« Je souhaite que notre société change son regard sur le vieillissement, qui n’est pas la dépendance, qui doit être une vie longue, une vie autonome le plus souvent, une vie digne. » Telle est l’ambition affichée par le président de la République, le 25 janvier, lors du 31e congrès de l’Uniopss (Union nationale interfédérale des œuvres et organismes privés non lucratifs sanitaires et sociaux), où il a précisé le contenu de la future réforme de la dépendance qui, a-t-il assuré, sera élaborée en concertation avec les associations. Côté calendrier, la réforme « sera prête d’ici la fin de l’année », a promis le chef de l’Etat, et, « en toute logique, présentée en conseil des ministres avant les élections municipales de mars 2014 », a précisé la ministre déléguée chargée des personnes âgées et de l’autonomie lors de ses vœux à la presse le 29 janvier.
François Hollande a ainsi indiqué que « 80 000 logements seront adaptés, sur les cinq prochaines années, aux contraintes du grand âge ». L’idée étant, a précisé Michèle Delaunay lors d’une interview accordée le 26 janvier au journal Le Parisien, « de faciliter les aménagements, les petites installations de domotique ». Pour le chef de l’Etat, devront aussi être ouvertes « davantage de possibilités de prise en charge temporaire dans des établissements, même pour des accueils de jour ». Autre objectif : inventer des « solutions intermédiaires entre le domicile et la maison de retraite ou l’établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes [EHPAD] » ainsi que « des formules qui évitent le placement en établissement ».
Le chef de l’Etat a par ailleurs plaidé pour l’octroi aux aidants familiaux de congés spécifiques qui leur permettraient d’aménager leur temps de travail et de soutenir leurs parents.
Parce que « de nombreuses familles renoncent, faute de moyens financiers, à placer un de leurs parents en établissement », non seulement en raison de leurs faibles revenus mais aussi de l’augmentation considérable des tarifs qui y sont appliqués (1), François Hollande souhaite une « clarification des règles » de tarification des EHPAD, « une régulation nationale » afin que la solidarité nationale « ne soit pas poussée à l’extrême ». Objectif final : diminuer le reste à charge des familles. Pour ce faire, a précisé Michèle Delaunay au Parisien, « on va réfléchir à la façon d’encadrer les loyers dans les maisons de retraite comme l’a fait Cécile Duflot (ministre du Logement) pour les logements. Les établissements ne pourraient plus augmenter à l’envi le coût d’une chambre à la relocation. » Il conviendra aussi, selon elle, de « plafonner les prestations facturées aux résidents à travers des conventionnements » car « les familles sont perdues et se font rouler sur les frais cachés ». Parallèlement, le gouvernement entend créer un site Internet qui détaillera tous les prix pratiqués en établissement sur le territoire, « y compris ce qu’on paye “en plus” : coiffeur, eau minérale… » (2). Autre solution évoquée par la ministre déléguée : « passer par des aides à l’investissement ou la mutualisation des frais des établissements : un directeur pour trois, des achats groupés… ».
Par ailleurs, pour aider le résident, elle a indiqué que l’aide personnalisée à l’autonomie serait revisitée. « Ce ne sera pas forcément une revalorisation, peut-être une meilleure redistribution. En tout cas, a martelé Michèle Delaunay, je ne suis pas favorable à ce qu’on la récupère sur la succession. »
Pour la ministre déléguée, la future réforme de la dépendance sera aussi l’occasion d’« expliciter les droits des âgés », notamment au regard du domicile. En effet, a-t-elle expliqué, « si la chambre à l’hôpital ou en EHPAD est assimilée au domicile, tous les droits du domicile n’y sont en revanche pas attachés », faisant ici référence à la récente expulsion d’une résidente de sa maison de retraite en raison des impayés de sa chambre.
Sur le financement de la réforme de la dépendance, le président de la République a indiqué que l’effort serait étalé sur l’ensemble du quinquennat pour tenir compte du contexte budgétaire dégradé. Cet effort, a-t-il assuré, sera partagé entre la « solidarité nécessaire » – sans en préciser les sources de recettes – et la « responsabilité individuelle, personnelle, indispensable ». Mais qu’entend-on par responsabilité individuelle ? Pour Michèle Delaunay, « il s’agit pour chacun d’anticiper son vieillissement, en aménageant son logement par exemple ». En tout cas, a-t-elle souligné, « l’assurance privée, nous ne comptons pas sur elle » même s’il n’est « pas question de l’interdire ni de s’interdire de l’encadrer ».
(1) Le coût moyen de l’hébergement est de 2 400 € par mois dans les établissements privés lucratifs et de 1 600 € dans le public alors que le montant moyen d’une pension de vieillesse est de 1 200 € par mois.
(2) Selon Michèle Delaunay, ce site devrait être prochainement expérimenté sur le territoire de l’agence régionale de santé d’Aquitaine.