Depuis le baromètre de 2009, les « notes » que l’APF accorde aux villes ont lentement progressé. Aujourd’hui, la moyenne nationale est de 13/20, ce qui témoigne d’une dynamique lancée dans la majorité des municipalités. Grenoble prend la tête du classement, suivie par Nantes et Belfort. Les centres commerciaux, les bureaux de poste, les cinémas et les piscines sont globalement devenus plus faciles d’accès. L’accessibilité est enfin prise en compte, mais cela arrive bien tard… A moins de deux ans de l’échéance du 1er janvier 2015 fixée par la loi « handicap » du 11 février 2005, on est encore loin du 20/20 ! (2).
Il y a d’abord des villes dont la situation est préoccupante : Chaumont, Moulins, Evreux ou encore Digne-les-Bains n’atteignent toujours pas la moyenne après quatre éditions du baromètre. Marseille l’a enfin atteint mais elle manque encore de volonté pour le « vivre ensemble », tandis que Paris, qui stagne depuis l’an dernier, a du mal à adapter son architecture. Par ailleurs, sur tout le territoire, les personnes en situation de handicap ne peuvent toujours pas se rendre en toute autonomie chez un boucher, un boulanger, un coiffeur : les commerces de proximité restent très peu accessibles alors qu’ils font partie de la vie quotidienne. Même chose pour les cabinets médicaux et paramédicaux : aujourd’hui, un individu en fauteuil n’a pas le libre choix de son médecin traitant ou de son dentiste. Nous tirons également la sonnette d’alarme pour les transports en commun : seules 33 % des lignes de bus sont accessibles ! Quant à la moyenne nationale de 52 % d’écoles primaires accessibles selon notre baromètre, elle témoigne d’une dynamique au point mort. Il est en outre regrettable que le pays se prive de près de 12 millions de touristes qui ne viennent pas en raison du manque d’accessibilité dans l’hôtellerie, la voirie… là où le Royaume-Uni ou les Etats-Unis ont su s’adapter. Enfin, 34 % des municipalités n’ont pas présenté le rapport annuel de leur politique d’accessibilité devant leur conseil municipal, tel que le requiert pourtant la législation. Et les commissions communales pour l’accessibilité, qui devraient fonctionner depuis sept ans déjà, se réunissent encore de façon irrégulière.
La première cause est le manque de volonté des pouvoirs publics, quelle que soit la couleur politique. Or, sans réelle politique publique, pas de communication fiable et sans communication ni accompagnement des acteurs, pas de concrétisation. Tout le monde doit se mettre à l’accessibilité, des maires aux responsables de la voirie ! L’autre cause du retard tient au défaut d’« encadrement » : par exemple, dans des établissements existants recevant du public, vouloir absolument installer des ascenseurs hors de prix là où il serait plus judicieux de déplacer un service d’un étage inaccessible au rez-de-chaussée témoigne d’une vision ultratechnicienne et d’un manque de bon sens !
L’APF a été auditionnée par la sénatrice. Nous lui avons fait part de notre lassitude devant le retard pris depuis la loi du 30 juin 1975 en faveur des personnes handicapées et les multiples dérogations octroyées. Nous attendons de ce rapport la création d’une agence nationale de l’accessibilité universelle, qui veillerait à l’application homogène et coordonnée des dispositifs. Il serait intéressant de mettre en place un financement « bonus/malus » des projets de construction en fonction de l’accessibilité : les « sanctions », comme elles existent pour le non-respect des places de stationnement réservées, semblent être le seul moyen efficace pour parvenir à un respect de la loi.
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(2) La mission chargée d’évaluer l’application des règles d’accessibilité du cadre bâti pour les personnes handicapées a estimé qu’en octobre 2011 seuls 15 % des travaux en faveur de l’accessibilité avaient été réalisés et que l’échéance du 1er janvier 2015 ne pourrait « en aucun cas être tenue » – Voir ASH n° 2775 du 21-09-12, p. 10.