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Naturalisations : un rapport plaide pour une « doctrine ministérielle » plus souple et transparente

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Refonder l’accès à la nationalité française sur des « critères clairs, justes et transparents ». Et réformer la gestion politico-administrative de la nationalité en revenant, en particulier, sur la déconcentration des procédures. Telles sont, pour le député (PS) Patrick Mennucci, les deux grandes pistes à suivre pour enrayer la chute brutale des naturalisations enregistrée ces deux dernières années à la suite du durcissement de l’accès à la nationalité opéré en catimini par le gouvernement précédent. C’est ce qu’il affirme dans un avis rendu public le 31 octobre dernier, présenté dans le cadre de l’examen à l’Assemblée nationale du projet de loi de finances pour 2013 (1).

Un durcissement opéré « dans l’opacité »

Selon Patrick Mennucci, c’est « la hausse sans précédent sous la ve République du taux de décisions négatives [qui] explique la baisse des naturalisations ». Ainsi, alors qu’un peu plus de deux demandes sur dix étaient rejetées au cours de la décennie 2000, plus de cinq sur dix l’ont été en 2011 et au premier semestre 2012. Or, pour le député, ce phénomène résulte directement d’un durcissement de l’appréciation des critères de naturalisation par l’administration. Un durcissement de la « doctrine ministérielle » qui s’est opéré « dans l’opacité la plus complète », par le biais d’instructions confidentielles adressées aux préfectures, sous la forme de « fiches “blanches” » sans en-tête, ni signataire ou même de courriers électroniques, dénonce-t-il. Patrick Mennucci s’est notamment procuré deux documents, une « fiche d’aide à la décision » concernant la ligne à adopter au sujet de l’insertion professionnelle et un simple mail restreignant considérablement les possibilités de naturalisation en cas de séjour irrégulier passé, même très ancien.

Le parlementaire estime, en outre, que les effets de ce durcissement ont « vraisemblablement été amplifiés par la déconcentration des procédures de naturalisation », après un décret du 29 juin 2010 (2). Auparavant, les demandes de naturalisation étaient d’abord instruites par les préfectures, puis l’avis motivé, favorable ou défavorable, du préfet était transmis au ministre chargé des naturalisations. Mais, depuis le décret, les décisions défavorables sont prises directement par les préfets. Seules les décisions favorables continuent d’être prises après une double instruction, à l’échelon déconcentré puis au niveau central. Pour le député, il ne fait aucun doute que cette réforme, présentée comme destinée à réduire les délais, a eu un impact sur le taux de décisions défavorables.

Vers une nouvelle organisation pour l’examen des dossiers ?

De ce constat d’ensemble, Patrick Mennucci tire plusieurs recommandations. Une première série, visant notamment à assouplir les critères de la naturalisation relatifs à l’insertion professionnelle et la régularité du séjour, a d’ores et déjà été prise en considération par Manuel Valls, dans une circulaire récente (3). Plus globalement, il préconise également que « toute instruction ministérielle ayant pour effet de modifier substantiellement l’appréciation par l’administration des critères de naturalisation soit désormais opérée par la voie d’une circulaire, évidemment publiée ».

Au-delà, Patrick Mennucci estime qu’il faudrait réformer, sur certains aspects, la gestion politico-administrative de la nationalité. Deux pistes sont envisageables, à ses yeux. L’une consisterait à confier la préparation des décisions favorables – et non plus des décisions négatives – aux préfets, les autres continuant à faire l’objet d’une instruction par l’administration centrale. L’autre option consisterait à mutualiser les moyens des préfectures en créant des plateformes interdépartementales, sur le modèle de ce qui a été fait pour l’accueil des demandeurs d’asile. « L’un des principaux inconvénients de la déconcentration opérée est “l’atomisation” des centres de décision, et donc des pratiques décisionnelles, et ses conséquences en matière d’égalité de traitement », explique le député. « S’y ajoute le “saupoudrage” des agents préfectoraux affectés à l’instruction des demandes, alors que ni les effectifs ni le taux d’encadrement de ces agents n’ont été renforcés. » Ainsi, « un regroupement semble indispensable, car il apparaît difficile de disposer d’agents possédant l’expertise requise par le droit de la nationalité […] sur 180sites différents ». Selon le député, cette idée de mutualisation interdépartementale constitue l’une des pistes explorées par une mission de l’inspection générale de l’administration qui, dans un rapport attendu pour la mi-novembre, fera des propositions d’évolution au ministre de l’Intérieur.

Notes

(1) Disp. sur www.assemblee-nationale.fr.

(2) Ce texte a généralisé une expérimentation lancée dans 20 préfectures au début de l’année 2010 – Voir ASH n° 2640-2641 du 8-01-10, p. 21.

(3) Voir ASH n° 2780 du 26-10-12, p. 34.

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