse, l’association FDFA juge que l’assistance sexuelle est « une mauvaise réponse à un vrai problème ». Pour elle, poser le principe d’une sexualité spécifique des personnes handicapées est « une erreur » et conduit une fois de plus à la « ghettoïsation » du handicap. Surtout, le recours à des aidants sexuels formés et rémunérés pose la question de la prostitution et de la marchandisation du corps. Car « la demande est essentiellement masculine », s’inscrivant dans une conception de la sexualité où « les corps des femmes sont mis à disposition ». L’association réfute, en tout cas, l’idée que la sexualité soit « un droit humain fondamental ». Celle-ci relève du droit à la vie intime et ne peut être soumise à un contrat, défend-elle. Dans le prolongement de l’avis du CCNE, elle estime que la réponse n’est pas dans la création d’une « prestation » supplémentaire mais dans « l’ouverture de l’environnement en termes de réelle accessibilité, par exemple dans les lieux de loisirs, pour permettre la multiplication des opportunités de rencontres ».
Enfin, elle souhaite une réflexion permettant une « recherche intelligente et ouverte » sur l’accès des personnes lourdement handicapées à une sexualité épanouie. Elle réclame également l’accès à des chambres de couples et à une certaine liberté dans les institutions pour personnes handicapées. Refusant que le personnel soit formé aux gestes sexuels, elle préfère qu’il le soit à appréhender la personne handicapée dans son « humanité », sa dignité.
(2) Pétition disponible sur