En vigueur depuis 2010, le marché de l’assistance juridique aux étrangers placés en centre de rétention administrative (CRA), actuellement décomposé en huit lots et confié à cinq associations (1), arrive à son terme au 31 décembre 2012. Un nouvel appel d’offres a donc été publié le 8 décembre (2) pour choisir les organismes qui seront habilités à apporter leur aide aux personnes retenues à partir du 1er mars 2013 et jusqu’au 31 décembre 2013 (3).
Lié à l’appel d’offres, le « cahier des clauses techniques particulières » relatif au marché détaille notamment les prestations qui seront demandées aux candidats retenus par le ministère de l’Intérieur, à savoir les prestations d’accueil, d’information et de soutien pour permettre aux étrangers retenus d’exercer leurs droits. Il fixe également les obligations des associations habilitées à l’égard de l’administration. Un autre document lié à l’appel d’offres, le « cahiers des clauses administratives particulières » porte – entre autres – sur le versant financier du marché. Il y est question notamment des moyens alloués à l’assistance aux étrangers retenus. Dans une première version, il y était aussi fait référence à des pénalités appliquées aux organismes en cas de non-respect de leurs engagements contractuels.
Plusieurs dispositions de ces cahiers ont fait bondir les associations de défense des droits des étrangers. Au point de pousser le ministère de l’Intérieur à modifier sa copie. Une clause prévoyait ainsi une pénalité de 500 € en cas notamment de « non-respect du principe du devoir de réserve et de l’obligation de discrétion ». Et une autre de 200 € en cas d’« information tardive du chef du CRA sur le dépôt d’un recours ayant eu des conséquences dommageables pour l’administration » ou bien encore en cas d’affichage et de diffusion au sein du centre de documents mettant en cause cette dernière.
Dans une note portant modification des documents liés à l’appel d’offres, le ministère de l’Intérieur indique que les pénalités prévues dans le cahiers des clauses administratives particulières sont supprimées. Il réécrit par ailleurs complètement la partie du cahiers des clauses techniques particulières consacrée aux obligations des associations habilitées.
Il n’est ainsi plus fait référence à la notion un peu abstraite d’« obligation de discrétion » ou de devoir de réserve. Le ministère de l’Intérieur se veut plus précis. L’association qui, « à l’occasion de l’exécution du marché, a reçu communication à titre secret ou confidentiel de renseignements, documents ou objets quelconque, est tenu de maintenir secrète ou confidentielle cette communication », indique la note. Ces renseignements, documents ou objets ne peuvent, sans autorisation, être communiqués à d’autres personnes que celles qui ont qualité pour en connaître. « Il en est pareillement de tout renseignement de même nature parvenu à la connaissance de [l’organisme] à l’occasion de la livraison, de la fourniture ou de l’exécution du service. »
Toutefois, précise le ministère, ces dispositions n’empêchent nullement l’association, avec l’accord exprès de l’intéressé :
→ d’avoir des communications avec les proches d’un étranger retenu afin d’assurer dans les meilleures conditions sa mission ;
→ de rendre publiques des informations sur la situation individuelle d’un étranger retenu ;
→ d’échanger des informations avec les autres personnes morales responsables de la même mission dans d’autres CRA, notamment pour assurer un suivi de certains dossiers individuels et/ou une coordination.
Ces dispositions n’empêchent pas non plus l’association d’exprimer des opinions, critiques et propositions d’ordre général dans ses publications et ses communications ou dans des publications ou communications communes avec d’autres personnes morales responsables de la même mission dans d’autres centres de rétention.
Le ministère demande en revanche aux organismes de respecter les obligations et règles de vie résultant de la vocation des CRA. Ainsi, rappelle-t-il :
→ le règlement intérieur en vigueur s’impose à toutes les personnes intervenant au sein des établissements ;
→ le représentant de l’association doit se soumettre à l’obligation d’inscription au registre de présence ou au contrôle informatisé des présences ;
→ les personnes intervenant dans le CRA ne sont pas autorisées à permettre l’entrée au sein de l’établissement d’une personne « ne faisant pas état de ses qualités professionnelles et soumises à une autorisation préalable ».
Tout manquement à ces obligations donnera lieu à un avertissement. Au-delà de deux avertissements, l’agrément délivré à l’intervenant pourra être retiré. Enfin, le ministère demande que le dépôt d’un recours fasse l’objet d’une information du chef du CRA en vue de garantir le caractère suspensif dudit recours.
La date limite de remise des offres avait été fixée au 3 janvier. Elle est reportée au 11 janvier 2013.
A noter : l’appel d’offres avait suscité d’autres réserves de la part des associations, en particulier sur le tarif de leur rémunération. Le rectificatif du ministère de l’Intérieur ne change rien à ce sujet mais il s’agit d’un marché négocié et, selon la Place Beauvau, « les discussions sont ouvertes ».
(1) L’Assfam, la Cimade, Forum réfugiés, France terre d’asile et l’Ordre de Malte France.
(2) Avis n° 12-234613 publié le 8 décembre 2012 au Bulletin officiel des annonces de marchés publics n° 238B, annonce n° 195.
(3) L’appel d’offres ne couvre qu’une période transitoire, en marge d’une réflexion sur la rétention et ses alternatives qui doit s’ouvrir au premier semestre 2013.