Cela fait déjà plusieurs mois que les associations d’aide aux sans-abri tirent la sonnette d’alarme sur la situation catastrophique de l’hébergement et sur les urgences immédiates à prendre en compte en la matière, avant la période hivernale (1). Le Premier ministre a voulu montrer qu’il avait entendu leur appel en annonçant, le 20 septembre à Matignon, devant les membres du Conseil national des politiques de lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale, un « plan d’urgence pour les sans-abri » de 50 millions d’euros, en complément duquel une série de mesures spécifiques à l’Ile-de-France seront mises en œuvre. En attendant que se concrétise le plan quinquennal promis par le gouvernement (2).
« Je sais que les associations attendent du gouvernement la garantie qu’elles auront cet hiver les moyens de faire face à la demande, mais aussi que la sortie de la période hivernale sera différente des précédentes avec leurs cortèges de remises à la rue », a expliqué Jean-Marc Ayrault au cours d’une réunion destinée à préparer la prochaine conférence contre la pauvreté et pour l’inclusion sociale – conférence appelée à déboucher sur un plan pluriannuel et dont un atelier, consacré aux questions de logement, sera présidé par Cécile Duflot (voir ce numéro, page 5).
L’enveloppe de 50 millions d’euros sera dégagée sur les budgets des ministères et répartie « entre les crédits de la veille sociale, de l’hébergement d’urgence et de la prise en charge des demandeurs d’asile ». Elle permettra, espère le Premier ministre, « de maintenir les capacités d’accueil existantes, de les étoffer sur les territoires les plus en tension, de privilégier l’hébergement de qualité plutôt que le recours à l’hôtel et […] de renforcer l’accompagnement des personnes accueillies, y compris à l’hôtel et dans les places ouvertes provisoirement ».
Le gouvernement va par ailleurs demander aux préfets de région d’établir, « de façon concertée, d’ici fin janvier, des projets territoriaux de sortie de l’hiver ». Ils devront, plus précisément, être établis sur la base de « diagnostics partagés avec l’ensemble des acteurs » – Etat, associations, collectivités locales, bailleurs, représentants des personnes accueillies… – et avec des « objectifs chiffrés ». Les préfets devront, dans ce cadre, travailler sur plusieurs « hypothèses précises », indique le Premier ministre, évoquant la pérennisation de places hivernales, la prévention des expulsions ou bien encore le recours à la sous-location et au logement adapté, l’accès direct au logement de droit commun via la mobilisation des contingents de logements sociaux ou enfin le recours à l’accompagnement social pour éviter le retour à la rue.
Au lendemain de la réunion organisée à Matignon, la ministre de l’Egalité des territoires et du Logement a annoncé une série de mesures complémentaires l’Ile-de-France, « où les besoins en matière d’hébergement sont plus pressants encore qu’ailleurs ». Articulées autour de quatre axes, ces mesures vont être mises en œuvre « dès aujourd’hui », a précisé Cécile Duflot le 21 septembre dans un communiqué.
Il s’agit en premier lieu de « faire de la prévention des expulsions une priorité », notamment par une intervention sociale dès le premier mois d’impayé et, lorsque la procédure n’aura pas pu être évitée, par l’organisation systématique d’une intervention sociale « de dernier recours ».
L’offre d’hébergement sera par ailleurs complétée avec, entre autres, la finalisation des appels à projets Etat/région/Ville de Paris permettant la création de 150 places supplémentaires destinées à des publics cibles (100 ont déjà été créées dans ce cadre), le lancement de trois appels à projets en réponse à des besoins spécifiques (femmes et familles monoparentales, jeunes en errance, personnes souffrant de problèmes psychiques), ou bien encore la création d’un « pôle régional de réservations hôtelières sur l’ensemble du territoire francilien, en lien avec les territoires concernés ».
Cécile Duflot entend encore « renforcer l’accès au logement » notamment par le développement du programme « Solibail » (3) ou bien encore en « renforçant la formation des travailleurs sociaux à l’évaluation des personnes en demande d’hébergement dans leur orientation vers et dans le logement ».
Enfin, quatrième et dernier axe : l’amélioration de la gouvernance au niveau régional, avec notamment la création d’une conférence régionale des services intégrés d’accueil et d’orientation franciliens « permettant de développer un fonctionnement en réseau et portant la préoccupation d’un accompagnement renforcé et de proximité des personnes ».
(2) Plan quinquennal d’action pour l’hébergement et l’accès au logement, qui doit être intégré à celui sur la lutte contre l’exclusion, annoncé pour début 2013 – Voir ASH n° 2775 du 21-09-12, p. 5.
(3) Dispositif d’intermédiation locative, Solibail aide des familles en difficulté à accéder au logement grâce à un système de sous-location : le propriétaire privé confie le bail à un opérateur, en général associatif, qui assure le versement du loyer et des charges.