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Prévention de la récidive : virage culturel à confirmer ?

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Certes, il faudra attendre le texte législatif annoncé pour juin pour connaître les intentions de la chancellerie. Mais les préconisations du jury de la conférence de consensus sur la prévention de la récidive des 14 et 15 février (voir ce numéro, page 5), formulées au terme d’une démarche d’expertise et de consultation inédite dans ce secteur, remportent l’adhésion des acteurs du monde judiciaire. Elles rejoignent la volonté largement partagée de mettre la réinsertion au cœur de la peine et de limiter l’incarcération, en mettant l’accent sur l’individualisation de la prise en charge et l’accès au droit commun. « Un changement de paradigme », se félicite le Syndicat de la magistrature, qui regrette néanmoins que le jury ne soit pas allé jusqu’à reprendre l’idée de dépénaliser certains délits et d’instaurer un numerus clausus carcéral.

Le bât blesse pourtant sur l’incontournable question des moyens. Alors que les nouvelles orientations proposées reposent largement sur les missions des services pénitentiaires d’insertion et de probation (SPIP), les syndicats auraient aimé que le jury soit plus audacieux sur les modalités de leur capacité d’intervention. Sans plus de précision, celui-ci recommande « un renforcement conséquent des moyens dédiés aux services, dont les effectifs devront se rapprocher des normes européennes en la matière ». Or, selon la synthèse bibliographique produite par le comité d’organisation de la conférence de consensus, les standards européens fixent le ratio à 60 personnes par agent, contre jusqu’à 250 actuellement pour certains services. Les syndicats réclament donc une réduction drastique du nombre de dossiers suivis par agent. Et, au-delà, d’un recrutement massif de conseillers d’insertion et de probation, l’embauche de surveillants, de formateurs ou encore de psychologues supplémentaires afin que les services puissent travailler de manière pluridisciplinaire. « La loi pénitentiaire avait consacré un certain nombre de principes, repris par le jury, qui n’ont pas été mis en application faute de moyens et de volontarisme de l’administration », relève la CGT pénitentiaire. Le gouvernement doit désormais « faire preuve d’une forte volonté politique et déployer des moyens humains et budgétaires à la hauteur des enjeux », prévient la FNARS (Fédération nationale des associations d’accueil et de réinsertion sociale), qui a, avec l’administration pénitentiaire, organisé la participation des personnes en cours de peine à la conférence de consensus. Le Syndicat national de l’ensemble des personnels de l’administration pénitentiaire (Snepap)-FSU s’étonne, pour sa part, de la « timidité du jury » sur la reconnaissance et la valorisation du SPIP en tant que « maître d’œuvre en matière de construction du parcours de peine ».

Innovation majeure, la création d’une nouvelle peine de probation, de nature à favoriser un accompagnement social individualisé et à remplacer les courtes peines de prison, suscite beaucoup d’attentes. D’autant que la garde des Sceaux a déjà annoncé vouloir la mettre en œuvre. « Le rapport reste néanmoins relativement pauvre » sur son contenu, regrette l’Observatoire international des prisons. Si plusieurs pistes sont évoquées sur les modes de réparation ou sur les facteurs d’insertion, « tout un pan de la recherche est occulté s’agissant de méthodes de prise en charge évaluées comme les plus pertinentes à l’étranger ». L’organisation y voit le risque de se cantonner dans « un nouvel habillage de l’existant ». Elle juge, par ailleurs, trop timorées les préconisations visant à « aller dans le sens d’une citoyenneté renforcée » du détenu. Le jury demande notamment d’adapter, « dans toute la mesure du possible », le droit du travail au milieu carcéral.

Entre autres avancées, le rapport émet des propositions pour éviter les ruptures de prise en charge des jeunes majeurs par la protection judiciaire de la jeunesse. Cette volonté rejoint celle de la garde des Sceaux, qui a indiqué, le 12 février dernier, « se reposer la question de la prise en charge des mesures en assistance éducative et dans le cadre du décret de 1975 sur les jeunes majeurs ». Le Syndicat national des personnels de l’éducatif et du social (SNPES)-PJJ se réjouit de cette perspective : « Nous avions demandé à la fois la restauration de la protection des jeunes majeurs au civil par la PJJ et la possibilité de poursuivre au-delà de l’âge de 18 ans les mesures pénales, alors qu’aujourd’hui, la prise en charge est interrompue à la majorité ou transférée vers les SPIP », explique Maria Inès, co-secrétaire nationale du syndicat. Une ambition qui, là encore, ne pourra être concrétisée à moyens constants.

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