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Le gouvernement adopte un plan renforçant la protection des femmes victimes de violences

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Alors qu’il n’avait pas été convoqué depuis plus de 12 ans, le comité interministériel aux droits des femmes et à l’égalité entre les femmes et les hommes s’est réuni le 30 novembre, préparé par Najat Vallaud-Belkacem, ministre des Droits des femmes, sous la houlette du Premier ministre. Pour le gouvernement, la convocation de ce comité constitue une « nouvelle étape dans l’élaboration d’une troisième génération des droits des femmes ». Dorénavant, a assuré Jean-Marc Ayrault, le comité interministériel se réunira chaque année. Cette rencontre a permis de prendre une « série de mesures immédiates et fortes », en particulier en matière de violences faites aux femmes. Au-delà de ce plan global censé mieux les accompagner et les informer, le gouvernement lancera une vaste campagne d’information en début d’année prochaine. Quant aux dispositions législatives nécessaires à la mise en œuvre de certaines mesures annoncées, elles figureront dans un projet de loi-cadre sur les droits des femmes qui sera présenté « avant l’été prochain », a précisé la ministre des Droits des femmes en conseil des minitres, le 5 décembre.

Améliorer l’accueil et l’information des femmes

Alors qu’il existe aujourd’hui plusieurs numéros nationaux d’appel, le gouvernement entend simplifier l’accès à l’information des femmes victimes de violences en créant une plateforme commune d’accueil téléphonique d’ici à la fin 2013.

Autre objectif pour la ministre des Droits des femmes : « construire un véritable parcours qui sécurise les femmes dès que la violence est repérée jusqu’à ce que le cycle cesse pour de bon ». Une « politique intégrée d’accueil et d’accompagnement » des femmes victimes de violences va donc être mise en œuvre et consistera notamment en :

→ la transmission systématique aux parquets des copies de mains courantes faisant état de violences faites aux femmes ;

→ afin d’améliorer l’accueil dans les services de police, l’établissement d’un réseau avec l’ensemble des services sociaux et des associations d’aide aux victimes ;

→ la poursuite du déploiement des intervenants sociaux et des référents pour ces femmes dans les services de police (1).

Sur cette base, un schéma d’organisation départemental (conditions d’intervention des différents acteurs, modalités d’échanges des informations entre services de police et hospitaliers…) devra être élaboré dans chaque département dans le cadre des conseils départementaux de prévention de la délinquance. Pour que tout cela fonctionne, l’accent sera mis sur la formation des différents acteurs, une formation aujourd’hui « majoritairement le fait d’initiatives ponctuelles et locales, souvent d’associations ou des services déconcentrés du ministère des Droits des femmes », constate Najat Vallaud-Belkacem. Aussi demandera-t-elle au futur Observatoire national des violences de définir le cahier des charges de ces formations pluridisciplinaires sur la base duquel elle entend élaborer un plan de formation de l’ensemble des professionnels.

Les ministres de la Justice et des Droits des femmes entendent également prendre des dispositions pour « réactiver » l’ordonnance de protection (2). A l’heure actuelle, « elle se déclenche lentement, plus de trois semaines [après avoir été demandée] alors que ses initiateurs la voulait prise sous 48 heures », déplore Najat Vallaud Belkacem. Toujours afin de protéger les victimes, le « Téléphone grand danger » (3), actuellement expérimenté, sera généralisé en 2013. Quant à l’expérimentation du bracelet électronique, dont la mise en œuvre ne peut être imposée qu’aux auteurs de faits passibles de cinq ans de prison, elle sera supprimée dans la mesure où le dispositif « n’est quasiment pas utilisé ».

Le gouvernement a également annoncé son intention de créer un délit de contrainte au mariage et un délit d’incitation à subir une mutilation génitale.

Plus globalement, le gouvernement invite les départements à mettre en place en leur sein un observatoire des violences faites aux femmes – un seul existant à l’heure actuelle, dans la Seine-Saint-Denis. Au-delà, il souhaite créer une mission interministérielle pour la protection des femmes victimes de violences, dont les objectifs seront, entre autres, de réunir et de publier les statistiques et les études en la matière, ou encore d’organiser l’animation locale de la politique menée et de diffuser les innovations.

Réserver des places d’hébergement d’urgence pour les victimes

Pour pouvoir mettre les victimes à l’abri, le gouvernement a indiqué que, sur les 5 000 places d’hébergement d’urgence qui vont être créées durant le quinquennat, près d’un tiers sera réservé aux femmes victimes de violences.

En outre, pour faciliter l’accès au logement pérenne lorsque la victime est contrainte de quitter le domicile conjugal, une circulaire adressée aux préfets viendra « lever les obstacles administratifs et les pratiques qui constituent des freins à l’accès au parc social des femmes victimes de violence. La question de la désolidarisation des dettes de loyer y sera abordée. » A noter : dans la perspective du plan de lutte contre la pauvreté et pour l’inclusion sociale, dont les grandes lignes doivent être présentées le 11 décembre, le gouvernement examinera les moyens permettant de tenir compte de la situation des femmes victimes de violences dans le calcul des droits au revenu de solidarité active.

Organiser la prise en charge des auteurs de violences

Des programmes de prise en charge des auteurs de violences intrafamiliales et conjugales devraient être par ailleurs développés par les services pénitentiaires d’insertion et de probation sous la forme de groupes de paroles collectifs. D’autres mesures devraient être décidées en février prochain dans le cadre de la conférence de consensus sur la prévention de la récidive (4).

La garde des Sceaux rappellera aussi aux parquets et aux autorités judiciaires la possibilité de recourir de façon « plus systématique » à la mesure d’éviction du conjoint violent du domicile conjugal, une mesure elle aussi très peu utilisée (13,7 % en 2011).

RÉDUIRE LES INÉGALITÉS EN MATIÈRE DE SANTÉ

Le comité interministériel aux droits des femmes du 30 novembre a également décidé de « placer la réduction des inégalités entre les femmes et les hommes au cœur de la démocratie sanitaire ». Il s’agira entre autres de renforcer la prévention des maladies sexuellement transmissibles, du surpoids chez les femmes les plus à risque et des addictions, en particulier celles liées à l’alcool et au tabac dont les consommations se développent plus rapidement chez les femmes, notamment chez les jeunes filles. En outre, devront être améliorés le dépistage des cancers pour les catégories sociales les plus défavorisées ainsi que la détection et la prise en charge de la dépression que les femmes subissent deux fois plus que les hommes.

Rappelons que, en matière de sexualité, le gouvernement a amélioré l’accès pendant l’été des centres d’interruptions volontaires de grossesse (IVG) (5). Dans le cadre de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2013, il a aussi fait adopter des dispositions permettant le remboursement à 100 % de l’IVG et de la contraception des mineures (voir ce numéro, page 36). Le gouvernement entend aussi demander à la Haute Autorité de santé de plancher sur la façon d’améliorer l’efficience de la contraception.

Notes

(1) Cette action sera financée par le Fonds interministériel de prévention de la délinquance – Sur ses orientations 2013, voir ASH n° 2783 du 16-11-12, p. 13.

(2) Elle vise à stabiliser temporairement, pour une durée de quatre mois au maximum, ou pendant toute la procédure de divorce ou de séparation de corps, la situation juridique et matérielle de la victime en garantissant sa protection et en organisant provisoirement sa séparation d’avec l’auteur des violences.

(3) Il s’agit de remettre à des femmes en très grand danger, séparées d’un conjoint violent dans la plupart des cas, un téléphone portable leur permettant d’appeler à l’aide et d’être en cas de besoin secourues au plus vite.

(4) Voir ASH n° 2775 du 21-09-12, p. 13.

(5) Voir ASH n° 2768 du 13-07-12, p. 13.

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