Relations thérapeutiques

« J’avais tellement redouté que Dieu ou mes parents n’empêchent ce moment de se produire », confie Mark O’Brien, quadragénaire américain lourdement handicapé, après sa première expérience sexuelle. Le film The Sessions raconte l’histoire vraie de cet homme et la façon dont il a « entrepris » de perdre sa virginité… Depuis l’âge de 6 ans – quand il a contracté une poliomyélite qui a infecté son système nerveux central –, Mark vit vingt heures par jour allongé dans un « poumon d’acier », une machine qui lui permet de respirer. Le reste du temps, sa vie est rythmée par les visites des auxiliaires de vie qui se relaient auprès de lui. Ce qui ne l’empêche pas de poursuivre ses études à l’université, puis de devenir journaliste et poète. Une seule chose lui manque : le plaisir charnel. Ses lectures, ses entretiens avec des personnes handicapées vivant une sexualité épanouie, ses fantasmes, le poussent à se tourner vers une assistante sexuelle, métier qui s’est développé aux Etats-Unis dès les années 1980. « Alors qu’une prostituée tente de fidéliser son client, l’assistante sexuelle, une fois qu’elle a avivé le plaisir sensuel, érotique ou sexuel de son client, coupe toute relation avec lui », explique Cheryl Cohen-Greene, la « thérapeute » choisie par Mark O’Brien. Le film de Ben Lewin, qui a lui-même contracté la polio lorsqu’il était enfant, montre – sans éviter les images crues – les quatre séances entre Cheryl et Mark. Si le poète va à leur premier rendez-vous comme s’il se rendait à une exécution, il s’attache vite à sa thérapeute. Celle-ci devra jongler avec les sentiments qu’elle éveille chez son patient et imposer une distance… En 1990, Mark O’Brien publie un article qui fait grand éclat : « On seeing a sex surrogate » (« Mes séances avec une assistante sexuelle »). C’est cette publication qui a inspiré le réalisateur pour écrire ce film biographique. Il a d’abord cherché un acteur handicapé pour interpréter Mark O’Brien, avant de se tourner vers John Hawkes, comédien valide, dont la prestation dans la peau d’un homme totalement paralysé est bluffante. En France, alors que la sexualité des personnes handicapées est encore taboue, le film devrait relancer les débats sur l’assistance sexuelle. Il a été primé dans de nombreux festivals (Sundance, San Sebastian) et nominé aux Oscars.