Le chef de l’Etat avait déjà dévoilé, pendant la campagne électorale, son intention de confier davantage de compétences aux régions dans le cadre d’un « nouvel acte » de la décentralisation. Alors que cette réforme doit être dessinée à l’automne, l’Association des régions de France (ARF) a, le 4 juillet, décliné ses propositions dans un document de 52 pages.
Ambitieuses, celles-ci visent à reconnaître aux régions une « vocation stratégique partagée avec l’Etat » dans différents domaines allant de la formation à l’innovation, tout en assurant aux collectivités des « ressources dynamiques », par une remise à plat des finances locales. Pour l’ARF, « la notion d’autorité organisatrice régionale, avec pouvoir réglementaire délégué, pourrait être consacrée par la loi ». Les régions seraient ainsi pilotes « de la chaîne orientation-formation-emploi » et mettraient en place, après concertation, un schéma régional « prescriptif » de l’accueil, l’information, l’orientation et l’accompagnement. Elles piloteraient, avec les partenaires sociaux, le service public de l’emploi et mettraient en place un service public régional d’orientation. Elles organiseraient et agréeraient le réseau des missions locales, cofinancé, « avec le transfert des financements de l’Etat correspondant, avec les collectivités infrarégionales ».
Cette perspective n’est pas vraiment du goût des syndicats de salariés des missions locales, qui montent au créneau pour en dénoncer les risques. Dans un courrier adressé le 28 juin au chef de l’Etat, au Premier ministre et aux ministres concernés, la Fédération CGT des personnels des organismes sociaux de la estime que cette décentralisation aggraverait les inégalités dans l’accompagnement des jeunes selon les territoires. La contribution des régions au financement des missions locales varie en effet fortement d’une région à l’autre : « de 9,4 % à 24,9 % des financements d’activité principale ». L’argument de la proximité n’est à ses yeux pas pertinent, puisque les élus de la région siègent dans les conseils d’administration avec les représentants de l’Etat, aux côtés des élus locaux. Une présence « pas forcément régulière », ajoute la fédération dans une note adjointe au courrier, qui évoque également « une volonté exprimée dans certaines régions de faire disparaître les missions locales au sein des maisons de l’emploi », par exemple. Pour sanctuariser les financements, la fédération propose en revanche que des modalités de conventionnement entre l’Etat et les collectivités territoriales soient élaborées.
Le Synami (Syndicat national des métiers de l’insertion)-CFDT s’oppose aussi à cette « régionalisation ». « Quelle que soit leur bonne volonté », les conseils régionaux « seraient les seuls maîtres à bord et étoufferaient définitivement les territoires », juge-t-il dans une résolution du 3 juillet. Mieux vaut, selon le syndicat, instaurer une « collaboration accrue avec les régions », qui pourrait passer par le renforcement des réseaux régionaux des missions locales. Et « régénérer profondément l’action d’insertion sur un territoire, en mobilisant les acteurs autour de ce qui pourrait être un pacte territorial pour l’insertion des jeunes qui renoue avec l’ambition des missions locales de construire la transversalité et la globalité de l’action » auprès de ce public.
Déjà, en 2004, le même débat avait conduit à la suppression de l’article qui prévoyait de confier à la région un rôle de coordination des actions en matière d’accueil, d’information et d’orientation des jeunes et des adultes dans le projet de loi relatif aux libertés et responsabilités locales.