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« LE DÉBAT SUR UNE SCIENCE DU TRAVAIL SOCIAL EST INAPPROPRIÉ AU REGARD DU CADRE EUROPÉEN »

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Un ouvrage dirigé par Stéphane Rullac (1) examine, à partir de plusieurs contributions, les « hypothèses et perspectives » d’une science du travail social (2) et tente de dépassionner le débat. Un débat « très franco-français », juge l’un des auteurs, Dominique Susini, président de l’Aifris (3).

Vous estimez que le débat sur la légitimité d’une science du travail social est un faux débat…

C’est un débat très franco-français et qui n’a plus lieu d’être au regard du cadre européen. Toute la politique communautaire d’éducation – qui a donné lieu à deux programmes « Education et formation » 2010 et 2020 – est basée sur la notion de formation tout au long de la vie et vise à parvenir à une stricte égalité entre l’enseignement général et l’enseignement professionnel. Si ce rapprochement s’inscrit dans une idéologie néolibérale et une logique de compétitivité économique des Etats, il a le mérite de sortir de la spécificité culturelle française en considérant les formations sociales non plus comme une sous-catégorie mais à égalité avec les autres formations, comme la sociologie par exemple.

Quel lien avec le processus de Bologne ?

C’est dans cet esprit du rapprochement des formations que s’inscrit la déclaration de Bologne de juin 1999 – qu’ont signée la France et 46 autres pays – dont l’objectif est de construire un espace européen de l’enseignement supérieur dans lequel les enseignants, les étudiants et les diplômés peuvent se déplacer. Toute filière d’enseignement général ou professionnel doit donc se déployer sur la base du système LMD (licence/bachelor-master-doctorat) et d’une monnaie commune : les ECTS(European Credits Transfer and accumulation System). La Belgique et la Suisse ont ainsi créé des bachelors en travail social, puis des masters et se posent aujourd’hui la question du doctorat. La France ne peut échapper au mouvement.

Reste que, si les formations sociales de niveau III se sont vu attribuer 180 crédits, les diplômes ne sont pas reconnus au grade de la licence…

Le processus est ralenti en France du fait des incidences salariales dans la fonction publique mais il est inéluctable. Il est incompréhensible pour les autres Etats qu’une certification se voie attribuer 180 crédits sans être classée au niveau 6 du cadre européen des certifications (CEC) ! Je ne vois pas comment on pourrait s’inscrire dans le processus de Bologne sans construire une filière de travail social comparable à celle des autres pays européens : avec le grade de licence, master (300 crédits, niveau 7), et doctorat (480 crédits niveau 8). Il faudra d’ailleurs présenter les diplômes préparant à l’encadrement (Caferuis, DEIS, Cafdes) sous forme de masters pour permettre des échanges avec les masters du même type en Belgique, en Suisse ou dans les autres pays européens. De même, la création d’un doctorat en travail social est inévitable à l’image de ce qui existe au Royaume-Uni ou au Portugal – lequel a 15 masters et trois doctorats.

Quelle incidence sur la recherche ?

Le CEC établit huit niveaux de certification, quelle que soit la filière, à partir des savoirs, des aptitudes et des compétences attendues. La recherche est évoquée dès le niveau 6. Aux niveaux 7 et 8, le titulaire du diplôme doit pouvoir développer des capacités de recherche et d’innovation. C’est une reconnaissance de la capacité du travail social à produire de la recherche et des savoirs spécifiques.

Ces savoirs doivent-ils être reconnus comme une science ?

Je ne connais pas de recherche qui ne produise pas de savoirs scientifiques, c’est-à-dire rigoureux et contrôlables. La recherche peut d’ailleurs être menée par des professionnels du travail social, des chercheurs extérieurs ou des équipes mixtes. La question de savoir si le travail social est ou non une discipline scientifique et si la recherche doit être en ou sur le travail social me semble en voie d’être dépassée. La seule question qui vaille est de savoir comment – avec quelle méthodologie, quels moyens… – on va faire de la recherche. Et les travaux préparatoires à la conférence de consensus des 15 et 16 novembre (4) vont heureusement en ce sens.

Notes

(1) Coordinateur du Centre d’étude et de recherche appliquée de Buc Ressources.

(2) La science du travail social – Hypothèses et perspectives – ESF éditeur – 16,90 €.

(3) Association internationale pour la formation, la recherche et l’intervention sociale.

(4) Voir ASH n° 2728 du 14-10-11, p. 28.

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