« Chaque année, le défenseur des droits est saisi d’une dizaine de réclamations de la part des enfants ou de leurs parents concernant l’audition de l’enfant devant le juge aux affaires familiales [JAF] », souligne Dominique Baudis dans une récente décision adressée à la ministre de la Justice (1) et dans laquelle il demande à Christiane Taubira de « rappeler par tous moyens » les règles applicables en la matière.
Conformément à l’article 388-1 du code civil, le mineur peut être entendu par le juge dans toute procédure qui le concerne dès lors qu’il est capable de discernement, rappelle le défenseur des droits. Cette audition est de droit lorsque le mineur en fait la demande. Etant précisé que, selon un décret du 20 mai 2009 (2), le refus par le juge d’auditionner l’enfant doit être motivé et ne peut être fondé que sur l’absence de discernement ou par le fait que la procédure ne concerne pas l’enfant. Le magistrat est donc tenu, dans un premier temps, d’évaluer le discernement, entendu communément comme « l’aptitude de l’esprit à juger clairement et sainement des choses », mais non défini par la loi. Pour Dominique Baudis, les juges doivent faire une appréciation au cas par cas en tenant compte à la fois de l’âge, de la maturité, du degré de compréhension et du contexte dans lequel évolue l’enfant. Cette évaluation nécessite un premier contact avec l’enfant et doit donc avoir lieu avant l’audition. Le juge a la possibilité d’entendre lui-même le mineur dans le cadre d’une audition préalable ou de s’en remettre à une enquête sociale ou à une expertise psychologique. Or le défenseur des droits constate que les magistrats ne sont pas formés spécifiquement à l’évaluation du discernement et que le recours aux expertises ne peut pas être systématique. C’est pourquoi il demande à la garde des Sceaux de développer la formation des juges en la matière.
Par ailleurs, le refus d’audition du mineur, quel que soit le motif – procédure ne concernant pas l’enfant, absence de discernement, audition contraire à l’intérêt supérieur de l’enfant –, doit être motivé « de manière explicite et concrète ».
Christiane Taubira dispose d’un délai de deux mois pour faire connaître au défenseur des droits les suites qu’elle donnera à ces recommandations.
(1) Décision n° MDE-2012-158 du 13 novembre 2012 – Disponible sur
(2) Voir ASH n° 2611 du 29-05-09, p. 16.