C’était un des engagements de campagne de François Hollande. Un an jour pour jour après son adoption, la très controversée circulaire du 31 mai 2011 – dite « circulaire Guéant » –, qui a imposé des critères plus restrictifs pour entrer en France pour un motif professionnel (1), est abrogée.
Pour mémoire, les cas de jeunes diplômés non ressortissants d’un pays de l’Union européenne empêchés d’obtenir un changement de statut (d’étudiant à salarié) s’étaient multipliés à la suite de ce texte. Certains, très qualifiés, avaient pourtant été recrutés par des entreprises françaises, lesquelles avaient donc dû renoncer à les embaucher. Plusieurs étrangers s’étaient ainsi retrouvés en situation irrégulière et menacés d’être reconduits à la frontière. Devant la vague de protestations des diplômés eux-mêmes, des organisations étudiantes, des grandes écoles mais aussi des entreprises, l’ancien ministre de l’Intérieur, Claude Guéant, et son homologue du Travail et de l’Emploi, Xavier Bertrand, avaient tenté de rectifier le tir par une autre circulaire, diffusée le 12 janvier dernier (2). Les deux textes sont aujourd’hui remplacés par un seul : une circulaire à la tonalité bienveillante dans laquelle leurs successeurs – le ministre de l’Intérieur, Manuel Valls, et le ministre du Travail, de l’Emploi, de la Formation professionnelle et du Dialogue social, Michel Sapin –, ainsi que la ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, Geneviève Fioraso, appellent les préfets à, en quelque sorte, « ne plus mettre de bâtons dans les roues » (3) des diplômés étrangers désireux d’accéder au marché du travail en France.
Les ministres leur demandent, en premier lieu, une « attention particulière » face aux demandes de changement de statut déposées par des diplômés étrangers non communautaires de niveau au moins équivalent au master souhaitant s’engager dans une première expérience professionnelle. Il s’agit, autrement dit, des étudiants entrant dans le cadre de l’article L. 311-11 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, lequel autorise la délivrance d’une autorisation provisoire de séjour d’une validité de six mois au titulaire d’un diplôme au moins équivalent au master qui souhaite, « dans la perspective de son retour dans son pays d’origine, compléter sa formation par une première expérience professionnelle participant directement ou indirectement au développement économique de la France et du pays dont il a la nationalité ». Dès lors que l’intéressé a trouvé un emploi ou est titulaire d’une promesse d’embauche, un titre de séjour autorisant l’exercice d’une première activité professionnelle doit lui être accordé si les conditions légales sont réunies. L’adéquation du diplôme et de l’emploi envisagé en est une.
Le texte du 12 janvier 2012 avait déjà introduit des assouplissements à la circulaire « Guéant » concernant cette catégorie d’étudiants. La nouvelle circulaire en reprend des éléments et enfonce le clou. Les préfets sont ainsi invités à faciliter la délivrance d’un titre de séjour autorisant l’exercice d’une première activité professionnelle « dès lors que, notamment, serait établi par tout moyen le respect du critère d’adéquation du diplôme et de l’emploi envisagé ». Les ministres leur demandent par ailleurs de prendre en compte favorablement toute attestation établie conjointement par le directeur ou le président de l’établissement d’enseignement supérieur et le chef d’entreprise certifiant que les conditions posées par la loi sont respectées. En outre, la situation de l’emploi ne peut « en aucun cas » être un frein et l’étudiant « n’est pas tenu de fournir l’attestation de réussite à ses examens dès le dépôt de sa demande d’autorisation provisoire de séjour ». Enfin, insistent les ministres, le titre de séjour peut être obtenu à partir du moment où l’intéressé bénéficie d’un emploi ou d’une promesse d’embauche… et donc, le cas échéant, avant la délivrance de son diplôme. Si les conditions sont réunies, ce titre est renouvelé jusqu’à l’issue de la première expérience professionnelle.
Les autres étudiants diplômés, de niveau inférieur au master ou de niveau au moins équivalent mais souhaitant agir en dehors du dispositif de l’autorisation provisoire de séjour, peuvent s’engager dans une procédure de droit commun de changement de statut pour obtenir une autorisation de travail. Plusieurs critères sont listés en annexe de la circulaire afin de guider les services chargés de l’instruction des demandes. Ils pourront par exemple se référer au fait que « la formation de l’étudiant a été soutenue, hors barème de taxe d’apprentissage, par l’entreprise qui souhaite le recruter à la fin de ses études ». La situation de l’emploi est opposable à ces étrangers. L’employeur doit donc justifier qu’il a fait des recherches pour recruter un candidat déjà présent sur le marché du travail en France. Les ministres demandent à cet égard aux préfets de considérer que cette recherche a été réalisée si l’offre qu’il a déposée auprès de Pôle emploi n’a pas été satisfaite après trois semaines de publication.
Autre consigne, plus globale : les préfets sont invités à fournir à l’étudiant l’ensemble des informations nécessaires au traitement de son dossier dès les premiers contacts qu’il aura avec les services compétents. Il leur est également demandé d’être attentifs à maintenir une durée d’examen des demandes inférieure à deux mois dès lors que le dossier est complet, hors attestation de réussite des examens. L’idée étant d’éviter à l’étudiant étranger le risque de perdre l’emploi auquel il postule, quel que soit le fondement juridique de sa demande.
Enfin, la circulaire exige le réexamen prioritaire des dossiers déposés depuis le 1er juin 2011 et qui leur auront été à nouveau présentés. Aucune obligation de quitter le territoire français notifiée à ce titre après le 1er juin 2011 ne doit être exécutée pendant le réexamen et les intéressés doivent se voir délivrer une autorisation provisoire de séjour de six mois non renouvelable, avec autorisation de travail ou, pour ceux qui ont une promesse d’embauche, un récépissé avec autorisation de travail durant l’instruction de leur dossier.
(2) Les assouplissements introduits par ce texte concernaient essentiellement les diplômés étrangers de niveau au moins équivalent au master – Voir ASH n° 2743 du 20-01-12, p. 16.
(3) Formule employée par Geneviève Fioraso le 1er juin dans un entretien à l’AFP.