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Le service civique écartelé entre engagement citoyen et emploi

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Comment, dans le contexte économique actuel, développer le service civique sans le transformer en sous-emploi pour les jeunes ? Telle est l’équation que doit gérer le gouvernement alors même que le dispositif est profondément ambigu : s’il vise à favoriser l’engagement désintéressé des jeunes en faveur de la collectivité, il est aussi un moyen pour eux d’acquérir des aptitudes et de faciliter leur insertion professionnelle.

Mis en place par Nicolas Sarkozy dans le cadre de la loi du 10 mars 2010, le service civique a échappé à l’alternance. Mieux, lors de la campagne présidentielle, François Hollande s’est engagé à créer 100 000 services civiques, promesse qu’il a réaffirmée une fois élu. Ce dis positif qui a pour « objet de renforcer la cohésion sociale et la mixité sociale » et qui offre « l’opportunité de servir les valeurs de la République » (1) semble répondre à une attente forte. En témoigne les 170 000 jeunes inscrits sur le site du service civique (2), qui reçoivent régulièrement la liste des missions proposées près de chez eux. « Quand on dit que nous vivons dans une société égoïste, que les jeunes sont nonchalants, ce n’est pas vrai. Notre association compte 2 000 volontaires et, pour un poste, nous avons de trois à cinq jeunes qui viennent à l’entretien de recrutement », souligne Sylvain Waserman, président d’Unis-Cité, seule structure entièrement dédiée à l’accueil des volontaires, qui a inspiré le dispositif actuel.

UN DISPOSITIF LISIBLE

« Nous avons beaucoup de demandes, on ne peut répondre à toutes », confirme Christophe Louis, directeur des Enfants du Canal, une association qui accueille une dizaine de jeunes volontaires chargés d’épauler les travailleurs sociaux dans diverses actions (notamment les maraudes) en direction des personnes sans abri. Comme eux, 20 000 volontaires, âgés de 16 à 25 ans, se sont engagés en 2012, pendant une période continue de six mois à un an et pendant au moins 24 heures par semaine, « en faveur de missions d’intérêt général reconnues prioritaires pour la Nation » (3) – principalement dans le secteur de la solidarité (près de 30 % des missions, essentiellement dans des associations du secteur social) mais aussi dans l’éducation, la culture, les loisirs, le sport, la santé, la citoyenneté, le développement interna tional, l’action humanitaire ou l’intervention d’urgence.

Le service civique doit une partie de son succès à sa lisibilité : il a unifié sous un statut homogène les dispositifs de volontariat qui s’étaient constitués de façon morcelée, notamment depuis la suspension du service militaire (voir encadré, page 26) (4). Surtout, il rend l’engagement volontaire plus attractif que les formules précédentes. En premier lieu pour les jeunes. Ouvert à tous, quel que soit le niveau d’études, il permet aux volontaires de bénéficier d’une indemnité mensuelle (non imposable et non prise en compte dans le calcul des prestations sociales) prise en charge par l’Etat (465,83 € nets par mois, majorés sur critères sociaux) et d’un complément d’un peu plus de 100 € en nature (titre-repas par exemple) ou en argent pris en charge par la structure d’accueil. A cela s’ajoute un régime complet de protection sociale (maladie, retraite, etc.), également financé par l’Etat (et désormais prolongé pendant un an à l’issue du service).

En outre, les structures d’accueil – des organismes privés sans but lucratif (association, fondation, organisation non gouvernementale, fédération, mutuelle, syndicat) ou publics (collectivité locale, établissement public ou administration de l’Etat) agréés auprès de l’Agence du service civique qui chapeaute le dispo sitif – sont tenues de dispenser une formation civique et citoyenne (qui inclut un volet « formation aux premiers secours » et un volet « éducation à la citoyenneté »), de désigner un tuteur et d’accompagner le jeune vers son « projet d’avenir ». « On a bataillé pour y parvenir, mais c’est la première fois qu’on a un véritable statut du volontaire », se réjouit Sylvain Waserman. A l’issue de cette expérience, censée permettre l’ouverture sur un environnement nouveau, la découverte de l’engagement solidaire, le développement de l’autonomie mais aussi de faire le point sur ses intentions futures…, plus de neuf volontaires sur dix ont d’elle une opinion favorable.

Le service est aussi attractif pour les structures d’accueil. L’indemnité mensuelle du volontaire est versée directement par l’Etat. Les collectivités locales s’engagent toutefois avec prudence, exceptées quelques-unes qui en font souvent un instrument de leur politique « jeunesse » – à l’instar de la Ville de Paris qui compte 300 volontaires investis dans des missions de lien social et de médiation. Le secteur associatif, en revanche, est bien présent : plus de 3 000 associations accueillent les trois quarts des volontaires. Il faut dire qu’elles bénéficient d’un coup de pouce sous la forme d’une aide de l’Etat (d’environ 100 €) destinée à couvrir une partie des coûts liés à l’accueil et à l’accompagnement du volontaire. « Financièrement, c’est presque une opération blanche », note Christophe Louis. « Si, économiquement, le coût du service civique est très faible, il est à relativiser étant donné le temps d’accompagnement nécessaire », modère toutefois Romuald Corlou, responsable des ressources hu maines de l’ANDES (Association nationale de développement des épiceries solidaires), qui accueille, depuis septembre dernier, 20 volontaires (30 prévus en 2013) dans une dizaine de régions.

Le service civique est, pour les structures d’accueil, « un moyen de développer certaines activités ou d’en tester de nouvelles », avance la sociologue Valérie Becquet (5). « Les jeunes apportent un regard neuf, un enthousiasme », complète Caroline Soubie, responsable du pôle « jeunesse et volontariat » à la Croix-Rouge française. Investie dans le volontariat depuis 2006 (d’abord dans le cadre du service civil volontaire), l’association, qui accueille déjà 300 volontaires (pour des missions de secourisme, d’éducation à la santé et aux valeurs humanitaires, d’accompagnement des personnes vulnérables à la vie sociale et culturelle ou dans le cadre de l’aide alimentaire et du Samu social), a pour ambition d’en recruter 500, voire 1 000 à terme.

« C’est du donnant-donnant », poursuit Romuald Corlou. En échange de l’aide qu’ils apportent aux animateurs régionaux pour développer les épiceries sociales et créer du lien entre elles (via des actions d’animations et la mutualisation des moyens matériels et logistiques), les volontaires non seulement bénéficient d’un accompagnement mais ils « vivent l’expérience très concrète de l’aide alimentaire, ce qui permet de développer leur conscience citoyenne ».

SIMPLE ETAPE ?

Le service civique serait ainsi porteur d’une plus-value pour la société toute entière. Tant en matière d’éducation à la citoyenneté – « il déclenche une envie importante d’être acteur de la vie de la cité, de faire évoluer les choses, même chez des jeunes a priori éloignés de l’engagement et du monde associatif », note Caroline Soubie – que par les effets directs de l’action des jeunes. « Un jeune en service civique estime qu’il a un impact positif sur dix personnes. Si on multiplie par le nombre de volontaires, le dispositif peut être une partie de la solution à beaucoup de problématiques sociétales », veut croire Sylvain Waserman, qui souhaiterait que le dispositif soit davantage utilisé comme un « laboratoire social » pour tester les bonnes idées sur le terrain.

Reste une ambiguïté : censé, d’après la loi, être un engagement désintéressé en faveur de la collectivité dans une logique altruiste (agir concrètement et être utile), le service civique est aussi un moyen pour les jeunes d’acquérir des aptitudes qui faciliteront leur insertion professionnelle. « Ce double discours, d’engagement pour autrui et pour soi en vue d’obtenir des compétences valorisables sur le marché du travail, est présent dès l’origine de façon équivoque », rappelle Valérie Becquet. Cet objectif duel contribue à brouiller la nature du dispositif. D’autant qu’en créant l’Institut du service civique en 2012 (voir encadré ci-dessous), l’Agence du service civique a clairement souhaité appuyer cette voie professionnelle.

Il n’est cependant pas nécessaire de passer par cette structure pour envisager le service civique comme une étape vers la vie professionnelle. Dans tous les cas, le volontaire reçoit, à l’issue de sa mission, une attestation de service civique et un document qui décrit les activités exercées ainsi que les aptitudes acquises. Il peut aussi entreprendre une démarche de validation des acquis de l’expérience en faisant valoir les compétences engrangées. La loi a, en outre, prévu la valorisation du dispositif dans les cursus des établissements d’enseignement supérieur. Les Enfants du Canal accueillent nombre de candidats qui envisagent de poursuivre une formation d’éducateur spécialisé. « Non seulement ils acquièrent une expérience de ce qui pourra les attendre par la suite mais, grâce au tutorat, nous pouvons les accompagner pour préparer leur examen d’entrée », explique Christophe Louis. D’ores et déjà, l’une des jeunes, après avoir repris un diplôme universitaire de travail social, est devenue salariée de l’association. Une autre a été recrutée comme agent d’accueil. Christophe Louis envisage également la possibilité, pour certains, de passer du service civique à un emploi d’avenir. La Croix-Rouge réfléchit aussi à la façon d’accompagner les volontaires dans la préparation des concours pour accéder aux formations sanitaires et sociales, principaux cursus profes sionnels visés par ses jeunes. Mais, pour Caroline Soubie, il ne faudrait pas que « le service civique devienne un passage obligé pour accéder à ce type de carrière ».

C’est là où le bât blesse : la recherche d’employabilité, si elle devenait l’objectif prioritaire du service civique, risquerait de gommer son principal apport : son rôle d’éducation civique à travers une expérience à forte plus-value sociale et enrichissante sur le plan personnel. Elle risquerait en outre de dénaturer le dispositif en le transformant en pseudo-mesure en faveur de l’emploi, alors qu’il n’a pas été pensé comme telle.

Le danger est d’autant plus grand que certaines structures d’accueil, dans un contexte de crise économique et de baisse des subventions publiques, ont d’ores et déjà la tentation d’utiliser le service civique à la place d’embauches traditionnelles. Au risque d’en faire un réservoir d’emplois au rabais maintenant les jeunes dans la précarité. D’aucuns pointent, en effet, le fait que certaines des missions proposées pourraient être réalisées par un salarié ou un agent public. Or le jeune est recruté pour une indemnité ridicule dans le cadre d’un contrat qui ne relève pas du code du travail – autrement dit, un emploi sous-payé, au temps de travail à géométrie variable (de 24 à 48 heures par semaine si le nombre d’heures moyen ne dépasse pas 35 heures par semaine sur l’ensemble de la mission), ne donnant pas droit aux indemnités chômage et sans possibilité de recourir aux prud’hommes en cas de litige !

DES GARDE-FOUS

Si la substitution du service civique à l’emploi est une question déjà ancienne – elle se posait déjà pour les objecteurs de conscience –, elle ne la rend pas moins incontournable : la frontière entre service civique et emploi est bel et bien poreuse. D’ailleurs, la loi a posé des garde-fous : un contrat de service civique ne peut être souscrit lorsque les missions confiées au volontaire ont été exercées par un salarié moins de un an avant sa signature. Les volontaires sont aussi censés intervenir « en complément » de l’action des salariés (et des bénévoles) sans s’y substituer. Dans son « Référentiel des missions de service civique » à destination des structures d’accueil (6), l’Agence du service civique stipule que « le volontaire ne peut être indispensable au fonctionnement courant de l’organisme ». Plus précisément dans le domaine de la solidarité, il « n’a pas vocation à se substituer à un travailleur social ou à un professionnel de l’aide à domicile. Il ne peut pas prendre de décision qui risquerait d’entraîner des conséquences lourdes en cas d’erreur d’appréciation et il ne doit jamais être seul dans des situations qui pourraient être dangereuses pour lui ou pour le public accompagné. »

En pratique, la subtilité est de mise. « Pour effectuer une carte d’identité, c’est le travailleur social qui rédige le courrier de demande de l’acte de naissance mais, à sa réception, c’est le volontaire qui accompagne la personne pour faire les photos, puis déposer le dossier à la pré fecture », explique le directeur des Enfants du Canal. Et les contrôles de l’Agence du service civique et des services déconcentrés de l’Etat sont jugés encore trop mo destes (7), ce qui favorise les situations limites. Que penser en effet des conseillères en économie sociale et familiale recrutées comme volontaires à l’issue de leur formation dans l’attente de trouver un emploi ? Ou des centres d’hébergement et de réinsertion sociale qui utilisent des volontaires comme agents d’accueil ?

Le développement des emplois d’avenir, en permettant aux associations d’embaucher des jeunes en contrat aidé pourrait atténuer certaines dérives. Il n’empêche : même lorsque les missions effectuées par les volontaires relèvent bien du service civique, les obligations en matière d’accompagnement et de formation sont encore très diversement respectées. En ce qui concerne la formation civique et citoyenne, « sa mise en œuvre n’est pas toujours simple, convient Christophe Louis. Etant donné la diversité des profils des volontaires, elle ne peut pas prendre la forme d’une intervention magistrale. Du coup, notre apport s’effectue souvent de façon informelle. »

Même flou pour le suivi du volontaire dans l’élaboration de son projet d’avenir. Face à la lourdeur de la gestion du dispositif (organisation des formations des volontaires et des tuteurs, difficultés du recrutement, plus complexe que prévu…), l’ANDES a certes pu engager une ancienne volontaire en contrat de professionnalisation pour assurer la coordination nationale du dispositif et épauler les tuteurs, lesquels ont également l’opportunité de s’appuyer sur les accompagnateurs socioprofessionnels des chantiers d’insertion de l’association. Mais ce type d’encadrement est loin d’être généralisé… Les grandes associations ont mis en place des modalités d’accueil relativement bien définies : à la Croix-Rouge, les tuteurs sont formés en interne et la formation civique et citoyenne suit un schéma strict (deux jours et demi pour expérimenter le vivre ensemble) et une demi-journée est prévue sur le projet du jeune en partenariat avec une association spécialisée (technique d’entretien, rédaction du CV…). Mais les structures d’accueil plus petites bricolent. Les outils mis en place en 2012 par l’Agence du service civique (Guide du volontaire et Guide du tuteur notamment) devraient leur faciliter la tâche à l’avenir. Pourtant, leurs effets risquent de rester limités étant donné qu’aucun financement supplémentaire n’a été débloqué pour les déployer…

Quant au respect de la mixité des publics accueillis, qui figure parmi les objectifs prioritaires du service civique, là encore, la situation est contrastée. Au sein d’Unis-Cité, qui mène une politique en la matière, un tiers des volontaires vient des zones défavorisées. Comment l’association parvient-elle à ce résultat ? « Pas en mettant des annonces, mais en étant visible sur le terrain, par nos actions dans les quartiers et par le biais des missions locales par lesquelles arrive un quart des volontaires », explique Sylvain Waserman. Les volontaires sont, en outre, organisés en équipe (de huit en général) pour favori ser le brassage social et culturel : « Quand un jeune sans diplôme côtoie pendant plusieurs mois un jeune à bac + 5 et qu’il propose des idées reprises par tous, c’est extrêmement valorisant pour lui », poursuit le président d’Unis-Cité.

SOUS-REPRÉSENTATION DES NON-DIPLÔMÉS

Or, bien que les missions proposées soient censées ne pas exiger de qualifi cations particulières pour éviter d’exclure les jeunes sans diplôme, le dispositif est encore marqué par une sous-représentation des niveaux inférieurs au bac. « Ce sont les savoirs-être et la motivation qui doivent prévaloir », détaille pourtant le référentiel de l’Agence du service civique. Des associations jouent le jeu : « Pour choisir un volontaire, je n’ai pas besoin de connaître son CV : cela ne m’intéresse pas de savoir s’il a de nombreux diplômes, un CAP ou rien du tout, ce qui m’importe, c’est sa volonté », rapporte Christophe Louis. D’autres non : certaines missions exigent d’emblée une grande autonomie, ce qui se traduit par le recrutement de diplômés ayant déjà de nombreuses compétences. Les jeunes handicapés, qui peuvent pourtant prétendre au service civique (l’indemnité est même cumulable avec l’allocation aux adultes handicapés), sont d’ailleurs encore extrêmement peu nombreux à être volontaires (moins de 1 500). « La mixité ne se décrète pas : elle exige une politique pro-active de la part des structures qui n’existe que rarement », commente Valérie Becquet. Or il est à craindre que les emplois d’avenir renforcent cette tendance générale en « happant » les 16-25 ans les plus en difficulté. L’accent mis sur les jeunes en décrochage scolaire par l’Agence du service civique – avec la création d’une offre combinée service civique-formation dans le cadre de l’Education nationale (8) – réussira-t-il à renverser la donne ?

Dans ces conditions, le déploiement du service civique (30 000 volontaires sont annoncés pour 2013) constitue une gageure : alors que ses bases sont encore incertaines, comment passer à la vitesse supérieure tout en améliorant sa qualité et en préservant ses principes fondateurs (engagement du jeune, mixité sociale, mission d’intérêt général) ? « Les associations sont partantes pour cette montée en puissance à condition de conserver le dispositif actuel », avance Stéphanie Rivet, conseillère technique à la Conférence permanente des coordinations associatives (CPCA).

Or, pour des raisons budgétaires, une des pistes envisagées par l’Agence du service civique consisterait à en réduire la durée (ou, tout au moins, à privilégier les contrats de six mois aux dépens de ceux de un an) – un non-sens, pour les associations, qui estiment que les jeunes, surtout les plus en difficulté, ont besoin de temps pour s’approprier une mission. C’est pourquoi Sylvain Waserman défend une voie progressive, seule à même de conserver les valeurs du dispositif : « Il serait trop facile de faire du chiffre en transformant le service civique en banal dispositif de contrat aidé. » « L’agence est prise entre la volonté de maintenir une identité forte autour du service civique et une logique de développement qui risque d’en faire un fourre-tout avec des missions qui seraient en fait des emplois déguisés, renchérit Valérie Becquet. Seule une évaluation par l’agence, couplée à une charte “qualité” et à une labellisation des missions, permettra une extension qualitative. »

Les chiffres

→ 6 000 jeunes en 2010.

→ 15 000 jeunes en 2011.

→ 20 000 jeunes en 2012.

→ 30 000 jeunes prévus en 2013.

→ 50 000 jeunes prévus en 2015.

→ Deux candidatures par mission en moyenne.

59 % des volontaires ont un niveau inférieur ou équivalent au bac (24 % n’ont pas le bac et 35 % ont le niveau bac).

→ 41 % ont un niveau supérieur au bac.

→ 43 % des volontaires sont des garçons, 57 % des filles.

Un institut pour les lauréats du service civique

Financé par du mécénat, des dons de particuliers, de fondations ou d’entreprises, l’Institut du service civique affiche des intentions louables : tenter de réduire le décalage entre les aptitudes non académiques révélées par certains jeunes lors de leur service civique (capacité à prendre des responsabilités, à travailler en équipe, créativité, etc.) et ce que la société leur propose ensuite. Désireux de reprendre une formation ou d’entrer dans la vie active, les lauréats, dont la candidature a été retenue pour la valeur de leur engagement et la qualité de leur projet par un jury (professionnels du monde de l’entreprise, responsables associatifs, représentants d’établissements d’enseigne ment et personnalités indépendantes), participent à des séminaires et accèdent à des parcours professionnels ou de formation avec le soutien d’un parrain. Objectif : aller au bout de leur projet. Grâce à ce repérage de « talents », les entreprises partenaires (L’Oréal, SNCF, Canal +, GDF-Suez, Bouygues Construction…) peuvent diversifier leur recrutement et l’enseignement supérieur s’ouvrir à des profils moins classiques.

En 2012, quatre instituts du travail social – l’IRTS Montrouge-Neuilly-sur-Marne, l’IRTS Nord-Pas-de-Calais, l’ITS Pierre-Bourdieu à Pau et le centre de formation Erasme à Toulouse – ont été associés à la démarche. L’Unaforis (Union nationale des associations de formation et de recherche en intervention sociale) réalise d’ailleurs « un premier bilan de ces expérimentations afin d’envisager la meilleure façon de déployer des partenariats partout en France dès 2013 », précise Claire de Mazancourt, responsable de l’institut. Compte tenu du faible nombre de bénéficiaires (150 pour le moment), certains dénoncent une nouvelle forme d’élitisme. Ses effectifs devraient pourtant rapidement augmenter. Les candidatures pour la promotion 2013 seront ouvertes le 18 février (9).

Dans le sillage du service militaire…

Il faut remonter à la suspension du service militaire, en 1997, sous le premier mandat de Jacques Chirac, pour comprendre la genèse du service civique.

A l’époque, plusieurs formules de remplacement sont envisagées. C’est celle d’un volontariat civil qui est finalement retenue. Il faudra toutefois attendre mars 2000 pour que la loi soit votée.

Mais, cette dernière donnant lieu à quantités de statuts différents (volontariat civil en entreprise, volontariat international en administration, volontariat civil de cohésion sociale et de solidarité…, auxquels s’ajoutent en 2005 le contrat de volontariat international et, en 2006, le contrat de volontariat associatif), l’objectif de créer un service alternatif mobilisant les jeunes sous la forme d’un engagement reproduisant tout à la fois le creuset social de l’armée et renforçant le sentiment d’appartenance nationale à travers une action d’intérêt général n’est pas atteint.

A la suite des émeutes urbaines en novembre 2005, Jacques Chirac lance l’idée d’un service civil volontaire qui sera institué en mars 2006 dans le cadre de la loi sur l’égalité des chances. En utilisant le terme « service » et en greffant ce texte au code du service national, sa filiation avec l’ancien service national est réaffirmée avec force. Mais, trop complexe, manquant de reconnaissance, ce dispositif mal préparé, qui devait concerner jusqu’à 50 000 jeunes en 2007, n’en a finalement touché que 3 000. Il a néanmoins relancé le débat. En septembre 2008, Luc Ferry, chargé par Nicolas Sarkozy de réaliser un rapport sur ce sujet, publie Pour un service civique (éd. Odile Jacob) qui préconise l’objectif de 70 000 jeunes en service civique. Dans son Livre vert sur la jeunesse présenté en juillet 2009, Martin Hirsch, alors Haut Commissaire aux solidarités actives et à la jeunesse, prévoit également sa mise en œuvre et s’engage fortement en sa faveur. Une proposition de loi portant création d’un service civique volontaire est déposée et adoptée au Sénat le 27 octobre 2009 dans un large consensus. La loi sur le service civique est promulguée le 10 mars 2010.

Notes

(1) Selon les termes de la loi – Voir ASH n° 2703 du 1-04-11, p. 47.

(2) www.service-civique.gouv.fr.

(3) Comme le précise la loi – Op. Cit.

(4) A côté de l’« engagement de service civique », dont il est question ici et qui s’adresse aux 16-25 ans, le service civique englobe aussi le « volontariat de service civique » ouvert aux plus de 25 ans, ainsi que les différentes formes de volontariat international, qui sont reconnues comme des modalités particulières du service civique.

(5) Qui a dirigé « L’expérience du service civique volontaire à Unis-Cité : quels enseignements pour le service civique ? » – Cahiers de l’action n° 34 – Novembre 2011 – INJEP.

(6) En ligne sur http://service-civique.gouv.fr/sites/default/files/referentielmissions.pdf.

(7) 20 % des structures agréées sont théoriquement visitées chaque année.

(8) Voir ASH n° 2786 du 7-12-12, p. 12.

(9) Dossier à remplir en ligne www.institut-service-civique.fr.

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