« Alors que 81 % des Français souhaiteraient “passer leurs derniers instants chez eux”, seuls 25,5 % des décès surviennent à domicile », relève l’Observatoire national de la fin de vie (ONFV) dans un rapport rendu public le 18 mars (1), tout en soulignant que vouloir finir sa vie chez soi ne signifie pas vouloir mourir à domicile. Le premier constat de l’Observatoire est le manque de données fiables et précises pour décrire les situations de fin de vie à domicile (peu d’enquêtes, peu de données administratives, « et surtout aucun système d’information national »). Aussi le rapport s’appuie-t-il, notamment, sur de nombreux témoignages de proches et de professionnels. Ses propositions visent à « ouvrir des pistes concrètes pour améliorer les conditions de la fin de vie à domicile ». Etant précisé que l’observatoire entend poursuivre la réflexion en consacrant ses prochains travaux à la fin de vie des personnes âgées en 2013, puis aux personnes en situation de grande précarité en 2014. Pour mémoire, son premier rapport, rendu public en 2012, pointait l’insuffisance de l’offre de soins palliatifs (2).
Pour l’observatoire, le développement du maintien à domicile des personnes en fin de vie nécessite une « véritable politique en direction des aidants ». Aujourd’hui, souligne-t-il, la difficulté ne réside pas dans l’absence de dispositifs d’aide aux aidants mais dans le fait qu’ils sont « mal connus, difficiles d’accès et peu adaptés ». Créée par une loi du 2 mars 2010, l’allocation journalière d’accompagnement d’une personne en fin de vie (AJAP) permettant d’indemniser le congé de solidarité familiale n’a été rendue effective pour les salariés qu’en 2011 et pour les fonctionnaires qu’à partir de 2013 (3), déplore l’observatoire. En outre, deux ans après sa création, « moins de 1 000 personnes y ont eu recours ». C’est pourquoi le rapport préconise plus particulièrement de simplifier l’accès à l’AJAP et de lancer une « vaste » campagne de communication. Il appelle également à diminuer le reste à charge des aidants (prise en charge du matériel paramédical, médicaments non remboursés…), à réduire le délai d’accès aux aides existantes et à mettre en place une « véritable » plateforme d’informations.
Autre impératif souligné par l’observatoire: il faut favoriser les solutions de répit pour permettre aux aidants de « souffler » et de « prendre du recul ». A ce titre, il recommande de « développer les solidarités de proximité et le bénévolat pour permettre aux aidants de s’absenter quelques heures » et de créer des lieux de répit pour accueillir les malades « quelques jours ou quelques semaines ». Pour lui, il est également nécessaire de mettre en place des formations pour « apprendre aux professionnels à repérer les signes d’épuisement chez les proches ». Les personnels de l’aide à domicile doivent quant à eux être mieux formés et avoir des conditions de travail « plus attractives », plaide encore le rapport.
Alors que le programme national « soins palliatifs » 2008-2012 est arrivé à son terme, l’observatoire appelle à mettre en place une politique nationale de développement des soins palliatifs à domicile et propose plusieurs mesures en ce sens. En premier lieu, il faut repenser la place du médecin généraliste et, plus particulièrement, lui donner les moyens, en termes de rémunération, d’assurer la coordination des soins à domicile des personnes en fin de vie, indique le rapport. La Haute Autorité de santé pourrait être chargée de réfléchir à un « outil simple qui permettrait aux médecins généralistes de repérer les situations “palliatives”, d’identifier les ressources locales et d’anticiper les complications éventuelles », suggère-t-il encore. D’une façon globale, l’observatoire juge que la mission de coordination doit être professionnalisée et indemnisée, ce, quel que soit le professionnel qui l’exerce (médecin, infirmière…) en fonction des réalités locales. Il appelle à rémunérer « plus justement » l’activité des infirmières libérales pour leur donner les moyens de « rester auprès des patients en fin de vie tout au long de leur prise en charge » et à « adapter les moyens dont disposent aujourd’hui les SSIAD [services de soins infirmiers à domicile] pour accompagner les malades en fin de vie à domicile ».
Enfin, souligne le rapport, « l’hospitalisation en fin de vie [est] une réalité qui correspond parfois à un réel besoin ». De plus, les établissements de santé sont des « lieux d’expertise et de recours » qui comportent des unités de soins palliatifs (USP) et des lits identifiés de soins palliatifs (LISP), rappelle-t-il (4). Pour l’observatoire, il importe donc d’adapter l’hôpital aux enjeux du domicile. Il suggère, par exemple, de faciliter les hospitalisations de « repli », c’est-à-dire lorsque le maintien à domicile n’est plus possible et sans passer par les services d’urgence. Il recommande également de développer l’accueil temporaire (accueil de jour/accueil de nuit) des patients en fin de vie à l’hôpital (5). A ce titre, il préconise de mettre en place dix à 20 expérimentations sur une période de trois ans, rattachées à des USP ou à des équipes mobiles de soins palliatifs existantes.
(1) « Vivre la fin de sa vie chez soi » – Mars 2013 – Disp. sur
(4) Plus précisément, il existe aujourd’hui 118 USP représentant 1 300 places au total réparties dans toutes les régions ainsi qu’environ 5 000 LISP répartis dans plus de 800 hôpitaux et cliniques, indique le rapport.
(5) A l’heure actuelle, seules quatre structures proposent une hospitalisation de jour en soins palliatifs sur l’ensemble du territoire national, déplore l’observatoire.