L’échéance de 2015 pour la mise en accessibilité des établissements recevant du public (ERP) existants ne sera pas respectée. C’est ce que confirme la sénatrice (PS) de l’Essonne, Claire-Lise Campion, dans un rapport remis au Premier ministre le 1er mars (1). C’était déjà le constat posé en 2011 par la mission chargée d’évaluer l’application des règles d’accessibilité fixées par la loi « handicap » de 2005 (2). Comme elle, le rapport « Campion » préconise de maintenir l’échéance « pour montrer la détermination des pouvoirs publics ». Il souligne aussi que « 2015 n’est pas un point final » et recommande d’atteindre les objectifs « par d’autres moyens ». Accueillies de façon prudente par le secteur associatif (voir ce numéro, pages 14 et 28), les 40 propositions de la sénatrice vont servir à préparer « un plan d’actions gouvernemental qui sera validé lors du prochain comité interministériel du handicap, à la fin du premier semestre », ont indiqué les services de Jean-Marc Ayrault dans un communiqué.
Maintenir l’échéance tout en la repoussant. Tel est le tour de passe-passe du rapport « Campion » qui propose d’« enjamber 2015 » avec la création d’agendas d’accessibilité programmée (Ad’AP). Etabli après une concertation et un diagnostic global, l’Ad’AP consisterait en un document de programmation financière des travaux d’accessibilité élaboré par les gestionnaires ou propriétaires d’ERP existants pour une période de trois ou quatre ans, reconductible pour deux ou trois ans, explique la sénatrice. Ce document pourrait également contenir une justification détaillée des demandes de dérogation. Après un passage en commission consultative départementale de sécurité et d’accessibilité (CCDSA), l’Ad’AP devrait être adopté par une délibération de la collectivité locale concernée avant le 31 ? décembre 2014 sous peine de sanctions financières (réduction de la dotation globale de financement…), préconise le rapport.
La réussite des Ad’AP est conditionnée à une « impulsion politique forte », souligne Claire-Lise Campion. A ce titre, elle propose l’organisation d’une table ronde nationale des acteurs de l’accessibilité et d’états régionaux de l’accessibilité, l’attribution du label « grande cause nationale 2014 » et le lancement d’un plan de formation des acteurs. Elle recommande aussi d’améliorer le fonctionnement des CCDSA et, plus particulièrement, d’homogénéiser leurs pratiques en matière de dérogations. Pour cela, estime la sénatrice, les commissions devraient être incitées à s’appuyer davantage sur la doctrine d’interprétation élaborée par la délégation ministérielle à l’accessibilité du ministère du Développement durable. Autre recommandation : améliorer la prise en charge des déplacements des représentants des associations de personnes handicapées siégeant dans les commissions consultatives départementales de sécurité et d’accessibilité.
Tout en se défendant d’une « dégradation des normes d’accessibilité », Claire-Lise Campion prône un ajustement de la réglementation dans une démarche concertée privilégiant la qualité d’usage. Autrement dit, il s’agit d’alléger « certains textes » lorsque les règles sont peu opérationnelles ou excessivement coûteuses. Ainsi, par exemple, la sénatrice plaide pour une accessibilité raisonnée dans les établissements scolaires en soulignant qu’il n’est pas nécesssaire d’installer un ascenseur pour tous les bâtiments d’un collège de deux niveaux si les classes du rez-de-chaussée offrent l’intégralité des services de l’établissement et sont accessibles. De même, l’accessibilité de l’ensemble des points d’arrêt n’est pas une condition impérative pour les transports scolaires, estime-t-elle. D’autres propositions d’allégement des normes concernent les logements ou encore l’hôtellerie-restauration.
(1) « Réussir 2015 – Accessibilité des personnes handicapées au logement, aux établissements recevant du public, aux transports, à la voirie et aux espaces publics » – Mars 2013 – Disp. sur