A quoi se mesure la réussite d’un placement ? A un retour à domicile ? A la qualité des résultats scolaires de l’enfant ? Se gardant de toute réponse univoque, Emilie Potin, docteure en sociologie, invite à réfléchir à cette question à partir de la trajectoire de neuf adolescents ou jeunes majeurs qu’elle a reconstituée avec les principaux intéressés : les jeunes eux-mêmes, leurs parents et familles d’accueil, ainsi que les professionnels référents de leur situation. Adossés à un vaste travail d’enquête au cours duquel la sociologue a analysé 350 dossiers d’enfants pris en charge par l’aide sociale à l’enfance, ces récits de placement illustrent, pour l’auteure, trois parcours types en protection de l’enfance : celui des enfants « placés », « déplacés » ou « replacés ». Les premiers, confiés avant l’âge de 10 ans, ont connu un placement long. Grâce à cette continuité, les jeunes ont vécu positivement leur placement et ont tissé des liens forts avec leur famille d’accueil, qui est progressivement devenue leur « vraie » famille. Les enfants « déplacés », en revanche, n’ont pas eu de conditions d’accueil pérennes : passés de familles d’accueil en foyers sans revenir chez leurs parents, ils se retrouvent très insécurisés, faute d’avoir pu s’insérer nulle part dans un tissu relationnel stable. Les enfants « replacés » ont également traversé un enchaînement de mesures, mais celui-ci a été scandé par un ou plusieurs retours au domicile parental. Dans cette forme de résidence alternée entre parents et lieux de placement, ces jeunes qui vont et viennent tout en étant inscrits dans la continuité familiale ont pu profiter des deux registres d’accompagnement.
Enfants placés, déplacés, replacés : parcours en protection de l’enfance
Emilie Potin – Ed. érès – 23 €