Quel que soit le pays d’Europe dans lequel elles se déroulent, les procédures d’asile sont kafkaïennes, déshumanisantes, et entraînent le demandeur dans une spirale de mal-être et de dépression qui peut conduire à la folie. C’est le propos de ce Journal d’un demandeur d’asile, récit pétrifiant de onze mois d’incarcération en centre de rétention, d’un transfert en « prison psychiatrique » et d’une libération sans filet. Originaire d’Afrique centrale, Antoine Manson Vigou a quitté son pays pour des raisons politiques, atterrissant dans un pays d’Europe qui lui a refusé l’asile et dont il préfère taire le nom. On croit reconnaître les Pays-Bas, mais cela revêt finalement peu d’importance : ce que le narrateur raconte pourrait aussi bien se produire en France ou en Angleterre. Fonctionnaires manipulateurs, surveillants trop zélés, associations inutiles, avocats expéditifs… Sur le chemin du demandeur, rares sont les figures positives : un retenu plus ancien qui joue le rôle de guide, un aumônier, une surveillante qui lui apprend la langue du pays. Mais les meilleures intentions ne pèsent pas lourd face au « gros rouleau compresseur » d’une « procédure » au fonctionnement resté impénétrable jusqu’au bout : même la libération du retenu paraît dénuée d’explication logique. « L’Immigration déclare avoir fait une erreur au dernier jugement : vous auriez dû être relâché », annonce un jour l’avocat. Et voilà le demandeur dehors. Dans la nature, débouté et sans papiers. « Si vous aussi vous voulez des preuves, sachez que je n’en ai aucune, écrit Antoine Manson Vigou en conclusion de son récit. Mais je sais que : j’étais là, j’ai subi, j’ai vu et j’ai entendu. C’est dans ma tête jour et nuit. »
Journal d’un demandeur d’asile – Antoine Manson Vigou – Ed. L’Harmattan, coll. « Ecrire l’Afrique » – 24,50 €