Les dispositions de la loi de finances pour 2007 du 21 décembre 2006, instaurant la notion de restriction substantielle et durable pour l’accès à l’emploi (RSDAE) pour l’attribution de l’allocation aux adultes handicapés (AAH) étaient immédiatement applicables, même en l’absence de parution du décret devant la préciser, a décidé la Cour de cassation le 21 juin dernier. Rappelons que le décret en question n’a été publié au Journal officiel qu’en 2011 (1).
Dans cette affaire, une personne demeurée fortement handicapée à la suite d’un accident vasculaire cérébral intervenu en 1983 a demandé l’attribution de l’AAH en octobre 2006. En application de l’article L. 821-2 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction résultant de la loi du 21 décembre 2006, l’AAH est attribuée aux personnes handicapées justifiant d’un taux d’incapacité permanente au moins égal à 50 % et inférieur à 80 % et n’ayant pas occupé d’emploi depuis un an à la date du dépôt de leur demande (2), auxquelles la commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées (CDAPH) a reconnu, compte tenu de leur handicap, une RSDAE précisée par décret. La CDAPH ayant rejeté la demande d’allocation, l’affaire a été portée devant les juridictions du contentieux de l’incapacité. En novembre 2010, la Cour nationale de l’incapacité et de la tarification de l’assurance des accidents du travail (Cnitaat) a également rejeté la demande. Selon elle, les dispositions relatives à la RSDAE n’étaient pas applicables en l’absence du décret prévu par la loi. Les anciennes dispositions qui subordonnaient l’attribution de l’AAH à l’impossibilité de se procurer un emploi étaient en revanche applicables, a-t-elle jugé. Relevant que le requérant avait occupé un poste d’employé commercial de 2000 à 2002 par le biais d’un contrat réservé aux travailleurs handicapés et que ce contrat n’avait pas pris fin en raison du handicap, elle a considéré que le requérant présentait à la date de sa demande un handicap qui ne l’empêchait pas de se procurer un emploi adapté.
Pour la Cour de cassation, au contraire, les nouvelles dispositions de l’article L. 821-2 du code de la sécurité sociale se suffisaient à elles-mêmes. Elles étaient donc applicables dès la publication de la loi du 21 décembre 2006. Reste que le décret d’application du 16 août 2011 a pourtant apporté de nombreuses précisions sur l’appréciation de la RSDAE et notamment sur l’emploi auquel la personne handicapée pourrait accéder. Ce texte a en outre été explicité de façon très détaillée par une circulaire du 27 octobre 2011. La notion d’emploi a ainsi été définie comme une activité professionnelle conférant les avantages reconnus aux travailleurs par la législation du travail et de la sécurité sociale. Ce que l’administration entend comme l’exercice d’une activité professionnelle en milieu ordinaire de travail (3). Soulignons, à ce titre, l’imprécision de la décision de la Cnitaat concernant la nature de l’emploi que pourrait se procurer la personne handicapée.
(1) Pour une présentation détaillée de la RSDAE, voir ASH n° 2752 du 23-03-12, p. 45.
(2) Cette condition de non-emploi a depuis été supprimée par la loi de finances pour 2009.
(3) Pour l’administration, la RSDAE est donc compatible avec l’exercice d’une activité à caractère professionnel exercée en milieu protégé. Un travailleur handicapé orienté en établissement ou service d’aide par le travail a une capacité de travail reconnue par la CDAPH inférieure à un tiers par rapport à celle d’une personne valide, « ce qui plaide fortement » pour la reconnaissance d’une RSDAE, estime-t-elle.