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Le premier gouvernement Ayrault en ordre de bataille

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Dix jours après son élection à la tête de l’Etat, François Hollande a constitué, avec son Premier ministre Jean-Marc Ayrault, un gouvernement composé de 34 ministres, marqué notamment par un vaste pôle « affaires sociales et santé », un portefeuille consacré à l’économie sociale et solidaire et un ministère délégué à la réussite éducative.

Ce ne sont pas moins de 34 ministres qui ont été nommés le 16 mai par François Hollande, sur proposition de son Premier ministre, Jean-Marc Ayrault (62 ans), président du groupe socialiste à l’Assemblée nationale de­puis 1997 et maire de Nantes depuis 1989. Dans l’équipe, 17 femmes, la parité ayant été pour la première fois strictement respectée. La composition du gouvernement est cependant provisoire puisque 24 des ministres se présentent aux élections législatives au mois de juin. Et la règle est claire : ceux qui ne seront pas élus devront renoncer à leur portefeuille.

Affaires sociales et droits des femmes

Pressentie à ce poste depuis plusieurs semaines, Marisol Touraine (53 ans) prend les rênes d’un vaste ministère des Affaires sociales et de la Santé, la santé étant donc désormais indépendante du ministère du Travail et de l’Emploi. La députée d’Indre-et-Loire n’est pas novice en la matière puisqu’elle était jusqu’à présent membre de la commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale et secrétaire nationale chargée de la protection sociale au parti socialiste. Côté santé, elle devrait s’atteler à la construction d’un service public de médecine de proximité, à la révision des lois sur la bioéthique qui pourrait se traduire par l’ouverture de l’aide à la procréation aux couples homosexuels, à la réforme de la loi sur la fin de vie, ou encore à l’encadrement des dépassements d’honoraires. S’agissant des affaires sociales, Marisol Touraine comptera parmi ses chantiers prioritaires le départ à la retraite à 60 ans des assurés ayant commencé à travailler à 18 ans et ayant cotisé 41 annuités, dossier qu’elle gèrera avec son homologue du Travail. La mesure sera mise en œuvre par un décret à paraître « très vite », a indiqué le Premier ministre. Ce texte, qui fera l’objet de concertations préalables avec les organisations syndicales et les organismes de sécurité sociale, devrait tenir compte, pour le calcul des annuités, des périodes de congé maternité, de service militaire et, dans certaines limites, d’arrêt maladie Dans un deuxième temps, a précisé la ministre, le « gouvernement se penchera sur l’ensemble du dossier des retraites dans le cadre d’une large négociation avec les partenaires sociaux à partir de l’été ou de l’automne » et, en particulier, sur la question de la pénibilité et de la retraite des femmes. Autre chantier : la réforme de la dépendance, dont les discussions devraient être à l’ordre du jour « pour la fin de l’année », selon Marisol Touraine. Afin de mener à bien ses missions, elle est entourée de trois ministres déléguées :

 Dominique Bertinotti (58 ans), chargée de la famille. La maire (PS) du IVe arrondissement de Paris a d’ores et déjà indiqué qu’une réflexion sur le mariage homosexuel et les droits qu’il pourrait conférer serait lancée « au mois de septembre, l’idée étant que cela débouche sur une loi au milieu de l’année 2013 » ;

 Marie-Arlette Carlotti (60 ans), conseillère générale (PS) des Bouches-du-Rhône – et dont le combat électoral en juin s’annonce particulièrement ardu –, est responsable des questions relatives aux personnes handicapées ;

 Michèle Delaunay (65 ans), cancérologue et jusqu’à présent membre de la commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale et vice-présidente du groupe Socialiste Radical et Citoyen en charge de la politique de l’âge, va s’occuper des personnes âgées et de la dépendance.

Par ailleurs, un ministère des Droits des femmes de plein exercice est institué, ce qui n’était plus arrivé depuis les années 1980. A sa tête, la benjamine de l’équipe gouvernementale, Najat Vallaud-Belkacem (34 ans) – également nommée porte-parole du gouvernement. Elle devra notamment se pencher sur la création d’un Observatoire national des violences faites aux femmes et sur la rédaction – en collaboration avec la chancellerie – d’une loi sur le harcèlement sexuel, dont la définition pénale a été récemment censurée par le Conseil constitutionnel (1).

Emploi et économie solidaire

Un ministère du Travail, de l’Emploi, de la Formation professionnelle et du Dialogue social est confié à Michel Sapin (60 ans), proche du président de la République et déjà doté d’une forte expérience ministérielle. Il a en effet été ministre délégué auprès du garde des Sceaux en 1991, ministre de l’Economie en 1992 et ministre de la Fonction publique de 2000 à 2002. Parmi ses missions : préparer la conférence sociale prévue au mois de juillet (voir encadré, page 5). Dans le cadre du développement de l’emploi, Michel Sapin aura certainement à travailler avec Benoît Hamon (44 ans) qui a été nommé ministre délégué chargé de l’économie sociale et solidaire (ESS) auprès du ministre de l’Economie, des Finances et du Commerce extérieur, Pierre Moscovici (54 ans). François Hollande souhaite en effet développer l’ESS – secteur qui représente 10 % de l’emploi salarié – au travers d’une loi de programmation (2).

Education, sports et vie associative

Le ministère de l’Education nationale revient à Vincent Peillon (51 ans), tête pensante de l’équipe de campagne présidentielle de François Hollande sur ce sujet. Au menu du ministre : les rythmes scolaires, la création de 60 000 postes pour les écoles primaires en cinq ans, la refonte de la formation des enseignants… A ses côtés, une ministre déléguée chargée de la réussite éducative, George Pau-Langevin (63 ans), députée (PS) de Paris depuis 2007. Originaire de Guadeloupe, cette avocate a dirigé l’Agence nationale pour l’insertion et la promotion des travailleurs d’outre-mer de 1997 à 2001. En outre, Valérie Fourneyron (52 ans), députée de Seine-Maritime depuis 2007 et inspectrice régionale de la jeunesse et des sports, a été nommée ministre des Sports, de la Jeunesse, de l’Education populaire et de la Vie associative.

Justice et affaires intérieures

Le monde judiciaire doit dorénavant compter avec Christiane Taubira (60 ans), qui devient garde des Sceaux. Qualifiée d’« électron libre », la députée de Guyane depuis 1993 et avocate de profession est l’auteure de la loi qui porte son nom sur la reconnaissance de la traite négrière et de l’esclavage comme crime contre l’humanité. Dans ses missions, elle sera aidée par une ministre déléguée, Delphine Batho (39 ans), qui, lors de la campagne présidentielle de 2007, avait soutenu Ségolène Royal pour l’instauration de l’encadrement militaire des mineurs délinquants. Au-delà des réformes institutionnelles pour renforcer l’indépendance de la justice, Christiane Taubira a déjà annoncé qu’elle allait supprimer les tribunaux correctionnels pour mineurs instaurés par la loi du 10 août 2011 relative à la participation des citoyens au fonctionnement de la justice pénale et au jugement des mineurs (3). Une réforme très critiquée par les professionnels car contraire, selon eux, à l’ordonnance du 2 février 1945 relative à l’enfance délinquante qui privilégie l’éducatif. L’objectif est de « faire en sorte que la justice des mineurs redevienne spécifique » et de « construire des programmes de prévention [de la délinquance des mi­neurs] adaptés aux territoires », a souligné François Hollande dans une lettre adressée à l’Association française des magistrats de la jeunesse et de la famille lors de la campagne présidentielle.

Par ailleurs, Manuel Valls (49 ans), maire d’Evry et député (PS) de l’Essonne, dont la sécurité est l’un des thèmes de prédilection, prend en toute logique la tête du ministère de l’Intérieur. Auparavant rattaché au ministère de l’Intérieur, les Outre-Mer font aujourd’hui l’objet d’un ministère dédié confié à Victorin Lurel (60 ans), président du conseil régional de Guadeloupe et secrétaire national du PS chargé de l’outre-mer depuis 2005. Signalons enfin la nomination de Kader Arif (52 ans), ministre délégué aux anciens combattants auprès du ministre de la Défense.

Organisation du territoire, logement et fonction publique

Après avoir été notamment garde des Sceaux de 2000 à 2002, Marylise Lebranchu (65 ans) fait son retour au gouvernement au ministère de la Réforme de l’Etat, de la Décentralisation et de la Fonction publique. Parmi ses priorités : mettre un terme à la révision générale des politiques publiques et préparer un nouvel acte de décentralisation, le troisième depuis 1981. L’enjeu sera d’augmenter les préro­gatives des collectivités territoriales tout en les responsabilisant sur leurs dépenses.

La secrétaire nationale d’Europe Ecologie Les Verts, Cécile Duflot (37 ans), urbaniste de formation, fait quant à elle son entrée au gouvernement en qualité de ministre de l’Egalité des territoires et du Logement. Elle sera épaulée par François Lamy (52 ans), ministre délégué chargé de la ville, député (PS) de l’Essonne depuis 1997. Première mesure annoncée par Cécile Duflot : la prolongation du dispositif hivernal d’hébergement d’urgence jusqu’au 31 mai, étant précisé que le gouvernement « Fillon » avait déjà exceptionnellement repoussé sa fermeture du 31 mars au 22 mai. Cette décision devrait permettre de « prolonger les crédits d’une semaine pour recenser l’ensemble des besoins et mettre en place un dispositif permettant d’éviter toute remise à la rue [des sans domicile fixe] sans solution », a expliqué Stéphane Sitbon, conseiller spécial de la ministre, à Médiapart le 22 mai. L’objectif est ici de « mobiliser l’ensemble des acteurs pour faire en sorte que les places dans les foyers d’urgence soient libérées par ceux qui ont droit à un logement et [d’]accueillir les personnes qui sont en plus grande fragilité dans les lieux d’hébergement de plus grande qualité ».

CONFÉRENCE SOCIALE : QUELLE MÉTHODE ?

Lors du conseil des ministres du 23 mai, le Premier ministre a dévoilé la méthode du gouvernement pour préparer la conférence sociale promise par François Hollande lors de la campagne présidentielle.

Devant rassembler patronat, syndicats et gouvernement « avant le 14 juillet », a assuré Jean-Marc Ayrault, cette grand-messe, qui sera ouverte et clôturée par le président de la République, doit permettre de se saisir des priorités sociales du pays. Selon le chef du gouvernement, il s’agira plus précisément de « partager les éléments de diagnostic et d’engager les travaux qui permettront d’apporter des réponses adaptées, notamment sur l’emploi, la formation professionnelle, la compétitivité, les salaires, les retraites ou encore les conditions de travail ». Pour préparer la conférence, Jean-Marc Ayrault, accompagné des ministres du Travail, des Affaires sociales et de la Fonction publique, rencontrera le 29 mai chacune des organisations patronales et syndicales représentatives. Puis, « au début du mois de juin », il réunira l’ensemble de ces organisations pour arrêter avec elles les modalités de préparation, l’organisation et l’ordre du jour de la conférence sociale qui, selon le Premier ministre, « s’inscrira dans un processus continu tout au long du quinquennat, organisé autour de rencontres régulières ». Au final, a-t-il souligné, la conférence sociale permettra d’« ouvrir les chantiers de réformes identifiés, de fixer, en fonction des priorités ainsi dégagées, le calendrier des travaux et de déterminer selon quelle méthode chacune des thématiques sera traitée : négociation entre partenaires sociaux, concertation, exercice tripartite Etat-organisations syndicales-organisations patronales ».

LA COMPOSITION DU NOUVEAU GOUVERNEMENT

 PREMIER MINISTRE

Jean-Marc AYRAULT

Alain VIDALIES, ministre délégué chargé des relations avec le Parlement

 MINISTÈRE DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES

Laurent FABIUS, ministre

Bernard CAZENEUVE, ministre délégué chargé des affaires européennes

Pascal CANFIN, ministre délégué chargé du développement

Yamina BENGUIGUI, ministre déléguée chargée des Français de l’étranger et de la francophonie

 MINISTÈRE DE L’ÉDUCATION NATIONALE

Vincent PEILLON, ministre

George PAU-LANGEVIN, ministre déléguée chargée de la réussite éducative

 MINISTÈRE DE LA JUSTICE

Christiane TAUBIRA, garde des Sceaux, ministre de la Justice

Delphine BATHO, ministre déléguée

 MINISTÈRE DE L’ÉCONOMIE, DES FINANCES ET DU COMMERCE EXTERIEUR

Pierre MOSCOVICI, ministre

Jérôme CAHUZAC, ministre délégué chargé du budget

Benoît HAMON, ministre délégué chargé de l’économie sociale et solidaire

 MINISTÈRE DES AFFAIRES SOCIALES ET DE LA SANTÉ

Marisol TOURAINE, ministre

Michèle DELAUNAY, ministre déléguée chargée des personnes âgées et de la dépendance

Dominique BERTINOTTI, ministre déléguée chargée de la famille

Marie-Arlette CARLOTTI, ministre déléguée chargée des personnes handicapées

 MINISTÈRE DE L’ÉGALITÉ DES TÉRRITOIRES ET DU LOGEMENT

Cécile DUFLOT, ministre

François LAMY, ministre délégué chargé de la ville

 MINISTÈRE DE L’INTÉRIEUR

Manuel VALLS, ministre

 MINISTÈRE DE L’ÉCOLOGIE, DU DEVELOPPEMENT DURABLE ET DE L’ÉNERGIE

Nicole BRICQ, ministre

Frédéric CUVILLIER, ministre délégué chargé des transports et de l’économie maritime

 MINISTÈRE DU REDRESSEMENT PRODUCTIF

Arnaud MONTEBOURG, ministre

Sylvia PINEL, ministre déléguée chargée de l’artisanat, du commerce et du tourisme

Fleur PELLERIN, ministre déléguée chargée des petites et moyennes entreprises, de l’innovation et de l’économie numérique

 MINISTÈRE DU TRAVAIL, DE L’EMPLOI, DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE ET DU DIALOGUE SOCIAL

Michel SAPIN, ministre

 MINISTÈRE DE LA DEFENSE

Jean-Yves LE DRIAN, ministre

Kader ARIF, ministre délégué chargé des anciens combattants

 MINISTÈRE DE LA CULTURE ET DE LA COMMUNICATION

Aurélie FILIPPETTI, ministre

 MINISTÈRE DE L’ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR ET DE LA RECHERCHE

Geneviève FIORASO, ministre

 MINISTÈRE DES DROITS DES FEMMES

Najat VALLAUD-BELKACEM, ministre et porte-parole du gouvernement

 MINISTÈRE DE L’AGRICULTURE ET DE L’AGROALIMENTAIRE

Stéphane LE FOLL, ministre

 MINISTÈRE DE LA RÉFORME DE L’ÉTAT, DE LA DÉCENTRALISATION ET DE LA FONCTION PUBLIQUE

Marylise LEBRANCHU, ministre

 MINISTÈRE DES OUTRE-MER

Victorin LUREL, ministre

 MINISTÈRE DES SPORTS, DE LA JEUNESSE, DE L’ÉDUCATION POPULAIRE ET DE LA VIE ASSOCIATIVE

Valérie FOURNEYRON, ministre

Notes

(1) Trois propositions de loi socialistes ont d’ores et déjà été déposées auprès du Sénat pour pallier le vide juridique causé par le Conseil constitutionnel – Sur la décision de ce dernier, voir ASH n° 2759 du 11-05-12, p. 16 et n° 2760 du 18-05-12, p. 12.

(2) Voir ASH n° 2759 du 11-05-12, p. 5.

(3) Voir en dernier lieu ASH n° 2738 du 23-12-11, p. 18 et n° 2741-2742 du 13-01-12, p. 18.

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