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Pardon d’être pauvre

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Chaque année, des milliers d’immigrés viennent « s’échouer » en Espagne. Un autre naufrage les y attend : l’errance parmi les ombres. « Ces hommes imprègnent ma conscience, chaque année la même vague, les mêmes hommes, lâche Oriol Canals, réalisateur espagnol, qui a voulu raconter leur destin hors du commun. Comment montrer des personnes qui ont peur d’être vues ? Comment faire parler des personnes qui ont tant de secrets ? Comment raconter leur histoire alors qu’elles n’aspirent qu’à oublier ? » En proposant à ces « hommes-ombres » d’envoyer les images filmées à leur famille restée au pays, qui ignore où ils sont et ce qu’ils sont devenus. Ils s’expriment alors face à la caméra commes’ils s’adressaient à leurs proches : « Maman. J’ai beaucoup souffert sur l’eau. Mais on ne meurt pas avant son heure. Dans la pirogue, plus de nourriture, plus d’essence. On croyait que c’était fini alors nous avons prié », raconte le plus bavard. « Vers 14 heures, un vent s’est levé, le piroguier a dit qu’on n’allait pas s’en sortir, les gens criaient. Je n’ai pas bougé, j’ai attendu la mort. Les corps flottaient sur l’eau », ajoute un autre.

Beaucoup ont quand même hésité avant d’accepter d’être filmés. « Dire que tu vis dans les bois depuis X années, c’est la honte pour toi. Si tu échoues en Europe, que tu ne trouves rien ici, il vaut mieux mourir que de rentrer les mains vides », avoue un clandestin installé dans les bois. Le documentariste filme les journées à ne rien faire qu’à attendre, le froid, la faim, la débrouille. Et ceux qui se sentent coupables : « J’ai accepté d’être filmé, je dévoile le secret des Moreno ici et je demande pardon. Je demande pardon surtout à mes amis en Afrique, qui se disent que je suis en Europe, pays riche, et qui me voient là, je leur demande pardon, ils ne veulent pas voir ça. » Celui-là vit dans le caveau d’un cimetière.

Certains trouvent des jobs dans la cueillette des fruits. Deux jours par-ci, deux jours par-là. Puis vient le moment où les patrons demandent des papiers. Celui qui n’en a pas doit se déplacer, sans cesse. Tous relativisent pourtant sur leur sort. Ils ont peut-être « mucho problemo » mais ils croient en Dieu et à leur destin. Reste que « l’Europe est dure », conclut un ancien.

Sombras (Les ombres)

Oriol Canals – 1 h 34 – En salles le 26 septembre

Culture

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