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De nouveau d’actualité, le « fichier positif » divise toujours

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Le Premier ministre a sans doute un peu surpris en annonçant le 11 décembre, en clôture de la conférence de lutte contre la pauvreté et pour l’inclusion sociale (1), le projet de créer un registre national des crédits aux particuliers à l’occasion de la prochaine loi sur la consommation, prévue pour le deuxième trimestre 2013. Objectif : recenser pour chaque emprunteur les crédits en cours afin de faciliter l’examen par l’organisme prêteur de leur solvabilité, et ainsi prévenir les situations de surendettement.

L’idée divise de longue date la classe politique et les associations. Si bien que la loi « Lagarde » du 1er juillet 2010 portant réforme du crédit à la consommation avait renvoyé la mise en œuvre du dispositif, plébiscité par nombre d’organisations de lutte contre l’exclusion mais contestée par la Fédération bancaire française, aux conclusions d’un rapport réalisé par un comité de préfiguration, remis en septembre 2011 (2). Au final, l’ancien gouvernement avait argué des réserves de la CNIL (Commission nationale de l’informatique et des libertés) pour reporter le dossier sine die (3). Benoît Hamon, ministre délégué chargé de la consommation, a lui-même exprimé des réticences avant de se ranger à l’avis de Matignon.

Il lui revient désormais – à travers le texte qui sera présenté au Parlement – de convaincre les détracteurs du dispositif, qui craignent une mesure inefficace, très complexe, coûteuse et des risques d’intrusion dangereux pour les libertés publiques. « Présenté comme le remède au surendettement, ce registre national des crédits sera loin de remplir ce rôle », estime l’association de consommateurs CLCV (Consommation, logement et cadre de vie). Pour elle, le phénomène n’est pas, en majorité, dû « au recours excessif au crédit – les prêts n’étant d’ailleurs pas consentis aux ménages ayant de faibles revenus – mais aux charges de la vie courante, aux accidents de la vie et à la précarité de la situation professionnelle ou à la situation familiale ». La fédération française des associations Crésus voit au contraire dans le montant moyen des dossiers de surendettement (près de 40 000 €) la conséquence directe de l’absence de « fichier positif ». La CLCV craint, par ailleurs, que l’instauration du dispositif conduise « à ficher des millions de personnes qui ont recours au crédit et qui ne rencontrent aucune difficulté pour le rembourser ». Elle demande au gouvernement de revoir sa position, jugeant que les mesures issues de la « loi Lagarde » – encadrement du crédit renouvelable et renforcement des obligations d’information des prêteurs notamment –, ainsi que l’évolution du FICP (fichier national des incidents de remboursement des crédits aux particuliers), sont à même d’améliorer les conditions du crédit à la consommation.

L’UNAF (Union nationale des associations familiales) se réjouit, en revanche, d’une décision « courageuse ». Cet outil contribuera à une meilleure responsabilisation du prêteur comme de l’emprunteur, explique-t-elle. Réclamée par ­François Soulage, président du Secours catholique, dans le rapport du groupe du travail qu’il a piloté en amont de la conférence contre la pauvreté, l’instauration du dispositif nécessite néanmoins de prolonger les réflexions sur le sujet. « Le rapport demande, a minima, de reprendre les conclusions du comité de préfiguration, précise Alain Bernard, responsable de l’emploi et de l’économie solidaire au Secours catholique. Il faudra néanmoins repréciser la question de l’identifiant à utiliser [le comité s’était appuyé sur un système sécurisé dérivé du NIR, soit le numéro de sécurité sociale] et du chiffrage, sachant que les coûts évités n’ont pas encore été étudiés. Il s’agit aussi de s’entendre sur le périmètre. Les associations et certains établissements bancaires ne souhaitent inclure que les crédits bancaires, même si l’on doit avoir une lecture plus large de l’endettement dans le cadre du dialogue, notamment à travers les “points conseils budgets” préconisés et retenus par le gouvernement. » Chacun s’accorde en effet à dire qu’une politique de prévention efficace doit forcément passer par l’information, l’accompa­gnement et l’orientation des ménages.

Notes

(1) Voir ASH n° 2787 du 14-12-12, p. 5.

(2) Voir ASH n° 2733 du 18-11-11, p. 9.

(3) Une proposition de loi prévoyant la création de ce fichier, déposée par le député Jean-Christophe Lagarde (Nouveau Centre), a été rejetée en première lecture à l’Assemblée nationale le 26 janvier dernier.

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