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Souvenirs de harkis

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Pendant neuf ans, dans les années 1960, les parents de Daniel Blancou ont été instituteurs dans un camp de harkis du Gard. Le dessinateur plonge avec eux dans ce passé, vu sous un nouveau jour.

Daniel Blancou a entendu parler depuis son enfance du camp de harkis de Saint-Maurice-l’Ardoise, sur la commune de Saint-Laurent-des-Arbres (Gard). Pendant neuf ans, ses parents y ont exercé leur métier d’instituteurs. C’est même là qu’ils se sont rencontrés, dans les années 1960. Trente-cinq ans plus tard, le dessinateur leur a demandé de raconter leurs souvenirs et de se rendre, avec lui, sur ces lieux aujourd’hui démolis. C’est ce retour, et non un savant exposé sur l’histoire des harkis, que l’on retrouve au fil des 140 pages de la bande dessinée Retour à Saint-Laurent-des-Arabes. A travers le vécu du couple Blancou, chaque jour au contact des familles et des enfants harkis, on comprend que le camp était comme une « réserve d’Indiens » : on y casait des gens censés rester libres de leurs mouvements, sauf que cette liberté ne s’appliquait qu’à un espace fortement délimité ! Les harkis, qui avaient lutté au côté de la France pendant la guerre d’Algérie, étaient indésirables dans leur pays d’origine et très peu désirés dans le nouveau. Alors que les camps de « transit » étaient censés éviter un déracinement brutal aux familles et les protéger d’éventuelles représailles du FLN, ces familles y étaient parquées pendant plusieurs années, y vivaient coupées du monde, dans des logements à peine salubres et entourés de barbelés, de gardiens et de règles de vie très strictes. Les autorités françaises leur imposaient, par exemple, un couvre-feu en coupant l’électricité des maisons en soirée. Les enfants y étaient pour la plupart illettrés et les parents ne parlaient pas français. Certains étaient violents – ce camp étant réservé aux harkis qui ne pouvaient pas ­travailler, notamment ceux qui étaient atteints de maladies psychiques. Les parents de Daniel Blancou ne mesuraient pas réellement l’ampleur du problème harki tant qu’ils enseignaient à l’école du camp. Là où ils voyaient de la convivialité, en se confiant à leur fils, ils comprennent la misère, l’insécurité, la discipline militaire qui y régnaient. Et culpabilisent. Le dessinateur s’est servi de quelques clichés que ses parents avaient gardés, des vieux plans militaires et des témoignages d’anciens élèves pour tracer au feutre, de façon sobre et neutre, les contours de ce microcosme.

Retour à Saint-Laurent-des-Arabes – Daniel Blancou – Ed. Delcourt – 14,95 €

Culture

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