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Le plan pluriannuel contre la pauvreté et pour l’inclusion sociale

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Accès aux droits et aux soins, insertion des jeunes en difficulté, RSA, contrats aidés, hébergement d’urgence, surendettement… Feuille de route du gouvernement pour le quinquennat en matière de politique de solidarité, le plan prévoit aussi de refonder le travail social.

Ses grandes lignes avaient été dévoilées à l’issue de la conférence nationale des 10 et 11 décembre dernier. Le 21 janvier, le plan pluriannuel contre la pauvreté et pour l’inclusion sociale a, comme s’y était engagé le Premier ministre, été officiellement adopté par le comité interministériel de lutte contre les exclusions, qui n’avait pas été réuni depuis 2006. Ce document de plus de 50 pages, qui regroupe l’ensemble des mesures retenues par le gouvernement en matière de politique de solidarité pour le quinquennat, a reçu un accueil mitigé de la part du secteur associatif (voir ce numéro, page 10). Ses mesures sont articulées autour des « trois grands axes de réformes » suivants : réduire les inégalités et prévenir les ruptures ; venir en aide et accompagner vers l’insertion ; coordonner l’action sociale et valoriser ses acteurs.

Une grande partie des mesures contenues dans le plan sont déjà connues, voire en cours de mise en œuvre. C’est le cas notamment de l’augmentation de 10 % du revenu de solidarité active (RSA) « socle » d’ici à 2017 en plus de l’inflation, de la hausse de 7 % du plafond de ressources pour l’octroi de la couverture maladie universelle complémentaire (CMU-C), de l’extension des tarifs sociaux « énergie » à de nouveaux bénéficiaires, de l’instauration d’une « garantie jeunes » ou encore de la création de 5 000 places d’hébergement d’urgence dès 2013. Mais le plan comporte aussi quelques nouveautés, telles que :

→ l’allongement de la durée des contrats aidés ;

→ la mise en place d’indicateurs pour mesurer les taux de non-recours aux prestations sociales ;

→ l’expérimentation de parcours d’insertion pour les jeunes sous main de justice ou pris en charge par l’aide sociale à l’enfance ;

→ l’intervention en milieu carcéral de structures d’insertion par l’activité économique ;

→ la simplification de la procédure de domiciliation ;

→ la réforme du statut des gens du voyage.

Côté financement, rien de vraiment très précis. Jean-Marc Ayrault a confirmé que, à partir de 2017, le coût de mise en œuvre du plan s’élèverait en rythme de croisière à 2,5 milliards d’euros par an. D’ici là, il va monter en charge progressivement et son financement sera assuré par un redéploiement de crédits, sans prélèvements supplémentaires, a assuré le Premier ministre. Pour 2013, Matignon évalue son coût entre 300 et 400 millions d’euros, financé grâce à la majoration de 2 milliards de la réserve budgétaire de précaution décidée par le gouvernement en début d’année et dégagée par de nouvelles économies au sein des différents ministères. Entre 2014 et 2017, les mesures seront financées au coup par coup dans le cadre des lois de finances annuelles.

I. ACCÈS AUX DROITS ET AUX BIENS ESSENTIELS

A. Mise en œuvre d’un programme d’accès aux droits

Afin de réduire le taux de non-recours aux droits sociaux, le gouvernement va tout d’abord lancer une campagne de communication « grand public » de promotion des droits sociaux en 2013 sur le thème du « juste droit ». Au-delà, le plan prévoit aussi la mise en œuvre de mesures concrètes.

1. DES OBJECTIFS ET DES INDICATEURS DE NON-RECOURS AUX PRESTATIONS

Lors de la conférence nationale de lutte contre la pauvreté et pour l’inclusion sociale de décembre dernier, le Premier ministre a indiqué que des « objectifs de baisse des taux de non-recours, prestation par prestation » seraient définis. Le plan précise que les administrations seront ainsi invitées à inscrire dans leur programme de travail l’élaboration et le suivi d’indicateurs de non-recours aux droits existants, des « indicateurs [qui] pourront être déclinés selon le sexe ainsi que selon les territoires, y compris en outre-mer, afin de mettre en exergue d’éventuelles différences de traitement et de suggérer des pistes de travail ciblées ». L’objectif de baisse des taux de non-recours sera aussi inscrit dans les conventions d’objectifs et de gestion des principaux organismes de sécurité sociale, telles que celle de la caisse nationale d’allocations familiales (CNAF) qui devrait être conclue avec l’Etat d’ici au printemps prochain (1).

Les objectifs de réduction du non-recours aux prestations sociales seront ensuite déclinés dans les territoires, sous l’égide des préfets. Dès le printemps 2013, ils devront développer des liens entre les différents services accueillant des personnes en situation de précarité, tels que les caisses d’allocations familiales (CAF), les centres communaux d’action sociale (CCAS), les services sociaux des conseils généraux et les points d’accès au droit, afin notamment d’« organiser le repérage des personnes en difficulté et leur accompagnement vers l’ouverture de leurs droits, [et] le ciblage des actions de communication sur les personnes faisant le moins valoir leurs droits », explique Matignon.

2. UNE INFORMATION ACCRUE DES ALLOCATAIRES POTENTIELS

Toujours dans l’optique de diminuer le non-recours aux prestations sociales, le gouvernement entend demander aux CAF d’« instaurer progressivement un “rendez-vous des droits” sur le modèle développé par les caisses de la Mutualité sociale agricole [MSA] pour une partie de leurs allocataires ». Des rendez-vous qui pourront ensuite être adaptés au réseau local des caisses nationales d’assurance maladie (CNAM) et d’assurance vieillesse (CNAV), pour une meilleure promotion de l’allocation de solidarité aux personnes âgées (ASPA) auprès des personnes potentiellement éligibles.

Une attention particulière devra aussi être portée à l’amélioration du taux de recours à l’aide à l’acquisition d’une couverture complémentaire santé (ACS) en 2013. Les caisses d’assurance maladie, les CAF et les caisses de la MSA devront donc informer leurs allocataires sur leur droit éventuel à cette prestation. Pôle emploi sera lui aussi mobilisé afin d’identifier des bénéficiaires potentiels de l’ACS parmi les chômeurs indemnisés et les titulaires de l’allocation de solidarité spécifique. Enfin, il est prévu qu’une convention de partenariat soit signée avec l’Union nationale des centres communaux d’action sociale pour permettre aux CCAS volontaires de pré-instruire des droits à l’ACS.

La future loi « d’adaptation de la société au vieillissement » devrait aussi contenir de mesures visant à améliorer les droits et l’accès aux droits des personnes âgées.

S’agissant des migrants âgés, les taux de recours sont « parfois très faibles » en raison de la « non-maîtrise de la langue (en particulier de l’écrit) et de la méconnaissance des circuits et procédures », explique le plan. Pour y remédier, la CNAV a lancé une expérimentation dans les caisses d’assurance retraite et de santé au travail (Carsat) de cinq régions (2) qui consiste à favoriser l’information sur le droit à la retraite des personnes immigrées via une meilleure formation des professionnels sociaux, de la santé et de l’aide à domicile à ce sujet. Des formations que le gouvernement veut étendre à l’ensemble des Carsat. Il va d’ailleurs étudier la possibilité de les voir entrer dans le cadre des formations dispensées par le Centre national de la fonction publique territoriale et les instituts de formation en travail social.

3. UNE PLUS GRANDE LISIBILITÉ ET RÉGULARITÉ DES ALLOCATIONS

« La complexité des règles d’attribution des aides versées par les CAF et les caisses de la MSA, le principe de fongibilité pour la récupération des indus [3] associés au manque d’information des bénéficiaires sont des facteurs d’insécurité et de fragilisation des personnes à faibles ressources », reconnaît le gouvernement. Aussi va-t-il demander à l’inspection générale des affaires sociales (IGAS) de plancher d’ici à la fin du premier semestre 2013 sur la faisabilité et les modalités pratiques :

→ pour les cas de suspension de droits, d’une information préalable de l’allocataire en cas d’interruption de droit en privilégiant le contact physique et téléphonique, et du respect d’une période de phase contradictoire ;

→ pour les cas de récupération d’indus, d’un rapprochement du niveau des quotités insaisissables avec celui qui est utilisé par la Banque de France dans les procédures de surendettement. Lorsque l’indu est lié à une erreur de l’organisme, l’inspection devra réfléchir à la mise en œuvre une procédure de remise gracieuse totale ou partielle.

4. UNE SIMPLIFICATION DE LA DOMICILIATION

Le gouvernement veut simplifier la procédure de domiciliation pour les personnes sans domicile stable, régie par la loi « DALO » du 5 mars 2007. Les préfets de département, en lien avec les collectivités territoriales et les acteurs associatifs concernés, devront ainsi établir un « schéma de la domiciliation », qui définira une « couverture territoriale complète et en assurera un suivi annuel ». Ces orientations devront prendre en compte la spécificité de la domiciliation pour les bénéficiaires de l’aide médicale de l’Etat, les demandeurs d’asile et les gens du voyage, auxquels la procédure de droit commun ne s’applique pas.

B. Extension des bénéficiaires des tarifs sociaux « énergie »

Sans attendre le vote de la proposition de loi « précarité énergétique » (4), le gouvernement a étendu, par un récent arrêté, le droit aux tarifs sociaux du gaz et de l’électricité aux personnes dont les ressources n’excèdent pas le plafond de ressources pour l’octroi de l’ACS, ce qui recouvre les personnes percevant l’allocation aux adultes handicapés et l’ASPA (5).

Jusque-là, le plafond de ressources retenu était celui de la CMU-C. Rappelons que le plafond de ressources de l’ACS est égal à celui de la CMU-C majoré de 35 %, soit 10 711 € par an pour une personne seule depuis le 1er juillet 2012 (6).

C. Prise en compte des difficultés liées au handicap

Pour le gouvernement, « la prise en compte des difficultés particulières induites par le handicap dans les situations de précarité permettra également d’améliorer l’accès aux droits et de renforcer l’inclusion sociale des personnes concernées ». En matière d’accessibilité généralisée à tous les aspects de la vie publique et pour toutes les dimensions du handicap, « une approche pragmatique et collaborative avec les acteurs de terrain sera détaillée et mise en place afin d’élaborer des solutions acceptées par tous », prévoit le plan. La mission confiée à Claire-Lise Campion, qui doit aboutir « début février », formulera des propositions concrètes sur les objectifs d’accessibilité du bâti et du transport, rappelle-t-il.

II. EMPLOI, INSERTION, TRAVAIL, FORMATION PROFESSIONNELLE

A. Amélioration du RSA

1. LA HAUSSE DU RSA « SOCLE »

Conformément aux annonces du Premier ministre en décembre dernier (7), le plan prévoit que le montant du revenu de solidarité active (RSA) sera revalorisé par voie réglementaire de 10 % en sus de l’inflation, afin qu’il retrouve son niveau relatif d’origine de 50 % du SMIC à l’horizon 2017. Une première revalorisation de 2 % au-delà de l’inflation interviendra dès septembre prochain. Cette revalorisation pluriannuelle du RSA devrait être intégralement compensée pour les conseils généraux. Le gouvernement prévoit, par ailleurs, d’étudier « les moyens de tenir compte de la situation particulière des femmes victimes de violences dans le calcul des droits au RSA ».

2. LA RÉFORME DU RSA « ACTIVITÉ »

Dès février, un groupe de travail sera également installé en vue d’une réforme, début 2014, du RSA activité – qui, selon Matignon, souffre d’un taux de non-recours « record » de 68 % – et de la prime pour l’emploi. Objectif : améliorer les dispositifs de soutien financier aux revenus d’activité des travailleurs modestes. Les conclusions du groupe de travail sont attendues « avant la fin du premier semestre » 2013. La réforme de ces deux dispositifs devrait ensuite être intégrée au projet de loi de finances pour 2014.

3. L’ÉVALUATION DE L’APRE

Le dispositif de l’aide personnalisée au retour à l’emploi (APRE), qui a pour objet de prendre en charge tout ou partie des coûts exposés par le bénéficiaire du RSA qui débute ou reprend une activité professionnelle, fera l’objet d’une évaluation (forces et faiblesses du dispositif, prise en charge des femmes par les services départementaux d’insertion et leur accès à l’APRE dans l’élaboration de leur projet professionnel…). Le gouvernement statuera ensuite, à la fin du premier semestre 2013, sur son devenir « à l’issue d’une concertation associant notamment l’Assemblée des départements de France ».

4. LA RÉVISION DU MODE D’ORIENTATION DES ALLOCATAIRES

Enfin, les modalités d’orientation des bénéficiaires du RSA seront revues « pour rompre avec la logique binaire prévoyant une orientation soit vers un accompagnement social, soit vers un accompagnement professionnel », explique le plan. Courant 2013, des conventions de partenariat entre Pôle emploi et les conseils généraux devraient être conclues, organisant leurs actions respectives. L’objectif étant notamment d’accroître la part des foyers allocataires du RSA sans emploi dont au moins un des membres reprend une activité. « Une attention particulière sera portée par les missions locales aux jeunes femmes cheffes de familles monoparentales dont le risque de retrait du marché du travail est élevé, notamment en outre-mer », précise le gouvernement.

B. Allongement et assouplissement de la durée des contrats aidés

En 2013 et tout au long du quinquennat, la durée moyenne des contrats aidés sera allongée pour s’approcher d’une moyenne de 12 mois, ce qui permettra aux différents acteurs de disposer « d’une meilleure visibilité pour construire un parcours de qualité avec le salarié », indique le plan.

Par ailleurs, ces contrats pourront « être mobilisés avec souplesse pour des durées variables, de quelques heures de travail par semaine (dans une logique progressive) et jusqu’à 35 heures, en fonction de l’évolution de la situation de la personne ». Cette souplesse figurera dans la circulaire de programmation pour 2013 et pourra concerner particulièrement les travailleurs handicapés, affirme le plan. « Pour ces contrats, le principe d’un suivi au cours de l’emploi, permettant notamment de préparer les transitions, jusqu’à la stabilisation en emploi durable, sera progressivement généralisé », indique encore le gouvernement. Ce nouveau mode de gestion sera expérimenté sur quelques territoires au cours du second semestre 2013.

Enfin, « un volume stable de contrats aidés sera garanti pour les personnes les plus éloignées de l’emploi », fait savoir Matignon.

C. Mesures d’insertion spécifiques aux jeunes

Pour lutter contre le chômage des jeunes, une « garantie jeunes » sera expérimentée dès septembre 2013 dans dix territoires pilotes, puis généralisée en 2014, promet le gouvernement. Objectif : « inscrire 100 000 jeunes en situation de pauvreté dans un parcours contractualisé d’accès à l’emploi ou à la formation, reposant sur une évolution de l’actuel CIVIS (contrat d’insertion dans la vie sociale) ». Concrètement, les missions locales pourront proposer à des jeunes de 18 à 25 ans qui ne sont ni à l’école, ni en formation, ni en emploi, un emploi ou une formation adaptés qu’ils seront tenus d’accepter pour bénéficier d’une garantie de ressource différentielle d’un montant équivalent au RSA, intégrant un mécanisme d’intéressement. Un groupe de travail ad hoc constitué des services de l’Etat, de jeunes en difficulté, de responsables associatifs, d’experts et de représentants des collectivités territoriales doit être mis en place très prochainement pour définir plus précisément les contours de la mesure, les conditions d’accès et les critères de sélection des territoires pilotes.

Les jeunes sous main de justice et ceux qui sortent de l’aide sociale à l’enfance bénéficieront tout spécifiquement de cette « garantie jeunes » à compter de septembre prochain, indique le plan. Une autre expérimentation, également menée à partir de septembre dans cinq départements, devrait en outre permettre de mobiliser des emplois d’avenir spécifiquement pour ces jeunes tout en leur garantissant un accès au logement adapté (foyers pour jeunes travailleurs, résidences sociales…). Une évaluation de ces expérimentations sera menée au premier trimestre 2014 par les inspections générales des affaires sociales et des services judiciaires.

D. Formation des moins qualifiés

Dès 2013 et tout au long du quinquennat, l’Etat veillera à ce « que les moyens de formation puissent bénéficier à ceux qui en ont le plus besoin », assure le plan.

Les entreprises, les organismes paritaires collecteurs agréés, les employeurs publics, les régions et Pôle emploi devront notamment se fixer un objectif en termes de part des fonds de la formation mobilisés en direction des salariés titulaires d’un faible niveau de qualification. Par ailleurs, des actions spécifiques sur les modes de garde permettant de faciliter le suivi d’une formation, notamment pour les mères de famille, seront mises en œuvre. Autres actions évoquées par le plan : la construction d’un indicateur retraçant le taux d’accès à la formation professionnelle des allocataires du RSA ou encore l’intensification des actions de formation ou de requalification pour les personnes en situation de handicap.

En outre, la lutte contre l’illettrisme et pour l’acquisition des savoirs de base devrait être renforcée en faveur des populations fragiles (gens du voyage, jeunes ultramarins…).

Un chantier sera également ouvert pour progresser dans la reconnaissance des compétences et des savoir-faire acquis en situation d’emploi, prévoit le plan. Un groupe de travail interministériel sera mis en place « afin d’aboutir à un référentiel de compétences socio-professionnelles permettant de valider des compétences de niveau infra-V aujourd’hui non sanctionnées par un diplôme » et se penchera également sur les assouplissements possibles des dispositifs de validation des acquis de l’expérience (VAE) afin de faciliter leur mobilisation concrète en faveur de la sécurisation des parcours. « Des progrès devront également être réalisés sur la reconnaissance des compétences et qualifications acquises par les étrangers dans leur pays d’origine, ce qui constitue un chantier important pour faciliter l’intégration professionnelle de ces personnes. » Matignon rappelle également que le compte personnel de formation, dont le principe a dernièrement était acté dans le cadre de l’accord sur la sécurisation de l’emploi (8), verra le jour en 2013.

Par ailleurs, les régions devront mettre en œuvre début 2013 « un “plan d’action concerté”, associant les acteurs territoriaux de la formation pour accroître le taux d’accès à la formation des demandeurs d’emploi et un “pacte régional pour la réussite éducative et professionnelle des jeunes” pour proposer des solutions notamment à tous les jeunes décrocheurs potentiellement concernés par les situations de pauvreté et d’exclusion » (9).

E. Accompagnement des publics spécifiques

Le plan prévoit que Pôle emploi sera, durant ce quinquennat, un acteur privilégié dans l’accès à l’emploi, notamment des personnes les plus en difficulté. L’organisme est ainsi chargé par le gouvernement de développer :

→ des modes de suivi individualisé des demandeurs d’emploi plus diversifiés, via la mise en place d’un réseau de parrainage de bénévoles ;

→ des techniques de médiation pour influer sur les pratiques de recrutement des entreprises et lutter contre les stéréotypes à l’embauche.

Pour les étrangers nouvellement arrivés en France, connaissant des taux de chômage particulièrement élevés et confrontés à des problèmes de pauvreté, l’Etat devrait étudier les possibilités de rapprochement entre le service public de l’accueil et le service public de l’emploi en vue de faciliter l’accès au premier emploi de ces personnes. Une attention particulière sera apportée aux réfugiés politiques bénéficiant du droit d’asile. La mobilisation dans ce cadre des branches professionnelles et de l’ensemble des acteurs économiques sera aussi à rechercher.

L’inspection générale des affaires sociales et le Conseil général de l’environnement et du développement durable devraient se voir, quant à eux, confier une mission sur la mobilité des travailleurs modestes. Objectif : évaluer les difficultés liées aux distances et aux coûts de déplacements, repérer les bonnes pratiques et élaborer des recommandations en vue de les essaimer. « Les difficultés de prise en charge des frais de transport pour les personnes handicapées seront particulièrement prises en compte. »

Le gouvernement entend aussi développer l’accompagnement à la création d’activités professionnelles des gens du voyage, « en s’appuyant sur l’expérience d’associations d’insertion professionnelle ».

Par ailleurs, l’expérimentation menée depuis 2011 dans dix maisons départementales des personnes handicapées pour améliorer l’employabilité des personnes en situation de handicap et leur accès à l’emploi sera évaluée en juin prochain, en vue de sa généralisation, indique le plan. Pour mémoire, ce projet consiste à proposer à ces personnes, à l’occasion de leur demande de prestation, des modules de mise en situation professionnelle pour mieux appréhender leurs possibilités d’insertion professionnelle.

Enfin, s’agissant des publics sous main de justice, la finalisation, par la direction de l’administration pénitentiaire et la délégation générale à l’emploi et à la formation professionnelle, des textes d’application de l’article 33, al. 2 de la loi pénitentiaire, permettra l’intervention en détention de structures d’insertion par l’activité économique. « Cette innovation majeure contribuera à l’insertion professionnelle de ces publics spécifiques, qui sont le plus souvent très éloignés de l’emploi », note Matignon.

III. LOGEMENT ET HÉBERGEMENT

Le plan contre la pauvreté contient peu d’annonces nouvelles en matière de logement et d’hébergement, la ministre de l’Egalité des territoires et du Logement, Cécile Duflot, ayant d’ores et déjà beaucoup communiqué sur sa feuille de route.

A. Production de logements sociaux et à bas loyers

Le gouvernement souhaite produire du logement social et très social en 2013 et tout au long du quinquennat. Pour tenir le cap fixé en termes de production, il compte en premier lieu sur les effets de la loi relative à la mobilisation du foncier public en faveur du logement et au renforcement des obligations de production de logement social (10).

Un pacte sera signé par ailleurs avec l’Union sociale pour l’habitat, « pour mettre en œuvre la volonté commune de construire 150 000 logements locatifs sociaux par an et de développer une offre de logement accompagné », indique le plan. En outre, l’ensemble des acteurs intervenant dans la construction et la gestion du logement social seront réunis par le Premier ministre, au cours du premier trimestre 2013.

Le développement de l’offre de logements locatifs sociaux sera complété par un « programme de logements à bas niveau de loyer dans le secteur diffus ouvert aux bailleurs sociaux et aux associations investies sur la maîtrise d’ouvrage d’insertion », annonce encore Matignon.

Parallèlement, le ministère du Logement va activer un « programme de soutien à la construction de logements adaptés– résidences sociales et résidences d’accueil – et l’accompagner d’un renforcement de l’aide à la gestion locative sociale ». L’objectif poursuivi, expliquent les services du Premier ministre, « est de disposer d’une large palette de possibilités de logement, répondant aux besoins tant conjoncturels que structurels et s’alignant sur les capacités contributives de leurs potentiels occupants ». Dans ce cadre, la mise en œuvre du plan de traitement des foyers de travailleurs migrants sera poursuivie avec la production de logements répondant aux normes actuelles.

B. Encadrement des loyers dans le parc privé

Le constat est connu. L’augmentation des loyers à la relocation dans le parc privé atteint dans les agglomérations les plus chères des proportions qui ne sont plus compatibles avec les revenus des locataires. Le gouvernement s’est donc fixé comme objectif de « réguler les excès » en la matière. Les premières mesures prises en juillet 2012 pour encadrer les loyers (11) seront ainsi complétées par une réforme de la loi de 1989 sur les rapports locatifs. Pour disposer de données fiables, Cécile Duflot compte s’appuyer sur les observatoires des loyers, actuellement en phase de déploiement (12). Le projet de loi-cadre sur le logement et l’urbanisme, attendu en juin en conseil des ministres, prévoira des dispositions rendant opposables les loyers fournis par les observatoires de loyers lors de la signature d’un bail.

C. Lutte contre la précarité énergétique et l’habitat indigne

Pour « favoriser le maintien dans des logements de qualité, et garantir à terme la maîtrise des charges liées au logement », le ministère de l’Egalité des territoires et du Logement portera tout au long du quinquennat un « plan de rénovation énergétique de l’habitat ». Objectif : rénover 500 000 logements par an à l’horizon 2017. Ce plan accordera une attention particulière à la lutte contre la précarité énergétique.

Le gouvernement compte beaucoup sur l’Agence nationale de l’habitat, dont le budget a été renforcé cette année. Les conditions d’accès au programme « Habiter mieux » seront élargies afin que les aides soient distribuées plus largement, précise encore Matignon. « Ces aides doivent notamment bénéficier aux personnes de plus de 60 ans les moins aisées, particulièrement touchées par la précarité énergétique ».

Enfin, pour lutter contre l’habitat indigne, le projet de loi-cadre sur le logement et l’urbanisme comportera des mesures visant à renforcer les outils existants, notamment pour traiter les copropriétés dégradées. « Des efforts seront également déployés pour résorber l’habitat insalubre en outre-mer. »

D. Sécurisation des rapports locatifs

Afin de sécuriser les rapports locatifs et d’éviter les phénomènes de discrimination à l’entrée dans le logement, le gouvernement souhaite mettre en œuvre une garantie universelle et solidaire des risques locatifs d’ici à 2014. Le sujet est actuellement toujours à l’étude et fera l’objet d’une loi. « L’objectif poursuivi est d’instaurer un système qui sécuriserait à la fois les propriétaires, en les garantissant contre les impayés de loyer, et les locataires, dont l’entrée et le maintien dans le logement seraient facilités », résument les services du Premier ministre.

E. Prévention des expulsions

Le ministère du Logement aura notamment pour tâche, en 2013 et tout au long du quinquennat, de développer la prévention des expulsions. Il procédera pour ce faire par la voie réglementaire. Il s’agira, explique Matignon :

→ de traiter les impayés le plus en amont possible ;

→ de raccourcir les délais réglementaires applicables s’agissant du traitement des impayés des bénéficiaires d’une aide au logement ;

→ de renforcer le rôle des commissions de coordination des actions de prévention des expulsions ;

→ d’assurer une meilleure articulation avec les fonds de solidarité pour le logement. Un travail avec l’Assemblée des départements de France sera lancé en ce sens.

F. Attribution des logements sociaux

Une réforme des modalités d’attribution des logements sociaux figure également sur la feuille de route du ministère du Logement. Une large concertation destinée à faire émerger des propositions « co-construites et partagées » sur le sujet s’est ouverte le 16 janvier dernier (voir ce numéro, page 5). Ces préconisations auront vocation à être intégrées au projet de loi-cadre sur l’urbanisme et le logement. Objectif affiché : faire que le dispositif d’attribution des logements sociaux « gagne en transparence, en efficacité et en lisibilité pour le demandeur en associant les partenaires locaux ». « Ce système devra également veiller à intégrer les enjeux d’équilibre des territoires et à garantir la cohérence entre la politique d’attribution de logements sociaux et la politique locale de l’habitat », indique Matignon, ajoutant qu’« une attention forte sera portée aux critères de priorisation des personnes en situation d’hébergement ou mal logées, ainsi qu’à une meilleure prise en compte de l’égalité femmes-hommes ».

G. Droit au logement opposable

Le ministère du Logement s’engage dès 2013 à « remédier aux difficultés de mise en œuvre du droit au logement opposable dans les zones tendues ». « Un plan d’urgence – notamment pour l’Ile-de-France – sera déployé afin de mobiliser des logements nouveaux pour accueillir les ménages reconnus prioritaires au titre de la loi DALO », promet Matignon. « La mobilisation des logements sociaux existants remis à la location (réservés ou non) sera renforcée et une part du programme de logements à bas niveau de loyer dans le secteur diffus leur sera dédiée. » Enfin, des conférences territoriales pour le relogement des personnes reconnues prioritaires DALO en attente de longue date seront organisées sur les territoires concernés.

H. Hébergement d’urgence

On le sait, le gouvernement souhaite mettre fin à la gestion au thermomètre de l’hébergement d’urgence et prioriser l’accès au logement.

Afin notamment d’« assurer une sortie du dispositif hivernal cohérente et organisée », il a été décidé la création ou la pérennisation de 5 000 places d’hébergement d’urgence dès 2013. Cela pour éviter la remise à la rue à la sortie de l’hiver des personnes hébergées mais aussi pour faire face à l’afflux des demandes adressées au 115 et répondre aux besoins spécifiques, « notamment à la prise en charge des personnes placées sous main de justice ».

Par ailleurs, « comme prévu lors du comité interministériel aux droits des femmes [13], le renforcement des capacités dédiées et adaptées aux femmes victimes de violence sera poursuivi, en tenant compte des besoins des territoires ». C’est ainsi que, parmi les 5 000 places d’hébergement d’urgence qui vont être créées, près d’un tiers sera réservé aux femmes victimes de violences.

Le gouvernement rappelle encore que, entre 2013 et début 2014, 4 000 nouvelles places seront créées dans les centres d’accueil pour demandeurs d’asile.

Le plan gouvernemental réaffirme également la nécessité d’établir des diagnostics territoriaux associant l’ensemble des acteurs, afin de permettre d’améliorer et de structurer l’offre d’hébergement, à long terme, à partir des besoins observés sur le terrain. « Les projets territoriaux de sortie de l’hiver, demandés cette année aux préfets de région [14], en constituent une première étape. »

En complément de la création de places, le ministère du Logement poursuivra le plan d’humanisation des structures d’accueil et d’hébergement « pour garantir des solutions dignes aux personnes accueillies ».

La possibilité de proposer un statut unique pour les structures d’hébergement et pour l’accompagnement sera étudiée à moyen terme, « afin de mettre un terme à l’empilement des dispositifs et à la segmentation ».

Enfin, le plan affiche de nouveau la volonté du gouvernement de « donner un nouveau souffle » aux services intégrés d’accueil et d’orientation (SIAO), dont les moyens de fonctionnement financiers et humains ont, rappelle-t-il, été renforcés dès 2013. Il invite tous les acteurs concernés à se mobiliser pour rendre ces instances « pleinement opérationnelles ». Selon le document, la convergence vers un SIAO unique – urgence et insertion – « devra s’accélérer ». En outre, la question du système d’information équipant les SIAO « devra également être résolue, dès 2013, pour aboutir à une observation nationale et régionale efficace ». Enfin, « afin de renforcer la cohérence et l’efficacité des documents programmatiques », les PDAHI (plans départementaux d’accueil, d’hébergement et d’insertion des personnes sans domicile) et les PDALPD (plans départementaux d’action pour le logement des personnes défavorisées) seront fusionnés.

I. Accès au logement

Le gouvernement entend développer, en 2013 et tout au long du quinquennat, les passerelles vers le logement. « Seront ainsi renforcées les places en maisons-relais et les solutions en intermédiation locative. ». En 2013, 7 000 places d’intermédiation locative seront par ailleurs créées, en alternative à l’hébergement. Les mesures d’accompagnement vers et dans le logement seront également « étoffées », indique Matignon sans entrer dans le détail.

Parallèlement, le ministère du Logement financera un « appel à projets innovants visant à favoriser l’accès au logement et la prise en charge adaptée des personnes en situation de rupture ». « Le lancement de cet appel à projets constituera un soutien aux expérimentations innovantes menées par les associations sur les territoires », explique le plan.

« Il visera notamment à apporter des solutions aux besoins des femmes victimes de violences, des personnes sortant de prison, des jeunes issus de la protection judiciaire de la jeunesse, des jeunes en grande difficulté et des grands exclus. »

J. Gens du voyage

L’Etat et les collectivités territoriales « seront mobilisés pour le développement des aires d’accueil et l’amélioration de l’accompagnement social des gens du voyage », promet Matignon. Cette mobilisation s’accompagnera d’une réflexion sur le statut juridique de la caravane du point de vue du droit de l’habitat.

D’une façon plus large, une réforme devrait être menée en 2013 quant au statut des gens du voyage, à leur circulation et à l’obligation d’accueil par les communes.

K. Campements illicites

L’accompagnement des personnes habitant des campements ou des squats figure également sur la feuille de route du ministère du Logement. Ainsi, ce dernier « proposera des réponses concrètes et pérennes pour accompagner les personnes qui vivent en situation d’extrême précarité, dans les campements illicites, les bidonvilles et les squats », énonce le plan.

« Tous les efforts devront être faits pour anticiper d’éventuelles décisions de justice requérant l’évacuation des lieux », indique Matignon. Promettant au passage que les associations seront sollicitées et soutenues pour établir en amont des diagnostics individualisés et globaux et rechercher des solutions dans les différents secteurs concourant à l’inclusion des personnes. Enfin, « le montage de projets de sites d’accueil adaptés sera favorisé de manière à multiplier les solutions transitoires avant l’accès à un logement de droit commun ».

IV. SANTÉ ET ACCÈS AUX SOINS

A. Favoriser le recours à une complémentaire santé

1. L’AUGMENTATION DES PLAFONDS DE LA CMU-C ET DE l’ACS

Le gouvernement veut offrir à toutes les personnes vivant sous le seuil de pauvreté (964 € par mois) une aide à la complémentaire santé. A cet effet, il revalorisera de 7 % le plafond de ressources à ne pas dépasser pour l’octroi de la CMU-C à compter du 1er septembre prochain. En conséquence, le plafond de ressources applicable à l’aide à l’acquisition d’une couverture complémentaire santé, égal à celui de la CMU-C majoré de 35 %, sera lui aussi augmenté.

A cette occasion, le panier de soins de la CMU-C sera revu. Ainsi, « le panier optique sera revalorisé [par un arrêté au cours du premier trimestre] pour la prise en charge des verres amincis et de façon à prévoir la prise en charge d’un équipement stéréophonique complet tous les 2 ans ». S’agissant de la revalorisation du panier de soins dentaires, il est « en cours d’étude », un arrêté de revalorisation devant être pris « à la fin du premier semestre 2013 », indique le plan.

2. L’ACQUISITION D’UNE MUTUELLE DE QUALITÉ

Lors du 40e congrès de la Mutualité française en octobre dernier (15), François Hollande a indiqué vouloir généraliser, à l’horizon 2017, l’accès à une couverture complémentaire de qualité. Pour ce faire, une grande concertation sera lancée en ce début d’année avec les organismes complémentaires de santé, précise le plan. Objectif : parvenir à un accord « avant la fin du mois de juin » afin que celui-ci puisse être intégré dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2014. Cet accord devra d’ailleurs prendre en considération les mesures prévues en la matière pour les salariés par l’accord national interprofessionnel du 11 janvier dernier issu des négociations sur la sécurité de l’emploi (16).

B. Lutter contre les inégalités de soins

1. L’INSTAURATION D’UN INDICATEUR DE SUIVI

« La lutte contre les inégalités de soin, dont on connaît la forte corrélation avec les inégalités sociales, est un objectif de santé publique structurant, à court et moyen terme », énonce le plan gouvernemental. Et sera inscrit à ce titre comme une « priorité de la stratégie nationale de santé » (17) et dans la future loi de santé publique. Parallèlement, le document annonce la « publication annuelle d’un indicateur d’inégalités sociales de santé », qui pourrait être choisi parmi les indicateurs suivants : espérance de vie à 35 ans, renoncement aux soins, espérance de vie sans incapacité par catégories socio-professionnelles, sexe et déciles de revenu. La lutte contre les inégalités de soins sera déclinée en objectifs plus précis liés à l’accès aux soins et aux pratiques de prévention des personnes en situation de pauvreté et de précarité.

Dans ce cadre, une attention particulière sera portée aux domaines suivants :

→ santé mentale ;

→ traitement des addictions ;

→ révision des politiques sanitaires pour les personnes détenues ;

→ promotion de l’accès aux soins et prévention en faveur des gens du voyage, à travers la mise en place et le développement de la médiation sanitaire ;

→ santé des personnes en situation de handicap. La mission « Jacob » sur l’amélioration de l’accès aux soins courants de ces personnes devrait formuler des propositions en ce sens d’ici à avril prochain.

2. UN FOCUS SUR LA SANTÉ DES ENFANTS ET DES ADOLESCENTS

L’autre priorité de la future loi de santé publique : la santé des enfants et des adolescents issus de familles pauvres. Un « plan de santé enfant/adolescent/jeunesse » devrait être proposé et prendra en compte les questions de périnatalité et les enjeux sanitaires spécifiques dans les territoires d’outre-mer, indique le plan pluriannuel. Soulignant que « la santé scolaire doit par ailleurs continuer à jouer un rôle majeur dans l’identification des troubles du langage, sensoriels, liés au handicap ou encore des problèmes de santé ». Par ailleurs, en termes de santé dentaire, le nombre de classes en zone d’éducation prioritaire bénéficiant du programme « M’T dents » passera de 700 à 1 400, « ce qui permettra de couvrir près de 80 % des enfants en primaire en territoire d’éducation prioritaire », selon le document.

Les mineurs sous protection judiciaire et suivis par les services de la protection judiciaire de la jeunesse feront aussi l’objet d’une attention particulière, assure le gouvernement. D’ailleurs, le Comité interministériel de la jeunesse qui doit se réunir le 21 février prochain devrait aboutir à des propositions pour une meilleure prise en charge de ce public.

3. LE DÉVELOPPEMENT DES STRUCTURES DE SOINS DE PROXIMITÉ

Pour le gouvernement, la stratégie nationale de santé devra « dynamiser l’implication des structures de premier recours dans l’accès aux soins des plus précaires, en encourageant notamment le regroupement des professionnels de santé à travers le développement des maisons de santé pluriprofessionnelles et des centres de santé », dont le modèle économique devra être en conséquence modernisé. Une mission a d’ailleurs été confiée en ce sens à l’IGAS qui doit rendre ses conclusions en avril prochain.

Toujours pour favoriser l’accès aux soins de proximité, le plan confirme la création de 10 permanences d’accès aux soins de santé supplémentaires (18). Devrait en outre être élaboré au premier trimestre un plan d’amélioration de ces permanences, qui donnera lieu à des instructions aux agences régionales de santé d’ici à la fin du premier semestre.

4. L’ADAPTATION DE LA PRISE EN CHARGE DES SDF

Le plan annonce l’organisation par la ministre des Affaires sociales et de la Santé, Marisol Touraine, d’une conférence de consensus sur le consentement aux soins et le libre-arbitre des personnes sans domicile fixe (SDF). Et la saisine du défenseur des droits afin de relancer la politique de suivi et de lutte contre les refus de soins.

Par ailleurs, l’accès à l’aide médicale de l’Etat devrait être favorisé en simplifiant la prise en charge du tiers-payant par les soignants. Plus globalement, une analyse des freins existants sera effectuée au cours du premier semestre 2013 pour mettre en œuvre des solutions concrètes d’ici à la fin de l’année.

C. Améliorer la coordination de l’offre de soins

D’une façon générale, le gouvernement souhaite « construire une nouvelle approche partenariale de proximité pour l’accès aux soins des personnes en situation de pauvreté ou de précarité ». L’objectif étant de « fédérer, de décloisonner et rendre lisible l’ensemble des dispositifs existants (centres de santé, permanences d’accès aux soins de santé, lits d’accueil médicalisés, “un chez-soi d’abord”…) dans le cadre d’une animation territoriale incluant tous les acteurs de la prévention (santé scolaire, protection maternelle infantile…), du soin et du secteur social ». Pour lui, cette approche devra désormais constituer un volet « important » des programmes régionaux d’accès à la prévention et aux soins. Une concertation entre les ministères de la Santé et de l’Education nationale, les communes et les conseils généraux devra permettre de fixer les contours et le périmètre des engagements possibles des acteurs locaux qu’il conviendra de mettre en œuvre en 2014.

Autre nécessité pour Matignon : « renforcer les démarches “d’aller vers” » en faveur des personnes particulièrement vulnérables (personnes ayant un long passé de vie à la rue, celles souffrant de pathologies psychiques ou celles vivant dans des campements de fortune, des bidonvilles ou des squats). Le plan prévoit donc – sans précision de calendrier – que seront expérimentées des équipes pluridisciplinaires, sanitaires et sociales pouvant aller vers ces personnes « là où elles sont, pour commencer une prise en charge, avant de les amener le cas échéant vers les structures qui leur conviennent ou de mobiliser les réponses adaptées ».

Concernant les personnes détenues, une meilleure coordination des acteurs de la santé est promise via notamment l’« identification de référents ou de conseillers “publics justice” au sein des structures de droit commun ». Une démarche qui devrait permettre une meilleure prise en compte de ces publics dans les procédures d’admission des établissements médico-sociaux. Autre axe de travail : étudier la possibilité de mettre en place des permanences en addictologie dans les établissements pénitentiaires.

V. FAMILLE, ENFANCE ET RÉUSSITE ÉDUCATIVE

A. Définir une nouvelle architecture des prestations familiales

Parce qu’on dénombrait 2,7 millions d’enfants pauvres en 2010 (19), le Premier ministre va demander à Bertrand Fragonard, président délégué du Haut Conseil de la famille, de plancher sur une nouvelle architecture de la politique familiale avec notamment pour objectif de redéployer des prestations vers les familles les plus modestes (familles monoparentales et nombreuses), en particulier l’allocation de soutien familial et le complément familial, dont les montants devraient être augmentés.

En outre, le gouvernement entend permettre un meilleur recouvrement des pensions alimentaires, un objectif qui s’inscrira dans la future convention d’objectifs et de gestion signée avec la CNAF au printemps prochain.

B. Améliorer l’accueil des jeunes enfants

1. SCOLARISER LES MOINS DE 3 ANS

Le gouvernement souhaite augmenter le taux de scolarisation des enfants de moins de 3 ans, en priorité dans les zones d’éducation prioritaire (ZEP) et dans les territoires ultramarins. Une circulaire en ce sens a d’ores et déjà été publiée (20).

L’objectif de cette mesure est non seulement d’assurer l’égalité des chances entre tous les enfants mais aussi de favoriser l’égalité professionnelle entre les hommes et les femmes.

2. FACILITER L’ACCÈS AUX CRÈCHES

La future convention d’objectifs et de gestion de la CNAF comprendra des objectifs dirigés vers la réduction des inégalités sociales et territoriales. Dans ce cadre, l’Etat identifiera les moyens de garantir un accueil en structure collective des enfants vivant sous le seuil de pauvreté. « A terme, la part de ces enfants dans ces structures devra au moins correspondre à la proportion qu’ils représentent parmi les enfants du même âge sur le territoire concerné, avec dans tous les cas un minimum de 10 % », indique le plan. Et, pour atteindre cet objectif, l’Etat favorisera la généralisation des commissions d’attribution des places en crèches ayant recours à des critères sociaux transparents.

Parallèlement, l’Etat encouragera les modes de garde innovants (horaires décalés, multi-accueils…) afin, d’une part, de faciliter les parcours d’insertion et la mobilité des personnes les plus éloignées de l’emploi et de l’accès aux droits et, d’autre part, d’accompagner les personnes en horaires décalés. Dans les ZEP et les territoires ultramarins, les caisses d’allocations familiales devront ainsi entreprendre une « politique active de création de structures adaptées aux besoins des familles, notamment monoparentales, afin de permettre à ces familles d’accéder à l’emploi », a précisé le chef du gouvernement.

3. AMÉLIORER L’ACCÈS AUX CANTINES SCOLAIRES

Le plan affirme que l’accès aux cantines scolaires doit être facilité pour les enfants de familles modestes. En ce qui concerne les écoles du premier degré, il appartient aux communes d’agir. C’est pourquoi le gouvernement travaillera avec l’Association des maires de France pour identifier les moyens de satisfaire les besoins existants au sein des populations les plus fragiles. Pour le second degré, l’Etat mobilisera davantage les fonds sociaux qui permettent d’apporter aux familles démunies le complément nécessaire aux bourses pour le règlement des frais de restauration scolaire. Dans les départements d’outre-mer, il appartiendra aux CAF, qui accompagnent financièrement les communes, de les aider à développer l’offre de restauration scolaire.

C. Favoriser l’accès à l’école

1. POUR LES ENFANTS ISSUS DE CAMPEMENTS OU BIDONVILLES

Afin d’améliorer l’accès à l’école des enfants vivant dans des campements ou des bidonvilles, la ministre déléguée à la réussite éducative, George Pau-Langevin, diffusera une circulaire au cours du premier semestre 2013 rappelant à chacun ses obligations en matière de scolarisation et en particulier :

→ l’obligation faite aux familles d’inscrire leurs enfants à l’école et de veiller à leur assiduité ;

→ l’obligation pour le maire d’inscrire tous les enfants de la commune, sans distinction de nationalité. Des instructions sur la scolarisation des enfants allophones nouvellement arrivés et des enfants issus de familles itinérantes et de voyageurs ont d’ailleurs été récemment diffusées (21), rappelle le plan ;

→ le rôle du maire d’interpeller le directeur des services académiques en cas de manque de places.

2. POUR LES ENFANTS SUIVIS PAR LA PJJ

De son côté, la chancellerie devra veiller à la réussite éducative des mineurs suivis par les services de la protection judiciaire de la jeunesse (PJJ), l’objectif étant, selon le plan, de « pouvoir évaluer, remobiliser, puis accompagner le mineur dans son accès à un statut de droit commun (élève, apprenti, stagiaire de la formation professionnelle) ». Une démarche qui doit s’appuyer sur une prise en charge dans le cadre de dispositifs ayant vocation à être transitoires (unités éducatives d’activité de jour de la PJJ, classes-relais de l’Education nationale).

D. Mieux accompagner les parents et les jeunes en difficulté

1. LA CRÉATION D’UN STATUT DE CENTRE PARENTAL

Afin de prévenir les ruptures familiales, le gouvernement va donner une base légale aux centres parentaux, actuellement expérimentés (22), pour leur permettre d’accueillir des mères seules avec enfant et des couples avec enfant. Cette mesure devrait être intégrée au projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2014 ou à la future loi sur la famille.

2. LE SUIVI DES JEUNES SORTANT DE L’ASE

Le ministère délégué à la famille lancera, à une date non précisée, une réflexion sur la prise en charge des jeunes majeurs de 18 à 21 ans sortant de l’aide sociale à l’enfance (ASE), en particulier les mineurs étrangers isolés. Ce, avant d’envisager la modification de l’article L . 222-5 du code de l’action sociale et des familles prévoyant les modalités de prise en charge de l’ASE. Objectif : lutter contre les risques d’exclusion sociale auxquels ils peuvent être confrontés.

3. LA PRISE EN CHARGE DES MINEURS ETRANGERS ISOLÉS

Il est demandé au ministère de la Justice d’améliorer la prise en charge des mineurs étrangers isolés, qui pose de gros problèmes à certains départements « dans l’impossibilité matérielle de répondre [à leur] besoin de protection ». Des travaux en ce sens ont d’ores et déjà été engagés avec l’Assemblée des départements de France pour redéfinir les conditions d’accueil et d’accompagnement de ces mineurs, rappelle le plan.

En outre, « la prise en charge des mineurs étrangers isolés se traduit par une pression réelle en matière de formation, cette dernière étant liée aux conditions de régularisation du séjour du mineur devenu majeur », relève le gouvernement, qui propose la mise en place de dispositifs adaptés de formation permettant de répondre à cette problématique, tant en termes d’acquisition de la langue française que d’intégration professionnelle.

Enfin, la chancellerie devra proposer une prise en charge sanitaire spécifique aux mineurs étrangers isolés.

VI. INCLUSION BANCAIRE ET LUTTE CONTRE LE SURENDETTEMENT

Parmi les mesures du plan relatives à l’inclusion bancaire et à la lutte contre le surendettement, une première série vise à prévenir les difficultés des ménages modestes. La seconde à accompagner les personnes et les familles en situation de fragilité financière. Certaines figurent déjà dans le projet de loi de séparation et de régulation des activités bancaires, présenté en conseil des ministres le 19 décembre dernier (23).

A. Prévenir les difficultés des ménages modestes

La Banque de France l’a souligné dans plusieurs rapports : une meilleure connaissance des processus menant au surendettement des ménages ainsi qu’un meilleur suivi des effets des procédures de résolution existantes permettraient de rendre plus efficace la politique de prévention et de résolution du surendettement menée par les pouvoirs publics. Une enquête « à la fois qualitative et quantitative » sera donc lancée en février prochain, sous l’égide de la Banque de France, afin de combler ce manque de connaissances, indique le plan. Cette étude sera menée par un comité scientifique, regroupant plusieurs experts, et rendra ses travaux en février 2014. En outre, indique le document, la loi de séparation et de régulation des activités bancaires créera un observatoire de l’inclusion bancaire chargé de suivre les pratiques des établissements bancaires à l’égard, en particulier, des populations en situation de fragilité financière, notamment en termes d’offre de services (modes de paiements alternatifs…).

Le ministère de l’Economie et des Finances compte par ailleurs créer un dispositif de prévention et d’accompagnement des personnes connaissant des difficultés financières, reposant notamment sur la mise en place par toutes les banques de mécanismes de détection et de traitement précoce des difficultés de leur clients. Matignon indique que de tels mécanismes devraient également être mis en œuvre chez d’autres catégories de créanciers comme les bailleurs sociaux, les fournisseurs d’énergie ou les opérateurs téléphoniques par exemple.

Les services du Premier ministre ont par ailleurs confirmé que la création d’un registre national des crédits aux particuliers – qui ne fait pas l’unanimité – sera intégrée à la prochaine loi sur la consommation, prévue pour le deuxième trimestre 2013.

Enfin, le gouvernement souhaite aussi lutter contre l’accumulation des frais bancaires. Les services du Premier ministre rappellent à cet égard que plusieurs mesures visant à réduire cette charge financière sont prévues dans le projet de loi de séparation et de régulation des activités bancaires.

D’autres mesures seront expertisées. Ainsi, « une réflexion sera engagée pour un abaissement des plafonds réglementaires applicable aux frais en matière d’incident de paiement, ainsi que pour l’établissement d’un plafond pour les frais facturés par la banque en cas d’un avis à tiers détenteur ou d’une saisie ».

Matignon indique également que « le regroupement en un seul prélèvement mensuel du paiement des frais pour incident dus au titre des opérations réalisées dans le mois, doit être étudié ». « Il pourrait contribuer à réduire l’accumulation des incidents engendrés par le prélèvement au fil de l’eau des frais pour incident eux-mêmes. » Il pourrait toutefois aussi « conduire à des tensions sur le solde du compte en fin de mois ». « La mesure doit notamment être examinée à l’aune des pratiques des ménages concernés qui sont souvent réticents au débit différé pour des raisons liées au mode de gestion de leur compte. »

B. Accompagner les personnes en situation de fragilité financière

Le gouvernement entend développer une politique d’accompagnement des personnes en situation de fragilité financière. Au-delà des mesures prévues dans le projet de loi de séparation et de régulation des activités bancaires visant à renforcer, pour les personnes en grande difficulté sociale, le « droit au compte », il prévoit notamment, dans cette optique, de créer un réseau de « points conseils budget ».

« Ces points d’accueil, qui pourraient être mis en place conjointement par les réseaux bancaires, les associations, les collectivités locales et les services déconcentrés de l’Etat, doivent permettre aux personnes connaissant des difficultés de bénéficier de conseils, d’une orientation vers les structures compétentes et, le cas échéant, d’une médiation avec leurs créanciers », explique Matignon. « Le réseau constituerait à la fois un moyen d’accompagner les personnes connaissant des difficultés en tant que “tiers de confiance” mais également permettrait d’assurer l’accueil de premier niveau des personnes surendettées en s’efforçant de les orienter au plus vite vers la Banque de France pour qu’une procédure de surendettement puisse se déclencher le plus tôt possible. » Il pourrait également assurer l’accompagnement des personnes surendettées qui redéposent un dossier de surendettement après une procédure de rétablissement personnel.

Concrètement, un groupe de travail va être mis en place afin d’établir une cartographie des initiatives locales et de proposer des recommandations opérationnelles, tant en termes de structuration du réseau que de formation des conseillers mobilisés. Ce groupe devra remettre ses conclusions d’ici à la fin 2013, afin de lancer la mise en place des points conseils budget « en 2014 si possible ». « Une attention particulière sera accordée à l’accueil des femmes qui constituent 56 % de l’ensemble des débiteurs et codébiteurs et 40 % des ménages surendettées », précise le plan.

En parallèle, un autre groupe de travail sera « prochainement installé » sous l’égide du comité consultatif du secteur financier et en lien avec le ministère de l’Education nationale, afin de plancher sur les moyens de promouvoir à l’échelle nationale l’éducation budgétaire et l’apprentissage des outils bancaires. L’idée étant de « diffuser les connaissances minimales permettant à toute personne d’utiliser au mieux un compte bancaire, des moyens de paiement et des crédits ».

Enfin, Matignon indique qu’une série de mesures sont envisagées pour

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