Alors que la moyenne des pensions, selon la dernière étude de la direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (DREES) est de 1 216 €, on voit de grandes disparités entre les retraites les plus hautes et les plus basses. Depuis longtemps, la CFDT Retraités a une revendication forte : aucune pension pour une carrière complète ne doit être inférieure à un SMIC net, soit 1 120 € par mois. Notre enquête, conduite auprès de 1 505 personnes, adhérentes ou non à la CFDT, s’est intéressée à des personnes seules vivant avec moins de 1 250 € de revenus mensuels et des couples vivant avec moins de 2 000 €, tout en portant un regard particulier sur les retraités percevant moins de 1 000 € mensuels (1 500 € pour un couple). Elle devait nous permettre d’établir un diagnostic des conditions de vie de ces personnes et soit vérifier, soit orienter avec plus de pertinence, nos revendications en matière de basses pensions.
Alors que 67 % des personnes déclarent avoir une pension complète, elles vivent quand même sous le seuil de pauvreté. Elles ont commencé leur carrière jeunes, voire très jeunes (60 % avant 16 ans), et ont, pour 64 % d’entre elles, exercé dans le secteur privé. Un nombre important de femmes est ressorti de notre échantillon, et ce n’est pas un hasard, puisqu’elles touchent des retraites plus faibles que les hommes et disposent d’un revenu inférieur de plus de 30 % en moyenne. Les personnes qui vivent dans des conditions de pauvreté sont autant locataires que propriétaires. Mais quand elles ont un loyer, celui-ci pèse d’environ 30 % dans le budget. Quand on ajoute les impôts locaux, les charges d’habitation, les frais d’entretien du logement, l’alimentation et la santé, les trois quarts du budget sont consommés. Nous avons été surpris de découvrir que 75 % des personnes avaient un emprunt à la consommation – avec en moyenne 500 € de remboursement par an. Enfin, l’enquête montre qu’un nombre important de bénéficiaires potentiels de l’allocation de solidarité aux personnes âgées (ASPA) ne la perçoive pas.
Les conditions de vie de ces personnes sont très difficiles parce qu’elles économisent sur tous les postes budgétaires de base : le chauffage, l’alimentation et leur santé. Mais elles disent aussi se priver de ce qu’elles estiment être « superflu » comme le loisir, les abonnements de communication, les transports, les cadeaux aux proches, l’habillement. Si 37,5 % d’entre elles estiment qu’en « faisant attention », elles n’ont « pas trop de problèmes », 50 % décrivent leurs conditions de vie comme « difficiles, tous les jours » ou « serrées ». La spécificité de ces retraités pauvres est qu’ils sont souvent isolés et en souffrent : ils risquent de basculer dans la misère.
D’abord, nous nous opposons au gel des retraites : il est impensable que les basses pensions subissent toute perte de pouvoir d’achat. Nous souhaitons aussi que le gouvernement lutte contre les inégalités de genre dans les carrières professionnelles. Il faut agir en urgence sur cette question, en sachant que les mesures prises aujourd’hui produiront un effet dans 40 ans… Il est aussi nécessaire d’améliorer la redistribution des mécanismes de solidarité au sein des régimes de retraite. Je pense notamment à la majoration de pension de 10 % lorsqu’on a élevé trois enfants : étant proportionnelle au montant de retraite, elle bénéficie essentiellement aux hommes, d’autant qu’ils n’ont pas interrompu leur carrière pour élever des enfants. La CFDT Retraités propose que cette majoration soit forfaitisée. Autre revendication : il faut généraliser l’accès à une complémentaire santé à un coût accessible – on a observé dans notre enquête qu’elle coûte aux retraités 80 € en moyenne –, réduire les restes à charge, lutter contre les dépassements d’honoraires et contre les déserts médicaux.