Quel est l’objet de votre association ?
Créée en 2003, c’est la seule association qui s’adresse à tous les aidants, c’est-à-dire à toute personne qui, à un moment de sa vie, est amenée à accompagner un proche en difficulté, quel que soit son âge, et qui n’est pas forcément membre de sa famille. La personne aidée peut être une personne âgée, un enfant, une personne handicapée ou atteinte d’une maladie chronique…
L’association n’est pas représentative des aidants mais a vocation à porter une parole sur leur place dans la société et à les accompagner individuellement.
Vous venez de relancer son projet politique, quel est-il ?
Nous constatons qu’il y a quatre millions d’aidants en France et que ce n’est donc plus un sujet de vie privée mais une question qui interroge la société. Aujourd’hui, nombre d’entre eux sont en grande difficulté, ils doivent assumer des charges lourdes de soins, de toilettes, d’aide psychologique, qui sont des gestes professionnels. Leur état de santé se dégrade, ils n’ont plus de vie sociale et certains aidants meurent avant leur proche.
Nous souhaitons faire évoluer la conception de l’aidant d’une part dans son rapport à la personne aidée : il ne doit pas se substituer à un professionnel mais conserver le lien initial – qui est de l’ordre de l’attachement – avec la personne. D’autre part, au sein de la société, l’aidant ne doit pas être cantonné dans son rôle d’aidant mais garder une vie sociale, une vie familiale, des activités professionnelles ou non. Un aidant ne doit pas se sentir coupable de vivre !
Quelles actions menez-vous ?
Première d’entre elles, la création des cafés des aidants dès 2003 : il en existe une trentaine et d’autres sont en projet. C’est un espace de rencontre animé par un psychologue et un travailleur social de la structure porteuse du café (association, conseil général, CLIC, CCAS…). Une fois par semaine, la séance débute par une conférence courte sur un thème et est suivie d’un débat. Ces cafés permettent aux aidants – souvent confinés dans leurs logements – de se rendre visibles, de sortir. Par ailleurs, nous sommes en train de construire un centre de formation destiné à trois types de public : les aidants eux-mêmes, les professionnels intervenant à domicile ou en établissement et les équipes d’évaluation (équipes médico-sociales APA du conseil général, équipes des MDPH). Une douzaine de modules a été créée – certains sont communs aux trois cibles – sur différents sujets : « conception de l’aidant », « prendre soin d’une personne en situation d’incapacité », « la relation à l’autre quand on est aidant »… Enfin, nous avons créé un outil d’évaluation de la situation des aidants qui permet à un professionnel (infirmière, assistante sociale…) d’identifier le type d’aide dont a besoin un aidant en difficulté.
Comment voyez-vous l’avenir ?
Nous allons avoir besoin des aidants : l’espérance de vie progresse, les enfants qui naissent avec une grave maladie, une personne atteinte d’une maladie chronique invalidante ou qui a survécu à un accident de la route, vivent aussi plus longtemps. Une grande partie de la population va être en situation d’aidant plusieurs fois dans sa vie. Si les nouvelles générations ne se désintéressent pas de leurs proches, elles n’accepteront sans doute pas – comme le faisaient leurs aînés – d’accomplir les soins du corps. J’attends du gouvernement qu’il s’attelle à la question de l’accompagnement des personnes en difficulté de façon globale, et non en ne s’intéressant qu’aux seules personnes âgées. Dans cette réflexion, la question de la place des proches doit être pensée en amont. Le problème des moyens ne doit intervenir que dans un second temps.
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