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Mariage homosexuel : le projet de loi ouvre une série de nouveaux droits, dont l’adoption

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Le projet de loi ouvrant le mariage aux couples de même sexe a été présenté le 7 novembre en conseil des ministres par la ministre de la Justice. Ce texte, qui constitue la première grande réforme sociétale du quinquennat, concrétise l’engagement de campagne du président de la République d’ouvrir le mariage et l’adoption aux couples homosexuels. Il rencontre une vive opposition politique et religieuse mais ne va pas assez loin pour les associations homosexuelles, qui souhaitent notamment l’ouverture de la procréation médicalement assistée (PMA) aux couples de femmes.

Oui à l’adoption

Pour le Premier ministre, Jean-Marc Ayrault, cette réforme est « une décision de justice et d’égalité, qui prend acte de l’évolution de notre société ». Une évolution qui s’est traduite pour la première fois dans les textes en 1999 avec le pacte civil de solidarité (PACS). Ce dispositif, même s’il a été « significativement » rapproché du mariage, ne répond pas suffisamment aux attentes des couples de même sexe, souligne l’exposé des motifs du projet de loi.

La conséquence la plus médiatisée de l’ouverture du mariage aux couples de même sexe est l’ouverture automatique de l’adoption dans les mêmes conditions que les couples hétérosexuels (obtention d’un agrément auprès du conseil général…). Mais ce nouveau droit risque de rester très théorique face au contexte de l’adoption nationale et internationale et compte tenu du fait que la majorité des pays étrangers interdisent l’adoption par des couples homosexuels (1). La possibilité d’adopter l’enfant du conjoint va en revanche, dans la pratique, permettre de sécuriser juridiquement la situation des familles homoparentales (2), plus particulièrement dans les cas de séparation du couple ou de décès du parent biologique.Jusqu’à présent, l’adoption de l’enfant par le partenaire n’est pas possible au sein d’un couple non marié, et donc au sein d’un couple homosexuel, dans la mesure où elle revient à priver le père ou la mère de l’enfant de l’autorité parentale, cette règle pouvant toutefois faire l’objet d’appréciations divergentes par les tribunaux (3).

Autre conséquence du texte: l’accès des conjoints homosexuels aux mêmes droits ou avantages qui découlent du mariage, et notamment divers droits sociaux, tels que l’ouverture du droit à une pension de réversion ou à une pension d’invalidité de veuf ou de veuve, la majoration de durée d’assurance retraite, le congé d’adoption… S’agissant du congé de paternité, signalons que la question de l’ouverture aux couples homosexuels a été anticipée dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2013, en cours d’examen au Parlement, un amendement prévoyant en effet de le transformer en congé de paternité et d’accueil de l’enfant. Les règles relatives au divorce, aux successions, au droit au séjour pour le conjoint étranger ou encore à l’acquisition de la nationalité par mariage sont également impactées par le projet de loi.

De nombreuses dispositions de coordination dans les différents codes sont prévues. Etant précisé que les mots « père et mère » ne sont remplacés par le mot « parent » et les mots « mari et femme » par le mot « époux » que lorsque cela est strictement nécessaire. Les actes d’état civil et le livret de famille, dont la forme n’est pas régie par la loi, devraient être adaptés dans un second temps.

A noter: le texte prévoit également la reconnaissance en France des mariages homosexuels célébrés à l’étranger avant l’entrée en vigueur de la loi.

Non à la PMA

D’autres questions comme la procréation médicalement assistée, l’autorité parentale ou l’adoption conjointe pour les couples non mariés ne figurent pas dans le projet de texte mais pourraient être abordées dans « une loi complémentaire qui pourrait être une loi sur la famille, qui permettra de poursuivre le débat », a indiqué le Premier ministre. La gestation pour autrui n’est pas non plus à l’ordre du jour, le président de la République s’y étant déjà déclaré défavorable. De leur côté, la ministre des Affaires sociales et la ministre déléguée chargée de la famille se sont déclarées favorables, à titre personnel, à l’ouverture de la PMA aux couples de femmes, appelant le Parlement à enrichir le texte. Des députés socialistes ont d’ailleurs déjà annoncé leur intention de déposer des amendements en ce sens. La question du statut du beau-parent et des droits des tiers pourrait également être abordée.

Tandis que les opposants à la réforme ont réclamé des états généraux ainsi qu’un référendum sur le sujet, l’Assemblée nationale a décidé de décaler de un mois l’examen du projet de loi pour donner plus de temps au débat. La discussion devrait ainsi débuter le 29 janvier. Le 8 novembre, la commission des lois a entamé un travail d’auditions qui se poursuivra jusqu’au 20 décembre. Le ministère de la Justice a quant à lui prévu de constituer un groupe de travail commun avec l’Association des maires de France, après avoir reçu ses représentants le 7 novembre (4).

Notes

(1) Fin 2010, l’Observatoire national de l’enfance en danger relevait près de 25 000 agréments en vue d’adoption en cours de validité pour environ 2 300 enfants adoptables en France. De son côté, le service de l’adoption internationale du ministère des Affaires étrangères a comptabilisé environ 3 500 adoptions internationales en 2010, un chiffre tombant à un peu moins de 2000 l’an dernier. « Ce chiffre devrait s’avérer inférieur pour l’année 2012 », estime en outre l’étude d’impact du projet du loi.

(2) « Selon une étude de l’Institut national des études démographiques, entre 25 000 à 40 000 enfants seraient élevés actuellement en France par des couples du même sexe », relève l’étude d’impact. « Cette évaluation est cependant contestée par les associations de familles homoparentales qui évaluent à 300 000 le nombre de familles concernées. »

(3) En dernier lieu, la Cour européenne des droits de l’Homme, dans une affaire concernant la France, a jugé que refuser à l’un des membres d’un couple homosexuel d’adopter l’enfant de l’autre n’est pas discriminatoire.En revanche, la Cour de cassation a validé un jugement américain prononçant l’adoption par une femme homosexuelle de l’enfant de sa compagne, l’une et l’autre exerçant l’autorité parentale sur l’enfant.Rappelons par ailleurs que, dès 2006, la Cour de cassation a admis que l’autorité parentale détenue par un seul parent peut être déléguée à une personne de même sexe avec laquelle il vit en union stable et continue – Voir ASH n° 2445 du 3-03-06, p. 18, n° 2668-2669 du 16-07-10, p. 15, et n° 2752 du 23-03-12, p. 14.

(4) Il s’agira notamment d’aborder la question de la clause de conscience des maires, certains ayant assuré qu’ils refuseraient de célébrer des mariages homosexuels.

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