Selon l’Association nationale des cadres de l’aide sociale à l’enfance (Anacase), ces derniers seraient entre 400 et 500 : de un ou deux à une vingtaine par département. Répartis sur des unités territoriales d’action sociale ou centralisés au siège du conseil général, ces responsables sont huit fois sur dix des femmes. Ils n’ont pas tous le même statut – qui va du cadre socio-éducatif à l’attaché principal – et perçoivent donc des rémunérations différentes. Les missions et la charge de travail qui leur incombent varient aussi beaucoup d’un département à l’autre. « En termes décisionnels, les cadres de l’ASE sont responsables de 250 à 1 300 dossiers », avance Dominique Thomassin, présidente de l’Anacase, tout en reconnaissant que toutes les situations ne demandent pas un investissement identique.
Les cadres chargés de la protection de l’enfance sont essentiellement issus d’une de ces deux filières de formation : le droit ou le travail social. Or, « pour marcher sur leurs deux jambes », les intéressés ne peuvent s’en tenir à un seul de ces deux champs : « Ils doivent être solides sur le plan juridique comme sur celui de l’accompagnement social et des sciences humaines », souligne Laurent Sochard, responsable du pôle enfance de l’Institut national spécialisé d’études territoriales (INSET) d’Angers. Aussi, pour que les agents puissent acquérir les principales connaissances du domaine qu’ils ne maîtrisent pas, ainsi qu’un minimum de repères communs en matière de valeurs, de méthodologies et de modes d’action, l’INSET d’Angers a conçu une formation spécifique à leur intention.
Composé de huit modules d’une semaine, ce cycle a d’abord été mis en place en 2002 uniquement à Angers. Il s’est démultiplié depuis sur d’autres sites pour répondre à la demande née des exigences de la loi de 2007. Celle-ci stipule que « les cadres territoriaux qui, par délégation du président du conseil général, prennent des décisions relatives à la protection de l’enfance et fixent les modalités de leur mise en œuvre doivent avoir suivi une formation adaptée à l’exercice de ces missions ».
Chaque année depuis 2011, une soixantaine de cadres bénéficient de cette formation destinée en priorité aux professionnels en place depuis moins de trois ans. Les promotions regroupent quasiment autant de juristes que de travailleurs sociaux. Les premiers sont plutôt de jeunes attachés détenteurs d’un master de droit, pour lesquels ce premier poste en conseil général est aussi leur première expérience professionnelle – « ce qui, au regard des responsabilités à assumer, n’est pas sans poser question », commente Laurent Sochard. Les seconds sont des conseillers socio-éducatifs issus des métiers d’éducateur ou d’assistant de service social ayant souvent largement dépassé la cinquantaine, qui sont nouveaux dans cette fonction mais anciens dans l’ASE.
Pour les uns et les autres qui s’acculturent réciproquement, cette hybridation est très structurante, estime Laurent Sochard. Bien sûr, « être absente une semaine par mois pendant huit mois de son bureau et de son foyer, ce n’est pas toujours facile, reconnaît Anne Piedagnel, inspectrice chargée de la protection de l’enfance dans la Seine-Maritime. Mais rencontrer d’autres collègues, réfléchir et échanger sur nos pratiques fait qu’on se sent beaucoup moins seul dans son département. »