Publics à l’étude

D es services publics aussi différents que La Poste, la caisse nationale des allocations familiales (CNAF), EDF ou la SNCF s’intéressent aussi à leurs plus fragiles usagers en finançant à leur sujet des recherches très variées. Plusieurs d’entre elles sont proposées ici par Catherine Vérité, conseillère technique à la CNAF, et Jean-Pierre Texier, chargé de mission à la RATP. S’interrogeant sur ce qu’est un « bon pauvre », Séverine Mayol questionne surtout les modèles d’insertion que les professionnels ont dans la tête. Ces modèles se révèlent fortement différenciés selon le sexe des SDF accompagnés, explique la sociologue. Lorsqu’il s’agit de femmes, le conservatisme des travailleuses sociales relativement aux normes et valeurs féminines « naturelles » conduit à rejeter du processus de prise en charge les exclues qui refusent d’adhérer, ou de faire semblant d’adhérer, à cette vision stéréotypée. Chercheur en aménagement urbain, Thibault Jarnigond analyse de son côté le rôle du téléphone portable comme outil d’intégration. Faisant office de véritable logis virtuel, le mobile permet non seulement aux personnes qui n’ont pas de domicile stable d’être joignables malgré tout – et comme n’importe qui –, mais aussi de ne pas pouvoir être localisées, par exemple dans une structure sociale. Les zonards ne se soucient pas, eux, de ressembler à tout un chacun. Mais leur marginalité n’est pas synonyme d’anomie. De son voyage d’ethnologue impliquée parmi les jeunes errants, Tristana Pimor rapporte une description fine du fonctionnement d’un squat, qui ressemble plus à un patriarcat très hiérarchisé qu’à une utopie libertaire.