Certains livres nous aident à devenir plus intelligents en nous épargnant l’effort de nous frotter par nous-mêmes aux grands auteurs… C’est un peu le cas de cet essai, dans lequel Dominique Depenne, responsable de projet au centre de formation Buc-Ressources (Yvelines), propose une éthique de l’accompagnement social à la lumière de la pensée du philosophe français Emmanuel Levinas (1906-1995) et de la « lecture utopiste » qu’en a faite Miguel Abensour (né en 1939), spécialiste de philosophie politique. Il s’agit d’abord de savoir ce que parler veut dire. Dominique Depenne s’emploie ainsi à distinguer l’éthique de la morale et de la déontologie et à définir l’accompagnement. L’analyse de ce dernier concept donne lieu à une virulente critique de l’expression « prise en charge ». « Avec l’idée de prise en charge se fait jour celle d’une chosification de l’Autre-homme », affirme Dominique Depenne. Or la relation éthique interdit toute velléité de possession d’autrui et implique « une reconnaissance mutuelle de la singularité des individus mis en face à face ». La « distance », ou plus précisément la « bonne distance », vertu cardinale du travail social, est également mise à l’index. D’un point de vue relationnel, l’idée de proximité n’a rien à voir avec celle de spatialité, insiste l’auteur. Comme l’a écrit Levinas, dont l’intéressé reprend l’une des plus fameuses formules, la proximité avec autrui tient dans le fait que celui-ci « n’est pas simplement proche de moi dans l’espace, mais s’approche essentiellement de moi en tant que je me sens – en tant que je suis – responsable de lui ».
Ethique et accompagnement en travail social
Dominique Depenne – ESF éditeur – 17,90 €