Elle a adapté la formation et la certification aux nouveaux besoins de leurs missions, notamment une intelligence plus fine des politiques publiques – ce qui leur permet de mieux se situer entre la commande publique et la demande sociale – et le partenariat interinstitutionnel. L’accent mis sur l’intervention sociale d’intérêt collectif est salué par tous, mais cette compétence ne peut pas être certifiée dans de bonnes conditions faute de terrains de stage. Si la réforme a modifié le contenu des compétences et élevé leur niveau, elle n’a, en revanche, pas amélioré leur lisibilité dans un champ complexe, notamment en raison de la grande diversité des cadres d’emploi. Il y a aujourd’hui davantage de proximité entre un AS (assistant de service social) et un éducateur dans un service d’action éducative en milieu ouvert qu’entre un AS de secteur et un AS du service hospitalier !
Malgré des compétences plus adaptées, les employeurs et les professionnels aguerris estiment que la capacité d’investissement et de résistance à l’usure professionnelle face à des problématiques lourdes – sujet sur lequel la réforme est restée silencieuse – s’est amoindrie. Nous attribuons cela à la baisse de l’attractivité du métier, en raison de ses conditions d’exercice et de sa faible reconnaissance salariale et statutaire. Les centres de formation sont amenés à être moins exigeants pour constituer leurs promotions, et les candidats moins bien armés à l’entrée le restent à la sortie. Mais, contrairement aux craintes des formateurs, l’introduction de la logique de compétences n’a pas eu d’effet négatif sur la posture professionnelle, grâce à l’importance accordée à l’analyse des pratiques et à l’accompagnement individuel.
Si, sur le plan politique, l’incapacité à reconnaître le diplôme au niveau II perdure, il faudra se pencher sur le décalage existant entre le niveau de compétences qu’il requiert et ceux des autres diplômes de niveau III, faute de quoi la désaffection du métier va progresser. Nous proposons aussi une validation plus cohérente de certaines épreuves affichant un taux d’échec important : réviser les modalités de notation – trop hétérogènes – des dossiers de pratiques professionnelles et revoir à la baisse l’ambition scientifique du mémoire d’initiation à la recherche. Au-delà, nous émettons des pistes communes pour les diplômes de niveau III : renforcer leur transversalité, notamment par la mise en place de modules communs – travail en équipe, communication, maîtrise de l’écrit… –, réfléchir à la définition d’« aptitudes comportementales » à acquérir, augmenter le poids des épreuves en cours de formation et des stages dans la certification. Sans oublier la réflexion à mener sur les rapprochements avec les filières et diplômes universitaires. Le travail engagé par l’Unaforis (voir ce numéro, page 15) ainsi que la mise en crédits européens des formations va contribuer aux évolutions sur les contenus et les enchaînements de filière.
La réingénierie de ce diplôme lui a en effet apporté davantage de densité – avec des compétences accrues sur la compréhension des politiques sociales et du handicap, l’initiation à l’encadrement, le travail en partenariat… –, mais aussi de lisibilité. La réforme s’est, en outre, effectuée dans un contexte favorable de reconnaissance de ces compétences et d’un marché du travail porteur. Nous nous interrogeons néanmoins sur la place de la formation à l’encadrement et à la gestion dans les référentiels, très demandée par les étudiants qui aspirent à une évolution rapide, mais qui risque de percuter les diplômes de niveau II, et sur ce qui pourrait rapprocher les diplômes de puériculteur et d’EJE, conduisant aux mêmes fonctions de direction.
(1) Réalisées sous l’égide de la commission professionnelle consultative du travail social et de l’intervention sociale. Les autres diplômes vont bénéficier de la même évaluation au cours de l’année 2013.
(2) Auteur des études avec René Eksl et Rodolphe Ejnès, du cabinet GESTE.