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La douleur d’une aînée

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Denis est mort à 50 ans passés. Pourtant, tous les médecins pronostiquaient qu’il ne vivrait pas au-delà de 30 ans. Denis est né différent : une hémiplégie, de l’épilepsie, des encéphalogrammes à faire perdre la tête aux médecins – avec, à terme, 90 % d’incapacité et une carte d’invalidité. Denis hurle dès qu’on lui ôte le crayon qu’il tient entre ses doigts, et souffre à chaque crise d’épilepsie sans jamais se plaindre. Mais Denis rit aussi, joue, regarde la télévision, et vit. Et il a du talent : il peint de grandes toiles, en bleu le plus souvent. Sa sœur aînée, la journaliste et écrivaine Marieke Aucante, raconte l’histoire de sa famille, paysans de Sologne, dont la vie a été chamboulée par l’arrivée de ce Petit frère l’orage. Elle décrit l’amour qu’elle porte à son cadet, mais surtout l’épuisement de ses parents, et notamment de sa mère, que cet enfant « grignote toute entière ». Elle décrit longuement la maison d’accueil médicalisé dans laquelle il a été placé – seulement trois jours par semaine, et jamais la nuit car sa mère jure que « personne ne pourrait faire ce qu’elle fait, le laver, le torcher, l’habiller, le coucher, le transférer du canapé au fauteuil ». L’auteure peste violemment contre « l’attitude inconsciente et décontractée qu’arborent les jeunes éducateurs », qu’elle n’hésite pas à traiter d’« irresponsables », et les soignants qui, au lieu d’aider et de soulager, ajoutent encore de la souffrance à la souffrance. En lisant la description qu’en fait Marieke Aucante, on comprend l’angoisse qui la prenait à chaque fois que le taxi venait chercher Denis pour l’amener à La Désirade : erreurs dans la distribution de médicaments et dans la vaccination, personnel qui fume devant des personnes handicapées souffrant de problèmes pulmonaires, changes pas faits, repas non servis, etc. Mais c’est aussi toute la société que l’auteure pointe du doigt, les amis qui se détournent, les gens qui n’ont pas la bonne attitude, les médecins incompétents… Derrière ces accusations, sans doute une grande douleur.

Petit frère l’orage

Marieke Aucante – Ed. Albin Michel – 18 €

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